Le principal mérite du film de Nakamura est de nous donner envie d'en savoir plus sur Kotaro Takamura, (peintre, sculpteur et poète) et de sa femme Chieko. Les deux personnages ont réellement vécu, et on reste étonné par la bienveillance de la présence de Takamura auprès de sa femme sombrant peu à peu dans la folie. Une folie par rapport à laquelle l'entourage de Chieko reste démuni, le diagnostic de schizophrénie étant émis tardivement, et par rapport auquel la médecine japonaise de l'époque restait manifestement démunie.
Mais mis à part les poèmes de Takamura qui scandent le déroulement du film (certains défilant sur l'écran font écho directement à des scènes présentées juste avant), l'aspect artistique fait quand même problème dans le film, alors qu'on peut dire que c'est un élément essentiel du film, puisque, secrètement, il dicte l'effacement de Chieko, dès lors qu'elle épouse Takamura et, plutôt que d'épanouir sa propre vocation artistique, cherche à être, selon ses propres mots, une bonne épouse.
Si l'on voit Takamura mettre la main à la pâte sur une sculpture, le sens plastique de "Portrait de Chieko" fait profondément défaut. Le vrai Takamura était un disciple de Rodin, et rien dans le film ne l'indique. On ne sent pas chez le cinéaste la volonté de s'étendre sur l'univers de la peinture ; c'est pour cela que son film devient unilatéralement un mélo, touchant mais larmoyant.
Il faut cependant reconnaitre à Shima Iwashita, dans le rôle de Chieko, une belle qualité d'interprétation. Il fallait pouvoir donner à son personnage l'ampleur nécessaire pour ne pas en faire une simple folle. Tour à tour absente, inquiète, régressant à un stade infantile, sujette à des pulsions violentes, on a rarement vu dans le cinéma japonais une interprétation aussi risquée, alors que l'acteur qui joue Takamura,(Tetsuro Tanba), se signale par une belle sobriété dans son jeu. Un film à la facture assez académique, mais dont les quelques atouts sont mis en avant essentiellement par les acteurs.