Les films caméra au poing, depuis le Projet Blair Witch, attirent les convoitises des réalisateurs sans véritable réussite. J.J Abrahms le redécouvre avec son Cloverfield mais le soufflé retombe assez vite. Rec de Jaume Balaguero et de Paco Plaza applique le principe au film de zombies et signe alors un des meilleurs films actuels du genre. Ce succès (deux prix au festival 2008 du film fantastique de Gérardmer et quatre au festival de Sitges) provient du profond respect du genre de la part des réalisateurs mais surtout de l'utilisation astucieuse de la caméra embarquée.


L'histoire marque le début d'un film de zombies relativement traditionnel : une épidémie se répand dans un immeuble particulier du centre de Barcelone. Les contaminés développent alors une agressivité et un certain intérêt gustatif pour la chair humaine. Un équipe de pompiers s'y retrouve envoyée, accompagnée d'un duo de journalistes sensé couvrir une nuit sans incidents. Une fois sur place, la situation empire et les survivants se retrouvent enfermés dans l'immeuble par les autorités espagnoles et ce, pour des raisons sanitaires. Un seul objectif : survivre alors que la contamination s'accélère parmi les occupants de l'immeuble.

Une caméra embarquée dans un film dans un survival zombiesque ? l'idée paraît lumineuse mais risquée. Le petit coup de génie du film consiste à donner la caméra à un professionnel, ici un caméraman de télévision locale. L'image devient alors plus cadrée qu'un Cloverfield (filmé comme l'aurait fait un enfant de 6ans) et moins hystérique que le projet Blair Witch (même si ce procédé constitue son principal intérêt). Si le film met du temps à rentrer dans le vif du sujet, ce n'est pour créer lentement une empathie envers l'héroïne et ses compagnons d'infortune. La jeune Angela (Manuela Velasco, récompensée à Sitges) et son ombre invisible de caméraman enquêtent sans comprendre ce qui se passent autour d'eux mais en ressentent l'impérieux besoin. A travers cette investigation et les morts qui se multiplient, le spectateur se retrouve totalement immergé dans l'horreur de l'immeuble.

Laissez crever votre voisin

Au fil du film, le cadrage devient plus abrupt tout en conservant un intérêt morbide pour tout ce qui serait susceptible de faire de l'audience. La vision de la caméra subit le drame de l'histoire : la torche de la caméra devient essentielle pour voir ce qui se passe, puis le passage à la vision nocturne correspond au rétrécissement de la vision mais également de leurs espoirs de survie. Rec monte crescendo, emmenant le spectateur curieux, puis angoissé face aux issues restantes. Il faut ajouter que, dans la veine actuelle des films de genre survival, l'autre devient beaucoup plus vite une menance lorsqu'il devient un fardeau. « Le chacun pour soi » s'avère alors la seule loi en vigueur auprès de citoyens ordinaires, ce qui rajoute une tension non négligeable dans le groupe de survivants.

Rec ne révolutionne pas le genre du film de zombies mais le prend sous un angle encore inexploré. Une trame simple, des personnages qui ressemblent à vos voisins de palier et une réalisation efficace font de Rec un des succès de l'année. Rec n'invente rien, sous ses airs de film à petit budget, il accentue le principe atout du film de zombies : le plus important n'est la quantité de sang qui coule, ni le nombre de kilos de tripes éventrées mais bien comment en perdre le moins et le plus tard possible.
Engagé-Guignol

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