Silence.

Il est à la fois juste et très brouillon, ce deuxième film de Mélanie Laurent.

Brouillon par ses cadres flottants quand ils auraient mérité d'être fixes, par ses mauvais choix de plans, parfois, trop académiques pour la spontanéité de ses actrices, par ses effets de lumière et de son trop appuyés, comme pour souligner le pathos de la situation, par ses portraits d'ados parfois trop artificiels et comme déconnectés de leur époque (parler du harcèlement sans évoquer l'aspect virtuel me semble étrange). Brouillon parce que sa construction est trop convenue (comme l'est sûrement celle du roman ici adapté).

Et pourtant juste, par le jeu des actrices, surtout, qui parviennent à faire saisir cet espèce de bouillonnement propre aux amitiés adolescentes ou aux rencontres passionnées, puis la bascule, quand vient la rupture, la perte des illusions, le malaise et, ici, la manipulation. Joséphine Japy et Lou de Laâge sont impressionnantes, chacune dans leurs rôles opposés et complémentaires : l'une, victime enfermée sur son incompréhension, déchirée entre sa volonté de pardonner au bourreau dont elle a perçu les failles et son impossibilité à la dénoncer, par peur et par pitié ; l'autre, transformant sa frustration familiale en mensonges éhontés et en recherche de contrôle de celle qu'elle envie, alternant les moments d'attaque et de tendresse pour maintenir le trouble chez l'autre et la tenir par la culpabilité, se faisant passer pour la victime quand la véritable victime reprend enfin le contrôle de sa vie (la dernière salve de Sarah, en cela, est "bien vue").

Il y a des moments outranciers, qui gâchent un peu le tout, mais je garderai en mémoire les fragiles moments de justesse douloureuse, qui m'ont profondément touchée en réveillant de laids souvenirs.