« Tu es un homme des années 70 » : probablement la sentence qui résume en de simples mots la teneur du film. Ce panachage romanesque entre deux générations hétéroclites augurait déjà la fracture inévitable d’un couple dont l’amour n’était pourtant pas à prouver.

Giulio et Vincenzina s’aiment. L’un a presque la soixantaine, l’autre arrive à sa majorité. Tous deux s’inscrivent dans ce contexte socioculturel où le syndicalisme entrepreneurial explose dans le but de faire valoir les droits ouvriers. Cela comme imprégnation et comme ébauche pour présenter Giulio, beau parleur déterminé par des convictions bien à lui ; et introduire Giovanni, un jeune policier capricieux dont la présence bouleverse la stabilité apparente du couple.

La jeunesse attire la jeunesse. Giulio tente de s’imposer comme l’homme moderne porté par des idéologies progressistes où tout le monde est libre de disposer de soi comme il l’entend et où la violence ne doit subsister. [1] Et Vincenzina, cloitrée dans ce pauvre appartement, s’efforce de résister à un désir charnel, tentation allégoriquement caractérisée lorsqu’elle se confronte à Giovanni surplombés par une immense mur d’un rouge éclatant.

La forme du film sert comme exutoire pour les personnages qui n’hésitent pas à rembobiner la scène, à la mettre en pause pour assurer pleinement la compréhension du spectateur. L’un est même conscient d’être dans une œuvre fictive en soulignant l’absurde trame d’un scénario propre au cinéma. En résultent des séquences qui prêtent souvent à rire, surtout celle de Vincenzina racontant son aventure en images que Giulio découvre comme nous avec le pouvoir de les faire cesser par ses commentaires. Le métrage s’apparente partiellement à ce qu’a réalisé Ettore Scola, qui joue aussi avec la bobine au début de « Nous nous sommes tant aimés » et où les pensées des personnages emplissent le récit au point de le suspendre.

Par l’intermédiaire de ce médium, Giulio nous raconte ses regrets, ses actes. Mario Monicelli le filme avec la plus grande sympathie possible – et son groupe d’amis aussi auquel aucun jugement fielleux n’est asséné et où leurs facéties provoquent un rire sincère. Vincenzina, érotisée par ses jupes et hauts colorés, n’est tout aussi soumise à nulle critique négative par la caméra et s'en remet à ses propre sentiments. Selon elle, aimer c’est être jaloux. Et ça, Giulio l’apprendra à ses dépens.

Car son amour ira au-delà des « principes de l’homme des années 70 » pour laisser entrevoir sa nature passionnelle, celui de posséder entièrement Vincenzina. La violente dispute avec Giovanni en sera le pinacle. Mais la femme moderne n’appartient à personne et Vincenzina s’éclipsera pour devenir entièrement autonome.

Histoire d’amour somme tout classique portée par une légèreté délicieuse, « Romances et confidences » malgré un manque de consistance et un rythme irrégulier, se délecte simplement. Loin d’être un chef d’œuvre, mais un film sympathique, c’en est certain.

[1] La comparaison avec la jeunesse des années 70 est d’ailleurs intéressante. La scène avec le Biker hippie en est un bon exemple, où l’ancienne génération peine à comprendre les actes de leurs enfants entrainés par l’exaltation de leur amour et d’un désir de liberté. Giulio essaye de s’y complaire mentalement que physiquement, le début du film l’annonçant plus ou moins.

YohannBriand
7
Écrit par

Créée

le 18 juil. 2021

Critique lue 151 fois

2 j'aime

2 commentaires

Yohann Briand

Écrit par

Critique lue 151 fois

2
2

D'autres avis sur Romances et Confidences

Romances et Confidences
Alligator
6

Critique de Romances et Confidences par Alligator

Monicelli, Age, Scarpelli, Muti et Tognazzi : en voilà une affiche qui vous met l'eau à la bouche! A tous les niveaux, le film a donc bien des attraits. Dans une certaine mesure pourtant il ne va...

le 22 juin 2014

2 j'aime

1

Du même critique

Ága
YohannBriand
8

Ces glaciales et pures étendues

Sibérie Arctique ; beaux paysages, immaculés de neiges, aussi impressionnants dans leur immensité que dans leur absence de vie, sublimés au sein du film par de longs panoramas et d'albes horizons. Au...

le 17 févr. 2021

4 j'aime

1

Romances et Confidences
YohannBriand
7

L'homme des années 70

« Tu es un homme des années 70 » : probablement la sentence qui résume en de simples mots la teneur du film. Ce panachage romanesque entre deux générations hétéroclites augurait déjà la fracture...

le 18 juil. 2021

2 j'aime

2

Audrey Hepburn
YohannBriand
10

La magie Audrey Hepburn

S’il me fallait unir la beauté à un nom, je ne tergiverserais quant à mon choix. Par son élégance irréfragable, aussi faste qu’enivrante ; par sa décente retenue dont la pudeur affriole l’imagination...

le 30 juin 2021

2 j'aime

3