Shadow
6.7
Shadow

Court-métrage de Lorenzo Recio (2014)

L’ombre n’est pas l’antithèse de la lumière

« J'ai tout donné au soleil, tout, sauf mon ombre » disait Guillaume Apollinaire. Cette citation, Lorenzo Recio se l’est sans aucun doute appropriée dans son dernier film au titre équivoque, Shadow, « ombre » en français. Dès les premières images, le ton est donné : Xia Shou, le personnage principal, exerce son art de montreur d’ombres dans un théâtre chinois. Le spectacle est ciselé, élégant, immaculé. Les ombres se distinguent avec grâce sur un fond lumineux pour une allégorie de ce qu’il va suivre, un condensé de la rhétorique du réalisateur.

La rhétorique justement. Shadow tend à montrer que l’ombre n’est pas l’antithèse de la lumière, qu’au contraire elles sont deux choses qui parfois se combinent, plus ou moins harmonieusement. Ainsi Xia Shou, lorsqu’il rencontre une jolie blonde prénommée Ann, voit violemment les escarres de sa vie mis en pleine lumière. Son frigo est vide, les théâtres où il se produit aussi. Mais l’apparition d’Ann, qui l’obsède rapidement, permet de mettre en relief ce qui lui fait réellement défaut : la braise de l’amour.

Mais la braise est ardente et le montreur d’ombres ne tarde pas à se bruler. Xia Shou décide alors de tout tenter pour mettre la main sur cet amour qui lui manque tant, la sublime Ann. Se met alors en place un processus aussi poétique que kafkaïen qui aboutira à la disparition physique de Xia et à l’anéantissement moral d’Ann. De cette fragmentation exercée par la lumière (Xia disparaît car il ne la reflète plus, Ann parce qu’elle ne la dévie plus) nait une troisième entité à part entière, une entité dans laquelle se fondent harmonieusement les deux personnages principaux. Le fruit de cette fusion, le réalisateur le révèle au spectateur dans un dernier plan en apothéose noyé dans la lumière.
Timothé_Poulain
8

Créée

le 13 juil. 2014

Critique lue 341 fois

3 j'aime

Critique lue 341 fois

3

D'autres avis sur Shadow

Shadow
YgorParizel
8

Critique de Shadow par Ygor Parizel

Court-métrage fantastique avec dans un esprit typiquement asiatique. En quelque sorte une histoire de fantôme mélancolique qui tombe amoureux d'une jeune femme. La réalisation est propre et offre des...

le 20 déc. 2015

1 j'aime

Shadow
aldanjack
7

ombre est là

A Taipei, un jeune taïwanais donne des représentations de théâtre d’ombres, mais le public ne semble plus vraiment intéressé par cet art traditionnel. Après avoir suivi une jolie fille blonde qu’il a...

le 5 janv. 2015

1 j'aime

Du même critique

Piège de cristal
Timothé_Poulain
8

Critique de Piège de cristal par Timothé Poulain

Ce n'est pas à cause d'Hitler que j'ai quelque part toujours eu de l'appréhension envers le allemands, c'est à cause de Hans et sa terrible bande ! C'est dire si ce film est marquant ! Une référence...

le 8 juil. 2013

4 j'aime

3 Billboards - Les Panneaux de la vengeance
Timothé_Poulain
2

Critique de 3 Billboards - Les Panneaux de la vengeance par Timothé Poulain

Tout petit film par sa dimension narrative (on est plus proche d'une suite de sketchs que d'un long-métrage) et sa critique sociale éculée. On l'a bien compris, les méchants très méchants (policiers,...

le 22 janv. 2018

3 j'aime

1

120 battements par minute
Timothé_Poulain
1

Critique de 120 battements par minute par Timothé Poulain

Littéralement l’antithèse du cinéma. Un film bête qui fait l’apologie d’Act up sans aucun recule ni réflexion. On est très loin de Cannes mais très proche du film de propagande stalinien.

le 25 oct. 2017

3 j'aime

5