C'est difficile de se remettre dans l'ambiance de l'underground anglais, ne serait-ce que parce qu'il était… underground. Cox a trouvé la solution : ne pas essayer. Très décrié pour son manque de fidélité à l'histoire de Sid Vicious, Sid and Nancy est un film qui marche si on ignore sa tentative d'être biographique. Cela présente l'avantage de passer l'éponge sur les inventions et d'excuser Gary Oldman pour une interprétation qu'il regrettera toute sa vie (je l'ai trouvé très bien, en revanche c'est Chloe Webb qui a parfois tendance à faire passer l'esprit punk par le surjeu). Bon : ce n'est pas Sid, et ce n'est pas les Sex Pistols.
Partant de là, on découvre une histoire taillée par le punk et pour le punk, déroulée dans un chaos aux contours flous qui traverse des évènements successifs on ne sait trop comment (ou bien ce sont eux qui le traversent ?). En orbite autour du brouillard gluant de la drogue (très bien traduit par des personnages secondaires effacés malgré leur importance, comme celui de l'imprésario), il y a les raisons de vivre, auxquelles on s'accroche tant bien que mal. Ou plutôt mal que bien. La descente aux Enfers, traduite par une photographie de plus en plus grisâtre de Deakins, est peuplée de démons qui distingueront l'œuvre parmi ses pairs (je pense inévitablement à Trainspotting), un parcours qu'on associe sans mal à tous les autres courants culturo-musicaux qui se feront l'exutoire d'un mal-être inexprimable.
Le film peut donner l'impression de ne pas aller très loin, surtout si on en attend un biopic. Cependant il est fidèle à un esprit autodestructeur qui se donnait pour principe d'avoir une existence intense pour ne pas oublier d'exister. Mission accomplie : on n'a pas oublié Sid et Nancy.