Prochainement : Silent Hill Re-Revelation 3D (ou Vengeance 3D, ça sonne bien aussi).
Bon, c'est mauvais.
J'aurais du m'en douter avec un tel titre aussi (enfin non, je le sentais). "Revelation 3D", sérieusement... Quelle révélation ? On la connait déjà quand on a joué ne serait-ce qu'une fois au jeu, et on l'apprend dans le premier quart d'heure quand on regarde le film. D'où "Revelation" ?
Bref. Silent Hill et moi, c'est une longue histoire. L'annonce du premier film il y a quelques années m'avait enchanté, et malgré quelques libertés entreprises ici et là (parfois (très) incohérentes), j'avais finalement et simplement passé un bon moment. On sentait le travail fourni et la passion derrière. Fan service respecté et respectueux malgré la libre adaptation.
Cela dit, cela fait longtemps que les mots "Silent Hill" me laissent de marbre, froid, indifférent, ou me font peur dans le mauvais sens du terme, comme beaucoup de fans d'ailleurs: licence massacrée, charcutée, broyée, qui n'est plus que l'ombre de l'argent qu'elle a rapporté. Ces mots qui pourtant, jadis, me faisaient vibrer...
Cette série artistiquement de haute volée n'est devenue qu'une sorte de cachet visuel "conceptart-émo-glauque-moderno-poético-malsain-gore", violant l'âme de sa mythologie, littéralement.
Je suppose que tout le monde s'est exprimé, que les fans comme les cinéphiles (voire les deux en même temps) ont à juste titre craché sur ce film. Mais je voudrais à mon tour déféquer dessus.
** SPOILERS. ** (Mais on s'en fout, le film est raté.)
Mon problème, enfin "mon", c'est que :
- Heather est fade, creuse, inexistante, laisse rien transparaitre, mais rien hein. Un pot de moutarde est plus expressif. Sean Bean aussi d'ailleurs. Mais on fait tous de l'alimentaire.
- Douglas, le personnage mystérieux et intrigant du jeu qui nous suit dans toute l'aventure est ici tellement inutile qu'il crève dans les 10 minutes du film au bout de trois répliques. Ok.
- Vincent, fascinant personnage dans le jeu, est une sorte d'adolescent qui vient de l'ooooordre religieux blablabla de Silent Hill mais qui est super gentil mais dont Heather se méfie quand même mais que de toute façon ils vont s'embrasser parce que quand on est dans les enfers et les ténèbres en même temps, un smack et ça dédramatise tout, un peu de romance c'est kawaii. Sérieux les mecs ? Vous avez osé faire ça ? Vous avez tout compris à Silent Hill... (La salle a ri chez moi, et j'ai personnellement sorti le plus beau facepalm de ma vie à ce moment là.) Il n'y a pas de romance dans Silent Hill, pas une seule. Que de l'amour malsain. C'est une série dramatique je rappelle.
- Alessa a changé, pas juste l'actrice, c'est devenu une sorte de gamine gothique maquillée. Euh, ouais.
- Pyramid Head, l'incroyable, le beau, le magnifique du jeu, reprend du service parce qu'il rapporte du pognon quitte à pisser sur les fans. Masahiro Ito, son designer, doit s'en mordre les doigts. James Sunderland aussi d'ailleurs.
- Et que dire... Le combat final entre Pyramid Head et Claudia (QUEL EST LE FUCK ?!) est d'un ridicule, totalement injustifié, grotesque, lamentable. C'est honteux. Ils voulaient faire quelque chose de culte, c'était comique.
- Chris aka Harry maintenant (le nom d'origine dans le jeu, allez on change les noms, youpi, on s'en tape) se fait capturer comme une buse et se fait sauver tranquillement par sa fille, cordialement remerciée, normal. (Devant le combat de fin pseudo-failo-épique)
- La rencontre entre Heather et Alessa manque de...comment dire...talent. Tout l'opposé du jeu.
- Mélodiquement, quelques vagues survivantes de bribes sonores viennent du jeu, le reste est ré-interprété et ne sonne ni "jeu vidéo", ni Yamaoka.
- Les acteurs sont amers, ne dégagent rien. Rien.
- Et l'ensemble du film est prévisible. Vous savez ce que ça veut dire prévisible ? C'est PRÉ-VI-SIBLE. Les dialogues, les apparitions, les scènes, tout. Je n'ai jamais vu ce film avant, même une seule bande annonce, et pourtant je voyais tout venir.
Sans parler des lapins moches, même pas ressemblants, des enfants surmaquillés pour faire peur, des clowns bidons, des hallucinations, des jumpscares affligeants, des scènes gores gratuites pas du tout dans l'esprit de Silent Hill, les personnages secondaires qui apparaissent 30 secondes et qui crèvent...
Si vous voulez, dans un sens, je ne suis pas même pas déçu parce que j'en attendais tellement rien à la base, je n'avais aucun entrain, aucun petit frémissement, juste curieux de savoir ce qu'ils avaient fait de ma licence chérie. Je suis sorti avec ce sentiment récurrent de me dire que le prix de la place aurait pu partir dans un kebab, j'aurais eu plus de plaisir.
Et tout le reste, c'est basique, simpliste, suffisant. C'est torché. Réalisé par un mec qui débarque de nul part dans l'univers, qui n'a certainement pas touché un Silent Hill et qui a du voir quelques trailers pour s'inspirer. Un enfant avec moins de budget aurait fait mieux pour peu qu'il ait joué aux jeux.
Certes il y a des clins d'oeil aux fans (quand c'est pas n'importe quoi comme la scène de la voiture où c'était Heather et Douglas, et maintenant dans le film Heather et Vincent, sans le thème "Letter"), mais ça ne suffit pas à faire remonter l'estime du film.
Tout n'est pas à jeter, pas entièrement tout. Le design des monstres est toujours excellent selon moi, la scène avec les mannequins est relativement bien fichue, deux trois effets ici et là sont tout de même saisissants et flattent la rétine, mais pour le reste c'est gratuit, inutilement gore (quand à la base c'est une licence d'horreur psychologique) et Silent Hill 1 (le jeu) avait beaucoup moins de moyens et a marqué au fer rouge.
Alors non seulement c'est une libre adaptation d'une libre adaptation (donc l'authenticité prend cher), mais ce qui me dérange profondément, c'est que ce patrimoine artistique incroyable est devenu de la simple "pop-horror", limite "teenage movie", un peu gore mais surtout grand public. C'est véritablement du viol.
La prochaine étape, si tout se passe mal comme prévu, c'est les adolescentes de 14 ans déguisées en infirmière dans les lycées pour montrer leur rébellion contre le système. Riez, riez. Ca arrivera.
Bref, j'ai même pas envie de tourner cette critique en quelque chose de comique, il y a là matière pour, mais j'ai autre chose à faire, j'ai déjà suffisamment écrit.
C'est une insulte aux fans, à la mythologie, à la spiritualité, à l'essence même du jeu et rejoint donc bien tristement le panthéon des adaptations pourries, seul rescapé jusqu'alors des portages jeux/films. La scène de fin fait évidemment deviner qu'il y aura une suite (on aperçoit Travis dans un camion), et j'en pleure déjà. Laissez tranquille cette licence, pitié.
Ce film est donc un échec, mais ça, c'est une révélation pour personne malheureusement.
