Je veux être honnête : je n'aime pas être pessimiste et déteste davantage adorer une licence qui me parle, et empêcher que de ses cendres naissent de nouveaux éclats de créativité. Peu m'importait qu'un épisode XII sorte ; après tout, l'univers de Star Wars est un terreau suffisamment fécond pour raconter toutes les histoires concevables. Naturellement, j'ai été déçu ; qu'on s'adresse aux fans de la trilogie originale et aux déçus de la prélogie, je l'entends. Après tout, ce serait mentir que d'avancer que les trois premiers épisodes sont exempts de défaut. Mais voilà, l'épisode IX - et la "nostalogie" en général - ne possède ni l'humilité des premiers films ni le sublime - teinté évidemment d'une trop grande maladresse - de la trilogie des années 2000. C'est d'autant plus regrettable quand on fait de Rian Johnson le nouveau bouc-émissaire de cette saga, quand l'épisode VIII a - non sans mal - essayé d'apporter une fraîcheur et une liberté scénaristiques inédites à l'univers Star Wars depuis les derniers films de Lucas.


Je sais, je parle peu de L'Ascension de Skywalker, mais c'est que j'ai l'impression que tout a été dit ; que je m'évertue à tenir le même discours depuis 2015. Non, le travail d'Abrams n'est pas ennuyant, le spectateur est diverti. Oui, la photographie est soignée et la mise en scène intelligente, parfois. Bien sûr, il m'arrive d'avoir des frissons ; mais des frissons obtenus avec une facilité si désinvolte et nonchalante qu'elle ne témoigne que d'un manque de prise de risques évident. Ah ! Les dialogues de l'épisode II sont mielleux ; on y croit pas ! Sans doute, mais j'ai bien plus d'empathie pour Anakin et Padmé, malgré des dialogues bancals (dont le ridicule n'est sauvé - il faut le dire - que par la réputation de "memes" qu'ils ont récemment obtenu) et une direction d'acteur catastrophique. Je n'en ai que faire de Rey, Poe et Finn ; et après six heures de films (à peu près), il m'apparaissent toujours comme des inconnus. Je ne sais pas pourquoi, mais tout transpire l'artificialité, dans cette trilogie ; quand la prélogie, à défaut d'avoir une écriture solide (également), dégage encore aujourd'hui une certaine candeur, que ce soit dans le jeu que propose ses acteurs, ou son récit. C'est qu'on m'invite à penser cette nouvelle trilogie dans son autonomie, quand elle ne revendique jamais son indépendance au regard des épisodes IV, V et VI.


Tout n'est pas à jeter ici : j'apprécie beaucoup Driver, quoique le personnage de Ren soit tout aussi maladroitement écrit que les autres ; mais quel sort lui réserve-t-on, bon sang !


On fait toute une caisse de la mort prétendue (et que le spectateur vient presque à fantasmer) de Chewbacca, quand on expédie la sienne en dix secondes. C'est terrible !


Comprenez qu'en tant que fan buté de la prélogie, toutes ces références à trilogie originale n'ont aucun effet sur moi ; depuis quarante ans, les productions de la culture populaire lui rendent hommage. Naturellement, je me sens blessé quand on apporte trop peu de crédit à tout un pan de l'œuvre Star Wars, trop injustement écarté. Pour les fêtes, je préfère être surpris, plutôt que d'aller choisir mes cadeaux en grande surface, avec mes proches ; c'est ici la même chose. À l'endroit où j'aurais pu enfin être pris de court, l'effort n'a même pas été fait.


Et quoi ? En plus de ne pas tenir compte de la prélogie (véritablement décanonisée), il faut oublier la résolution de l'épisode VI ; se moquer de ses enjeux ? Allons ! C'était évident, après un tel départ. Que retenir de la trilogie originale ? Du sable, des soldats casqués, la Cantina et l'Empereur ? Enfin ! Et les questions posées par les deux trilogies précédentes, qui n'ont toujours pas été résolues ; et celles qu'ajoutent ces trois nouveaux films ? Écartées, elle aussi ; ou bien les réponses apportées sont insatisfaisantes. Cette trilogie, c'est celle du déni - même si l'entreprise était de rendre hommage à l'héritage Star Wars.


Merci au Nostalgia Critic et compagnie d'avoir offert - au moyen d'un travail porté depuis des années - à la prélogie une réputation terrible, qui marque encore de nos jours les spectateurs. À la haine des films de Lucas, répondent les défauts de ceux d'Abrams. Mais j'observe que tout le monde n'a pas été déçu par la trilogie des années 2010, et je m'en réjouis. Je regrette seulement que celle-ci, à défaut d'avoir permis au spectateur de se rassembler fraternellement - et les enfants qui ont grandi avec Star Wars -, les a divisés.


Ce dernier épisode devait avoir le goût d'une victoire ; il résonne davantage comme un échec blessant.

Insolourdo
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le 26 déc. 2019

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