Strangulation Blues
6.4
Strangulation Blues

Court-métrage de Leos Carax (1980)

"Quand on aime pas la vie, on va au cinéma."

Leos Carax, alors âgé de vingt ans nous livre son premier long-métrage après l'échec de La Fille Rêvée qui se retrouve avorté suite à l'explosion d'un projecteur entraînant un incendie dans le restaurant chinois où se tourne le film. Primé par le Grand-Prix du court-métrage au festival de Hyères en 1981, Strangulation Blues permet au réalisateur de s'affirmer sur la scène française et d'accéder ainsi à la réalisation de son premier long-métrage Boy meets girl en 1984 et de devenir par la suite le réalisateur sulfureux que l'on connait aujourd'hui.


Strangulation Blues définit à lui seul la personnalité obscure de Carax dont l'on sait très peu de chose. Ce qui est dit dans le film peut être interprété comme la manière dont Carax est arrivé au cinéma ainsi que le désespoir qui le caractérise : "Dans son appartement il a coupé le téléphone, il a peint toutes les vitres en noir. Un jour dans la queue d'une ANPE il rencontre un ami d'enfance qui fait dans le cinéma et lui dit : 'Pauvre homme, c'est avec des œufs cassés que l'on fait les meilleures omelettes. Pourquoi tu n'utilises pas tout ton authentique désespoir pour écrire un scénario ?' Alors voilà, là dessus mon héros se met au travail jour et nuit et il reprend goût à la vie. Cinq mois plus tard, il apporte son scénar au Centre et comme on refuse de lui filer le fric pour son projet, il se flingue."


On assiste donc dans ce court-métrage au tout début du jeu identitaire qu'impose Leos Carax dans la suite de sa carrière. Il use ainsi d'un pseudonyme (Leos Carax à la place de son véritable nom Alex Dupont) et annonce une identification prononcée avec son protagoniste principal qui trouvera écho plus tard dans sa carrière avec son alter égo cinématographique joué par Denis Lavant. On retrouve également dans Strangulation Blues le noir crépusculaire, le mélange entre cinéma muet et de Nouvelle Vague, et surtout son rapport aux relations amoureuses qui s'affirmeront dans son premier long-métrage, puis dans le reste de son oeuvre. Strangulation Blues pose donc les bases d'un cinéma cohérent et percutant qui est celui de Leos Carax, et c'est en cela que le court-métrage est à mes yeux plus qu'une oeuvre de jeunesse du réalisateur, mais une véritable pierre angulaire permettant d'éclaircir les points si sombres qui hantent son univers.


Et pour voir le film, je vous invite à vous rendre ici : https://www.youtube.com/watch?v=HZG4ThunsSs

Corn-Flakes
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 24 nov. 2018

Critique lue 956 fois

8 j'aime

Corn-Flakes

Écrit par

Critique lue 956 fois

8

Du même critique

Sheitan
Corn-Flakes
7

Critique de Sheitan par Corn-Flakes

Un film à double tranchant, s'adressant premièrement à une jeunesse française avec ces personnages et leurs langages. Puis, après, à nous, vieux con à la critique facile. J'avoue que je m'attendais à...

le 4 août 2010

24 j'aime

2

Invocation of My Demon Brother
Corn-Flakes
10

69, année diabolique.

1969. C'est une date importante aussi bien au niveau des Etats-Unis qu'au niveau mondial. C'est effectivement une période située en plein cœur du mouvement hippie, avec son apogée le 15 août de cette...

le 20 mars 2011

21 j'aime

14

L'Étrange Noël de Monsieur Jack
Corn-Flakes
10

Critique de L'Étrange Noël de Monsieur Jack par Corn-Flakes

The Nightmare Before Christmas a été le premier film que j'ai pu voir au cinéma quand j'étais âgé de six ans. Il a par la suite était omniprésent dans mon imagination, et petit à petit dans mon...

le 17 janv. 2011

18 j'aime

11