Je me souviens qu'à sa sortie en 1982, "Taps" m'avait impressionné, m'avait séduit même, et que j'avais un temps suivi la carrière du réalisateur Harold Becker, avant de réaliser que s'il y avait deux carrières à suivre, c'étaient celles de Sean Penn et de Tom Cruise, qui allaient enterrer joliment Timothy Hutton, le jeune premier sur lequel Hollywood misait à l'époque. Ce qui reste de toute manière intéressant dans "Taps", c'est comment l'enthousiasme que dégagent ses jeunes héros au début de l'histoire épate le spectateur et l'embarque lui aussi dans une rébellion assez stupide, mais non sans panache, contre tout ce que la société "moderne" a de haïssable : la soif de l'argent, l'abandon des valeurs humaines les plus profondes, le choix de la lâcheté. Et même s'il y a évidemment un peu de gêne à ainsi embrasser le credo militaro-fasciste débité par le toujours fascinant George C. Scott, on aime croire un instant au moins dans des idéaux non dévoyés par les compromis de l'âge adulte. L'habileté du film est de prendre son temps - "Taps" adopte un rythme assez indolent, et manque indéniablement de moments vraiment forts (on les attend, on sera déçu) - pour nous montrer que, oui, c'est la raison qui malheureusement doit l'emporter, et que "l'amour de la Mort" inculqué aux jeunes cadets est horriblement éloigné de la vraie nature humaine, et même du fonctionnement "réel" d'une vraie armée. Ce n'est pas une leçon stupide, loin de là, que nous donne "Taps", loin de toute démagogie et de toute facilité, cultivant au contraire avec intelligence l’ambiguïté de son sujet. Pourtant, malgré ce script brillant, et malgré tous les efforts de son casting jeune et vigoureux (en tenant compte que et Sean Penn et Tom Cruise en font indéniablement trop ici...), "Taps" reste un film moyen, qui décline son récit sans lui conférer ni véritable profondeur ni résonance : c'est bien à Harold Becker, piètre réalisateur, qu'il faut en attribuer la faute. Entre des mains plus compétentes, ou plus inspirées, "Taps" aurait pu être un grand film. [Critique écrite en 2016]

EricDebarnot
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le 16 nov. 2016

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Eric BBYoda

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