La Terre lointaine, c’est le Portugal pour le Brésil, ou vice-versa. On aime encore à dire que le pays d’Amérique du Sud a été fondé par les Portugais, comme si l’on ignorait qu’il a pris l’ascendant sur eux pour tout.


En tout cas, le film se situe à l’heure du tournant, de l’hyperinflation & de l’ouverture du Brésil par le président Collor à la globalisation économique. Il n’est pas aberrant d’y voir le plus grand évènement historique depuis que les deux entités lusophones se font face par-delà la grande eau, & le film de Salles & Thomas est notamment étonnant pour le recul efficace qu’il prend sur tout cela malgré la semi-décennie seulement qui les en séparait à l’époque.


Le résultat est un peu froid. Le noir & blanc est une privation bien connue des grands cinématographes, & peut-être que cela rajoute la couche de trop à un thriller dramatico-social qui se doublait déjà de références littéraires quand il ne comparait pas la vie des jeunes à l’expédition d’Aguirre. Joli parallèle toutefois entre le conquistador & Eizaguirre, le nom hispano-luso-basque du personnage principal, même si je n’ai su voir de métaphore sociale plus haute que ce qui se résume presque à un jeu de mots, même dans ses développements scénaristiques.


L’œuvre fait appel à toute la culture du spectateur, au point de le reléguer au rang d’étranger si ses notions d’Histoire ne rivalisent pas au moins avec celle d’un Portugais ou d’un Brésilien, encore que… les relations entre les deux & le rôle de la colonie angolaise, voilà des éléments si avancés que tous n’en seront pas familiers.


Terre lointaine est devenu un film lointain qui rate une vocation documentaire : ancré dans la crise économique brésilienne, dans sa langue, dans son thème graphique aussi bien que narratif ainsi que dans son austérité, il nécessite pas mal de contexte & dérive assez vite dans l’Atlantique qu’il se promettait de boucher, peut-être pour une des dernières fois, entre le Brésil & le Portugal.


Quantième Art

EowynCwper
4
Écrit par

Créée

le 18 nov. 2019

Critique lue 197 fois

2 j'aime

Eowyn Cwper

Écrit par

Critique lue 197 fois

2

Du même critique

Ne coupez pas !
EowynCwper
10

Du pur génie, un cours de cinéma drôle et magnifique

Quand on m’a contacté pour me proposer de voir le film en avant-première, je suis parti avec de gros préjugés : je ne suis pas un grand fan du cinéma japonais, et encore moins de films d’horreur. En...

le 25 oct. 2018

8 j'aime

Mélancolie ouvrière
EowynCwper
3

Le non-échec quand il est marqué du sceau de la télé

Si vous entendez dire qu'il y a Cluzet dans ce téléfilm, c'est vrai, mais attention, fiez-vous plutôt à l'affiche car son rôle n'est pas grand. L'œuvre est aussi modeste que son sujet ; Ledoyen porte...

le 25 août 2018

7 j'aime

3

La Forêt sombre
EowynCwper
3

Critique de La Forêt sombre par Eowyn Cwper

(Pour un maximum d'éléments de contexte, voyez ma critique du premier tome.) Liu Cixin signe une ouverture qui a du mal à renouer avec son style, ce qui est le premier signe avant-coureur d'une...

le 16 juil. 2018

7 j'aime

1