Et je termine mon marathon Spider-Man avec le dernier film en date que je considère mérité d’être visionné. Même réalisateur, mêmes acteurs, nouvelles recettes, nouveau costume. Sony Pictures mise gros sur ce film, très gros. Après le succès en demi-teinte du premier volet, qui avait généré près de 130 millions de dollars de moins que la conclusion de la trilogie de Raimi, les attentes sont grandes sur ce deuxième volet d’une, non seulement possible trilogie déjà annoncée, mais ce qui devrait aboutir en un Spider Universe.
Si Marc Webb semble toujours doué pour quelque chose : c’est l’installation progressive de la romance entre le héros et Gwen Stacy, portés respectivement par Andrew Garfield, fan du super-héros avant l’heure, et la merveilleuse Emma Stone, plus resplendissante que jamais dans sa chevelure blanche, tout droit tirée des comicbooks. Le film dépeint le tiraillement du héros, entre l’amour qu’il porte pour Gwen, et la promesse faite à son père, dans le premier volet, de rester loin d’elle pour lui éviter des dangers inévitables. Ce doute qui le suit, il sera transposé à l’écran de manière peu subtile, presque lourde, durant tout le film, par des apparitions fantômes du capitaine régulièrement, laissant constamment planer le doute sur le destin funeste de Gwen, quasi annoncé avant même la sortie du film.
Mais la romance fonctionne. Marc Webb sait y faire, sans doute de son expérience avec son premier film 500 Days of Summer. La romance sera au cœur même de cette nouvelle itération du héros qui commence à accumuler un certain nombre de films à son effigie. C’est dans la lignée directe des films de Raimi. Plus que des films de super-héros, ce sont des films qui se focalisent sur une histoire d’amour. Et celle-ci est parfaitement incarnée par les deux acteurs principaux dont l’alchimie crève l’écran, certainement car ils formaient un couple au moment du tournage. C’est réel, on y croit, et on suit avec intérêt l’évolution de leurs sentiments, qui font face aux obstacles inévitables de l’homme araignée, constamment alerte face à ses ennemis, et toujours dans la peur qu’ils s’attaquent à ses proches.
C’est là tout son conflit intérieur. Non sans raison puisqu’il résultera en la mort prévue, quasi annoncée, de son premier amour, retranscrite telle qu’elle avait bousculé le genre dans les comicbooks, signant la fin de l’âge d’argent des super-héros. Et le film reproduit le même schéma. Jusqu’alors, aucun personnage d’une telle importance n’avait marqué le genre par sa mort. Et la scène y conduisant est la seule scène d’action notable du film.
En effet, Marc Webb montre ses limites dans sa mise en scène de l’action. Il n’y a pas d’enjeu (si ce n’est la scène contre le goblin final), on ne ressent pas de tension lors des scènes contre Electro, dont l’interprétation par Jamie Foxx restera parfaitement oubliable, tout comme celle de Dane DeHaan, qui avait pourtant brillé dans Chronicle dans sa lente descente aux enfers. On a l’impression que Webb ne sait pas trop quoi faire de sa caméra. On est loin des plans longs, des sensations de vertige que procurait Sam Raimi. Non, Webb est bon dans la romance, mais se montre faiblard dans le reste.
Est-ce uniquement sa faute ? Est-ce réellement un film de Marc Webb ou un film de Sony ? En effet, il semble apparent que le studio a tout fait pour se rapprocher du standard à succès imposé par Marvel Studios. D’un film aux tons sombres et adultes (le premier volet), on passe à un film où Peter s’amuse systématiquement avec les vilains, détruisant au passage le peu d’enjeu qui pourrait découler de leurs confrontations. Mais outre les enjeux, c’est l’absence totale de motivation crédible des vilains qui saute aux yeux. L’un est invisible et en colère, l’autre est malade. Tout est expédié. Le réalisateur ne prend pas le temps de développer ses personnages.
Heureusement, on note quelques pépites musicales provenant tout droit de l’esprit de Hans Zimmer, accompagné cette fois par plusieurs musiciens dont Pharrell Williams. L’équipe réussit à nous offrir quelques bijoux pour accompagner les aventures du héros et les thèmes respectifs des vilains. Cela n’est pas sans déplaire tant les thèmes musicaux des films du genre sont oubliables depuis l’ère Marvel Studios, à l’exception de quelques adaptations.
Le film offre aussi quelques nouveautés bienvenues : Gwen n’est pas la demoiselle en détresse comme l’était systématiquement Mary-Jane Watson dans la trilogie de Raimi. Non, elle a son caractère et son courage et s’implique dans les combats auxquels se livre le super-héros. Elle le dit d’ailleurs : elle aime qu’il soit Spider-Man, mais elle aime Peter Parker encore plus. Et elle ne le laissera pas se livrer à des combats sans se battre avec lui. L’intention est louable mais met encore une fois la puce à l’oreille de son destin.
Et une seconde fois, Marc Webb saisit bien le personnage. Outre les touches d’humour incessantes et lourdesques – pour faire plaisir aux fans, Spidey est avant tout un héros et on le voit au secours des citoyens régulièrement, incarnant le friendly neighbourhood Spidey des comicbooks que l’on apprécie tant, et qui manque cruellement des films de super-héros modernes.
Une petite dernière note sur ce qui nous avait laissé sur notre faim dans le premier volet, l’histoire non racontée (placardée sur tous les posters du premier volet) avance enfin. On en apprend plus sur les origines du héros et sur ses parents, ce pour quoi ils ont du le laisser à son oncle et sa tante. Tante May avec qui il entretient une relation tantôt amusante, tantôt touchante. Les deux personnages s’aiment comme une mère et son fils, qu’elle tente de protéger des sombres secrets de son père.
On regrette la mort de Gwen et ses conséquences sur la vie de Peter, qu’on ne ressent pas réellement. Le tout est haché de multiples scènes autour d’Oscorp, avec pour objet d’annoncer une suite, alors qu’on aurait pu espérer plus de temps consacré à l’affect de Peter, dévasté par la mort de Gwen. Non, le film se termine sur un Peter écoutant finalement un discours de Gwen, regardant son costume, et repartant au combat contre, encore une fois – certainement de la volonté de Sony – s’attaquer à un super-vilain annonçant une suite et un univers Spider-Man. On aurait préféré un film se terminant de manière dramatique, pour repartir de plus belle dans un troisième volet dans lequel Peter se confronterait à ses démons, à sa peine.
Mais non, Sony continue son petit bout de chemin en introduisant Felicia Hardy (future Black Cat), le Rhino, un aperçu des armures des Sinister Six. Tout ça pour rien car le personnage subira un second reboot, aux commandes créatives de Marvel Studios, suite à un accord entre les deux studios, en raison de ce que Sony considérera comme un échec. The Amazing Spider-Man 2 n’aura non seulement pas dépassé les chiffres de son prédécesseur, mais sera un échec cuisant par rapport à son budget colossal de 230 millions de dollars (certains parlent de près de 400 millions en incluant les coûts de communication). Un score très faible et significatif de la qualité du film pour une adaptation du héros le plus rentable au monde.