Une rom-com teenage avec des cosplayeurs qui démontent New-York

Sympathique surprise, pour celui qui voulait voir autre chose en salle, mais a été trahi par son entourage/fils de chacal et ingénieusement manipulé jusque sur la borne UGC.


The Amazing Spider-Man avait tout pour inspirer la méfiance : un reboot de franchise moins de dix ans après le précédent reboot, sérieux les gars, on sait que l'argent c'est important, mais il y a des limites à la sodomie. Mais comme l'Homme est faible, on y était quand même allé, par curiosité, et le constat avait été sans appel : TASM souffrait indéniablement de la comparaison avec la (pourtant très imparfaite) trilogie de Raimi, essentiellement dans sa forme assez fade qui, par-dessus le marché, peinait à s'en distinguer (la caméra virevoltant mais en moins bien, et la bande-originale se ridiculisant face à celle d'Elfman...). Il y avait donc matière à s'inquiéter de ce second opus : soit son réalisateur allait enfin trouver ses repères, soit le cirque continuerait, avec un ou des "super-villains" plutôt mauvais comme c'est hélas la donne dans le cinéma hollywoodien (le gros lézard du premier opus constituant un remarquable exemple en la matière).


Il se trouve que le pire a été évité : Le Destin d'un Héros est supérieur au premier opus, qui était tout juste divertissant. Mais cela se permet d'aller encore un peu plus loin.


Bien sûr, Marc Webb livre de nouveau une réalisation inégale, alternant action affreusement brouillonne (l'ouverture avec une caméra parkinsonienne donnant l'impression d'un mini-tremblement de terre dans le jet privé) et filmage des plus solides (la première confrontation Spidey/Electro en plein Madison Square Garden), voire parfois brillant (le premier vol de Spidey entre les gratte-ciels). De la même façon, la bonne tenue de l'ensemble des effets spéciaux est par moments gâchée par des égarement en plastique (tout le Spidey en 3D du début, dont l'intégration dans le décor peine à illustrer les douze ans d'écart avec le premier Spiderman de Raimi). Enfin, la bande-originale confirme son statut de handicap majeur de la série (Hans Zimmer at his worst). Mais rien qui ne gâche fondamentalement le plaisir juvénile qu'inspire ce deuxième volet, sans vrai temps mort malgré sa durée étonnamment longue pour un blockbuster de franchise (2h20 !). The Amazing Spider-Man : Le Destin d'un Héros est de l'entertainment trois étoiles. Pas quatre, mais trois. C'est pas dégueu, trois. Y a le petit déj au lit et des toilette et salle de bain séparées.


D'abord parce que zéro lézard géant, ici, remplacé par un méchant un peu plus efficace (dans le sens qui en jette pas mal plutôt qu'absurde) ; ses motivations sont moins intéressantes que celles du Dr Connors/Lézard ("personne ne s'intéresse à moi... eh ben là, ils vont s'intéresser !!!!"), mais la psychologie cartoonesque d'un personnage de comic sera toujours moins importante que sa dégaine et sa direction. L'interprétation de Jamie Foxx, moins mauvaise que prévu, est tout à fait appropriée.
Ensuite parce que Webb, réalisateur de l'anti-comédie romantique (500) jours ensemble, est toujours aussi à l'aise dans l'idylle enthousiasmante : c'est teenage, mais ça a du chien, et l'alchimie électrique du couple Andrew Garfield/Emma Stone (également couple dans la vie) propulse chacune de leur scène dans le haut du panier de la romance comic. On est à mille lieues du couple que formaient dans la précédente trilogie Tobey Maguire et Kirsten Dunst, pas très à l'aise (Maguire étant sans doute plus convaincant dans un porno gay SM, dont il pourrait partager la vedette avec Elijah Wood, tiens ; le pire, c'est que l'idée plaira peut-être à certains d'entre vous qui se reconnaitront).
Porté essentiellement par les deux acteurs, l'humour bon enfant, encore plus prononcé que dans la précédente trilogie, fait mouche les 3/4 du temps, et garantit de fait au film une certaine tolérance du public dont il aura besoin en quelques endroits, quand son scénario partira un peu trop en chupa chups.


L'histoire ne casse pas trois pattes à un connard, ni sa narration sans surprise ne stimule les neurones, on est dans du prévisible justement prévisible, et de fait un peu triste - si l'on omet le choc de la fin pour ceux qui ignorent tout du comic. [Spoiler alert] À ce propos, si la mort de Gwen Stacy, virage habilement négocié et joliment filmé, parvient à émouvoir, il est dommage que le tandem Kurtzman/Orci+Pinkner l'aient placée dans la foulée d'un combat (le combat de trop, d'ailleurs) entre Spidey et un Bouffon Vert un peu bâclé (à ce sujet, chez Raimi, Osborne Sr était le Bouffon Vert, à présent, c'est Osborne Jr... dafuq ?). Par ailleurs, l'après-Gwen, un peu trop vite expédié (malgré une jolie séquence des saisons qui passent sur l'horizon du cimetière), blesse la mémoire de la scène tragique avec un épilogue actionneux aussi bourrin que bidon (Paul Giamatti... dafuq again ?).


(Nota bene : on aime bien la maison J.J. Abrams, hein (Kurtzman/Orci ont bossé sur Star Trek et MI3, en plus d'avoir créé la magnifique série Fringe, et Pinkner a bossé sur Alias et Lost). Mais ce serait bien qu'elle ne s'éparpille pas trop, réserve son énergie à des projets moins nombreux ; ça éviterait à Damon "Lost" Lindelof de commettre des Prometheus, par exemple... parce qu'encore un, et c'est le couloir de la mort, direct.)


Mais ça ne fait rien : on sait qu'on est en terrain balisé. Le très bon Spiderman 2 de Raimi, sombre comme beaucoup de deuxième volets et considéré par beaucoup comme le meilleur de la trilogie (mais pas par votre serviteur, énervé par la répétition du bad guy en figure paternelle avec d'abord Harry Osborne/Bouffon Vert, ensuite avec le Dr Octavius/Octopus), n'échappait pas lui non plus à certains clichés et figures narratives éculées. C'est du comic, les gars, pas du Fassbinder. L'ado-écorché-vif-qui-veut-bien-faire-mais-a-tellement-mal-à-son-petit-coeur-trahi-qu'il-va- devenir-super-evil, joué par un Dane Dehann conçu pour jouer ce type de rôle, produit son effet, mais obéit néanmoins du début à la fin aux canons du personnage. Aucune surprise. De la même manière, la partie "secrets du père à Spidey" laisse un peu froid (en gros, on s'en fout, et le transparent Campbell Scott n'arrange rien)... mais on n'attendait pas grand chose non plus. Du comic. Pas du Melville.


Alors maintenant, il y a comic et comic. C'est clair qu'avec TASMLDUH (hohoho), on est loin de Watchmen. Mais si tous les DC Comics montraient des flingages de vietnamiennes enceintes, ça finirait rapidement par saouler.


Bref. Contre toute attente, et quoi qu'en disent les critiques un peu dures (12/20 de moyenne), ce nouveau Spiderman 2 se regarde sans aucun déplaisir, tournant même, par instants, au plaisir "coupable", et évite l'écueil de la surenchère (Spiderman 3, Batman Forever, et de nombreuses autres suites où les scénaristes se sentent obligés d'agrandir la petite famille ; le Batman Returns de Burton étant un des rares contre-exemples), peut-être son meilleur argument, en plus d'Andrew Garfield et Emma Stone (y a-t-il sexiness plus adaptée à une bédé ? Ok, on n'oublie pas Alison Brie), suggérant qu'on a presque plus à faire à une comédie romantique pleine d'action qu'autre chose.

ScaarAlexander
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le 9 mai 2014

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Scaar_Alexander

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5

En fait un mec qui s'appelle Marc Webb, il est destiné à réaliser un film sur Spider-Man... Non ?...

Le nouveau Spider man, je l'attendais un peu. Parce que le précédent était une franche rigolade, et assez ringard comparé à la trilogie de Raimi (nous dirons d'ailleurs diptyque, le troisième film...

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