Un polar "mainland" stylé, mais un chouïa consensuel

Doté de réelles qualités visuelles et d’une mise en scène soignée, ce polar "mainland" est malheureusement trop tenu par un schéma narratif très/trop convenu auquel le réalisateur se raccroche en permanence tout en tentant de s’en départir en instaurant un climat de tension extrême un peu trop appuyé, qui finit par le desservir au fil de son évolution.


Derrière la caméra, l’illustre inconnu, tout du moins pour moi, Cao Bao-Ping, possède de véritables qualités de faiseur, et il parvient parfaitement à les mettre en œuvre dans quelques scènes nerveuses et particulièrement bien faites, dont deux poursuites magnifiquement filmées : l'une dans laquelle les protagonistes traquent leurs proies avec de l’eau jusqu’à la taille, et une autre absolument vertigineuse se déroulant au sommet d’un building dans laquelle ils flirtent dangereusement avec le vide. Cette dernière scène fait partie des plus grands moments de bravoure en termes de tension pure que j’ai pu voir sur un écran depuis belle lurette… ni plus, ni moins.


La distribution est plutôt de bonne facture, si l’on fait abstraction de l’unique personnage féminin important du film qui a tendance à en faire un peu trop – nulle misogynie de ma part, ça demeure un ressenti personnel – et tout ce beau monde est remarquablement dirigé par un réalisateur plutôt doué dans ce domaine.


Tout était rassemblé pour faire de ce polar une sorte de renouveau du genre, mixant parfaitement la maîtrise visuelle et la densité psychologique initiée par une interrogation sur les notions de bien et de mal et sur le poids de la culpabilité, mais la faiblesse du script vient entacher sa bonne progression et semble mettre son réalisateur dans un tel embarras, qu’il finit par totalement perdre le fil de son intrigue, jusque là plutôt bien tenu, dans un dernier tiers désespérant. C’est dommage. On passe franchement tout près d’une véritable perle du genre, qui aurait même pu en signer son renouveau, faute à certains partis pris très aléatoires et un switch final complètement bâclé.

Créée

le 25 janv. 2020

Critique lue 104 fois

2 j'aime

Critique lue 104 fois

2

Du même critique

L'assassin habite au 21
philippequevillart
8

Meurtre oblige

Première incursion de Clouzot dans un genre auquel il donna ses plus belles lettres de noblesse, en l’occurrence le thriller à la Hitchcock. Pour se faire il adopte un style emprunt à la Screwball...

le 21 avr. 2020

18 j'aime

8

Joker
philippequevillart
6

Autant de clown clinquant

C’est auréolé d’une récompense à la Mostra de Venise et d’une pluie de critiques dithyrambiques annonçant un classique instantané et une performance d’acteur de la part de Joaquin Phoenix emprunte...

le 9 oct. 2019

18 j'aime

5

La Chienne
philippequevillart
8

L'ange et la mort

Dans La Chienne, second film parlant de Jean Renoir, c’est surtout quand les voix se taisent et que l’image reprend naturellement ses droits que le lyrisme dramatique s’impose pour offrir de grands...

le 31 janv. 2023

18 j'aime

2