Pour célébrer la 5ème fois que je vois le film, mais aussi son numéro et sa place dans la chronologie de Kara no Kyoukai, je me lance dans l’écriture de cette critique. Il est clair que j’ai déjà une très grande affection pour ces films de Type-Moon, et que, même s’ils sont inconstants au niveau de la qualité, il y a toujours quelque chose à en tirer.
Tout d’abord c’est le premier KnK qui bénéficie d’une durée je dirais presque “suffisante“ avec toujours cet aspect de « trop vite » dans les films précédents. Ici pas de chichis, 1h 40 de film, ça se savoure. Il est à savoir que passer sur un autre format apporte du bon à Kara no Kyoukai. Le 2ème film était le plus long auparavant et avait l’honneur de nous présenter les personnages et de développer leur psychologie. Et bien ici c’est chose faite. Mais il y a bien plus car tout est parfaitement huilé, entre du fan-service de Shiki et Tôko à foison ainsi qu’une mise en scène remarquable et des idées géniales, le film devient excellent.

“Nous avons un pouvoir sur le normal mais Shiki est un dieu de la mort face au paranormal“

Spirale Contradictoire… C’est vrai qu’un nom comme ça tend déjà à une folie douce lorsque l’on voit des escaliers sans fond comme illustration dans le dvd. Pour l’histoire, le pitch c’est qu’un garçon, Enjô Tomoe, qui ressemble bizarrement à Emiya de Fate/Stay Night, tue ses parents puis s’enfuie de chez lui, mais le problème c’est que ses parents ne sont pas morts, il les croise dans la rue, les voit faire leur routine comme si de rien n'était. Pourtant toutes les nuits, Enjô fait le même rêve où il commet un parricide. Et le voilà qui rencontre Shiki qui accepte de l’héberger tant qu’il ne la gêne pas. Après les premières secondes un peu dérangeantes où on voit le gars ouvrir le ventre de sa mère et en sortir les trippes (tiens ça me rappelle un animé ça avec “School“ dans le titre…), on a le droit à une crevaison d’œil bien sanglant puis à un écrasement de tête contre un mur. Très glamour comme début m’enfin on n’a jamais demandé à ce que ça se fasse dans la dentelle. Et même, de mon point de vue, ce KnK est le plus violent parmi tous et ce par seulement pour le sang.
Déjà force est de constater que le scénario de ce film surclasse les autres. Il y a de nombreux retournements et une réflexion assez importante à mener pour comprendre. Il est impossible et je dis bien IMPOSSIBLE, de comprendre tout le film lors du premier visionnage. On perd à peu près un tiers de l’intérêt général et même après l’avoir regardé encore et encore on s’aperçoit qu’on a raté des détails, des clins d’œil. Après il y a aussi le déroulement en lui-même du scénario. On a l’impression de suivre une trame normale jusqu’à ce que des passages déjà-vus reviennent sous un autre point de vue. On comprend alors le mécanisme dont la clé et l’ouverture des portes sont les métaphores. Les scènes sont donc mises dans le désordre et même si on connait la présence du fil rouge, on ne comprend pas tout et on a même du mal à remettre tout en place dans sa tête. Pour ça il faut attendre la fin, et encore, pour avoir une vague idée du sens du film. Après cela se fait au cours des relectures répétées. Mais ce qu’il est intéressant de voir, c’est qu’on s’éloigne quand même d’un Suzumiya Haruhi qui cachait un scénario un peu faiblard dans cet espèce de tourbillon épisodique. Ici le spectateur n’est pas pris du tout pour un idiot, au contraire puisqu’il aura même à réfléchir une fois le film terminé. A savoir quand même que l’on apprend de nombreuses choses sur les magiciens, leur but, et leur passé, cela est tout aussi intéressant dans l'univers Type-Moon, dont la série fait partie, que dans l'univers de Kara no Kyoukai.

“Tu aurais déjà dû en être témoin“

Et oui cet épisode vous permet d’en apprendre bien plus sur Tôko, personnage emblématique de la série. Ignorant les blagues de Kokuto, surpris que cette dernière ait aussi été jeune, Tôko nous épargne cette fois-ci les blablas pseudo-psychologiques dont on avait l’habitude. Ou alors lorsqu’ils sont présents, ces moments se font assez peu remarquer et sont beaucoup moins barbants qu’auparavant car on a une véritable histoire.
On a notamment une réflexion avec le taiji, le yin et le yang ainsi que sur l’Origine des Hommes, le tout porté par des personnages suffisamment charismatiques pour soutenir toutes ces thèses. Le film nous propose enfin un antagoniste charismatique, enterrant Asagami Fujino du 3ème film. Ce méchant est une des principales forces du scénario, son but n'est pas de tuer sans raison mais bien de trouver une solution au problème auquel il fait face depuis longtemps. On arrive quand même facilement à comprendre la souffrance du personnage et pourquoi il fait ça, ce qui est assez rare. D’un autre côté, on a Cornelius Alba… Alors j’en ai vu des fous dans des animés mais lui, c’en est un pure-souche. On est loin des petits malades mentaux désirant tuer le gentil, lui il voue une haine sans pareille à Tôko et cherche à la tuer d’une façon ou d’une autre. Ses habits de magicien, sa voix, son chara-design et ses actions font vraiment de lui un fou à lier. Il n’aura malheureusement pas de moment de gloire à proprement parler mais sa simple présence suffira à foutre la nausée à certains. A l’opposé, on a Enjô Tomoe, le héros remplaçant de Shiki pendant un certain temps. L’histoire tourne principalement autour de lui mais c’est un poids un peu trop lourd. En effet, sa présence, bien qu’indispensable, permet juste à Shiki de placer 2-3 phrases bien senties mais sans ça, il est quand même assez transparent. Dommage car il avait sûrement de bonnes choses à dire/faire. Mikiya, quant à lui, est le personnage qu’on verra ou entendra le moins, pas grand-chose à dire à son sujet si ce n’est que sa relation avec Shiki s’approfondit peu à peu.
Par contre, pour tous les fans de Tôko et Shiki, attendez-vous à un fan service bien prononcé. Pour Shiki on avait l’habitude mais là c’est encore plus poussé et pour Tôko, Type-Moon s’est fait plaisir. J’affectionne beaucoup notre philosophe débutante donc je n’ai pu qu’apprécier ces passages où elle était magnifiquement mise en valeur, néanmoins ce ne sera pas au gout de tout le monde. A noter quand même qu’elle nous sort des phrases de haute volée et montre qu’elle en avait encore beaucoup à montrer la Tôko !

“Araya Sôren ! Si tu voulais enfermer Shiki, il fallait la mettre dans une boîte de béton !“

Pas mal de choses changent dans cet épisode et notamment les teintes de couleur utilisées. Alors qu’on a l’habitude de voir du bleu et du vert, ici on voit surtout des teintes chaudes et presque chatoyantes. On voit souvent la lumière du jour et le tout se relève beaucoup moins sombre que les épisodes précédents, ce que je trouve finalement paradoxal. Oui ils ont poussé le bouchon jusque là pour une métaphore où alors est-ce moi qui voit quelque chose qu’eux-mêmes n’auraient pas soupçonné ? Je ne sais pas je ne suis pas prof de français à inventer des trucs dans les bouquins pour passionner les élèves mais il faut reconnaître que l’aspect graphique et esthétique de ce film surclasse les autres par son côté parfois osé (les entrailles dans le bâtiment). Il est alors nécessaire de parler du chara-design toujours aussi mature. Les nouveaux personnages ne dérogent pas à la règle sauf Emiya qui se retrouve finalement vachement lisse face à un Araya bien marqué par les rides profondes dues à son grand âge. Le tout trouve finalement une bonne cohésion et un équilibre que lui envierait presque le deuxième film. Bien mis en valeur par la mise en scène intelligente, les décors sont souvent très détaillés et offrent de nombreux secrets qui ne se dévoileront qu’aux fils des relectures du film.
Parlons donc de la mise en scène que je trouve époustouflante. Déjà les scènes s’imbriquent les unes dans les autres avec agilité et les plans de caméra arrivent à montrer le maximum et le minimum, pour comprendre l’histoire. On a donc souvent des plans montrant les personnages fixes mais il n’y a alors aucune redondance ni aucun ennui. Le tout passe comme une lettre à la poste, montrant et remontrant des moments pour nous faire comprendre la chronologie de l’histoire et la parfaite cohésion. Alors après j’ai remarqué un petit côté « m’as-tu vu » pour montrer qu’ils savent parfaitement ce qu’ils faisaient, mais là je chipote. Autre chose en découle, l’animation des personnages. Bon on sait que Kara no Kyoukai, ça a toujours été un peu raide, mais là le film s’en sort parfaitement utilisant la caméra comme cache misère durant les combats. Les plans sont géniaux notamment au début de la bataille face à Araya. Alors oui, on remarque souvent que Shiki disparaît ou fait des choses tellement vite qu’on comprend que c’est animé sur 3 frames essayant de nous montrer quelque chose qui n’est pas, mais en même temps il y a un véritable effort et je n’arrive pas à pointer ça du doigt comme un reproche, ils utilisent parfaitement leur savoir faire pour éviter leurs propre défauts. Moi j’appelle ça être intelligent !

“Elle peut facilement détruire la barrière d’un espace parallèle !“

Ah, là je vais parler de mon aspect préféré des Kara no Kyoukai, la musique. Bon étant fan de Yuki Kajiura, je n’ai jamais été totalement objectif quant à son égard, néanmoins, force est de constater que cet épisode est le moins bon niveau musique. Après l’avoir revu avec un casque, on se rend compte tout de suite que la musique est bien plus présente mais sinon, sur sa télé, à moins de pousser le son à fond, on peut aller se faire voir. Très écoutable hors-contexte, la musique se relève pourtant être une petite perle d’ambiance comme ses ainés mais voilà… Elle n’est pas là. De plus on constate que Yuki Kajiura se repose beaucoup sur ses lauriers et ne fournit que très peu de nouvelles compositions intéressantes. Alors après il y a le passage du réveil qui est tout simplement génial niveau musique à la fin avec la bataille finale. Mais voilà, il faut attendre la fin du film pour savourer la bande son. Après, les fans retrouveront bien LA Yuki Kajiura, celle qui a composé pour Mai-Hime, Madlax, Madoka et pleins d’autres. Son style est toujours aussi prononcé et son amour pour les voix cristallines et les violons aigus se ressent toujours autant. On aura aussi plaisir à entendre les endings de Kalafina au fil des épisodes, mais on sent quand même que la corde musicale de Kara no Kyoukai commence à sévèrement être usée. Bon j’anticipe un peu, mais le 6ème film ne renouvèlera rien mis à part la musique : M15+16+17 et le fait que les compositions soient beaucoup plus joyeuses dans l’ensemble. Par contre le 7ème film offre bien plus de compositions mélancoliques avec de nouveaux accords vraiment superbes !

“Ca doit faire mal Araya. Ce bâtiment est ton corps et il se fait entailler !“

Et enfin dernier aspect important pour moi, les détails. Les détails foisonnants, partout. Là je viens de revoir le film pour la 5ème fois et j’ai encore remarqué des choses que je n’avais pas vues. Et c’est dingue qu’à ce niveau de relecture, l’animé arrive toujours à me surprendre. Il faut vraiment faire attention à tout, comme aux yeux qui regardent la première fois que l’on voit Cornelius, les écriteaux sur certains bus, les taiji cachés dans les yeux des animaux empaillés ou même dans la structure d’une scène. D’autres choses sont marrantes, comme quoi on ne voit plus Shiki à un moment malgré qu’elle soit là, ou encore des scènes différentes avec les mêmes paroles à la fin faisant croire que c’était la même que la scène précédente, l’horloge qui est la même que celle présente dans l’animé Shingetsutan Tsukihime, la présence des autres personnages qu’on n’attendait pas à certains moments, les clins d’œil disséminés un peu partout. D’ailleurs au début de la 3ème partie du film on voit un envol d’hirondelles… Ça ne rappellerait pas un certain opening de Fate Zero ça ? Enfin bref, il y a vraiment un jeu et une recherche assez exceptionnelle à ce niveau montrant toute la richesse du film. Et comme je le disais, ce n’est pas pour compenser l’absence quelconque d’un scénario mais pour le soutenir encore plus et montrer que ces gars-là ont du talent. On remarquera aussi que Tôko est blindée aux as avec 2 Aston Martin, une Harley avec side-car et une 200cc. Où va-t-elle chercher tout ce fric ? Ce sera aussi le seul KnK où vous verrez Shiki en colère à la fin. Si cela, ça ne vaut pas le coup d’œil !
D’ailleurs vite fait en remarque… Lors de la bataille finale, je croyais que le bâtiment faisait 10 étages pas 150…

“On se rencontre enfin… RYÔGI !“

Alors que dire de ce qui est et qui restera le meilleur des Kara no Kyoukai suivi de près par le 7 ? Et bien tout simplement que j’avais sous-estimé Type-Moon. Après un 4ème film plutôt faiblard, on se retrouve là face à une véritable perle. Alors que retenir de ce film ? Son histoire passionnante ? Son long format bénéfique ? Sa mise en scène léchée ? Bref je ne vais pas épiloguer, vous l’aurez compris, Kara no Kyoukai 5 : Spirale Contradictoire est un must-see qui mérite une place au panthéon des grands films d’animations. Compensant ses quelques faiblesses par d’énormes qualités, et montrant que la série en a encore sous le pied, Type-Moon réalise ici une véritable œuvre d’art.
Ray
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le 13 avr. 2014

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