Les vilains tours des propriétaires

Si "Don't Breathe" et les nombreux home invasion partant du même principe de l'arroseur arrosé nous ont bien appris une chose, c'est que tout jeune cambrioleur en herbe devrait un minimum vérifier le possible potentiel meurtrier de ses victimes avant de s'introduire dans leur maison. N'ayant pas suivi ce sage principe, la bande de petites frappes anglaises au coeur de "The Owners" va évidemment en faire les frais car le charmant couple de personnages âgées qu'elles viennent voler va leur réserver quelques mauvaises surprises...


Schématiquement, le premier long-métrage du français Julius Berg (réalisateur de séries comme "Mata-Hari" ou "La Forêt") va se découper en trois phases hélas très inégales niveau intérêt pour progressivement monter les curseurs de la folie de l'ensemble.


La première partie a beau rentrer dans le vif du sujet en nous présentant d'emblée les personnages dans l'action de leur cambriolage, elle sera la plus longue (près de la moitié de la durée totale) et la plus banale, se contentant de se reposer principalement sur les rapports internes de sa bande de voleurs bien trop caricaturale pour susciter un fort niveau d'empathie. Malgré le fait que ces héros de fortune s'inscrivent dans un cadre social à la fois un peu plus réaliste et léger qu'à l'accoutumée (une jeunesse anglaise en perte de repères et pas bien dégourdie), leur rapide caractérisation va vite se résumer à des traits caricaturaux : le meneur en manque de confiance, sa petite amie présente à l'insu de son plein gré, le dingue et le timide benêt. Avec des tempéraments aussi maladroits qu'opposés, la situation va bien entendu vite dégénérer entre eux et, si la lutte qui s'en suivra (avec l'arrivée du couple victime en cours de route) déclenchera quelques sourires, elle sera surtout cruellement basique et dépourvue de la moindre surprise pour peu que vous ayez au moins mis une fois les pieds dans une série B de ce type. Tout juste retiendra-t-on une générosité assez 80's sur les effets sanglants qui aura la bonne idée de ne plus quitter le long-métrage et correspondant plutôt bien à la tonalité absurde de sa bizarrerie ambiante.


Arrive alors une phase d'entre-deux un peu plus intéressante où le film va jouer sur le comportement très suspect des fameux propriétaires. En faisant monter la sauce autour de leurs étranges agissements, "The Owners" titille également nos attentes sur la révélation de leur véritable nature... et c'est là tout le problème car ce que le film nous laisse entrevoir dessus est encore une fois des plus classiques ! L'atmosphère a beau se crisper un peu plus autour des nouvelles victimes, le manque de consistance des motivations de leurs bourreaux pourtant de plus en plus hors de contrôle vient rendre vaines nos dernières espérances quant à une offre vraiment originale dans ce domaine. Ne comptez pas non plus sur les quelques développements plus étoffés entre les survivants pour vous surprendre outre mesure.


Heureusement, à vingt minutes du terme du film, "The Owners" prend une virage aussi inattendu que jouissif ! Julius Breg choisit en effet de transcender ses défaillances de fond en faisant littéralement exploser la folie de son couple à l'image. Étouffé par de soudaines barres noires d'un format 4/3, le spectateur se retrouve pris au piège d'une immense chasse (au parasite) où les frontières entre la raison et la démence se dissolvent d'elles-mêmes à l'écran avec la prestation dingue du tandem vétéran Sylvester McCoy/Rita Tushingham portée à son paroxysme. Même si les faiblesses scénaristiques se feront encore sentir (certain(e)s méritent vraiment leur sort), cet affrontement final ne cessera de multiplier les bonnes idées de mise en scène pour nous faire ressentir au plus près la survie tout autant physique que mentale de proies sous le joug de leurs prédateurs complètement déchaînés !


Bon, cette enthousiasmante envolée formelle de la dernière partie ne pourra sauver le manque d'idées neuves qui colle à la peau de ce "The Owners" pendant les trois-quarts de sa durée mais l'argument restera suffisamment solide dans nos esprits pour que l'on jette un œil de temps à autre à la suite de la carrière cinématographique de Julius Berg...

RedArrow
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le 6 sept. 2020

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