Voici Mary. Mary est une jeune étudiante un peu perturbée, aux nuits troublées par quelques crises de somnambulisme et cris perçants, au grand bonheur de sa famille. Elle est suivie par le psychiatre de l’école, à qui elle révèle sa fascination pour les films d’horreur, comparant la peur qu’elle recherche devant à un plaisir sexuel. Avec ses amies, elles vont voir le dernier film d’horreur à la mode, The Wisher, un grand succès partout où il passe, malgré ses qualités cinématographiques restreintes. C’est à partir de ce point précis que d’horribles événements vont arriver à ses proches, toujours en lien avec ses souhaits parfois inavoués, mais réalisés de manière macabre.

Mary devient-elle folle ? The Wisher s’est-il échappé de son film ? Est-ce que c’est une mauvaise blague ?

Fidèle aux dernières attentes du public post-Scream, le responsable se trouve parmi ses proches. La suspicion du petit ami potentiel ne peut que rappeler le film de Wes Craven. Une fois encore, il s’agit de la jeunesse qui s’en prend à la jeunesse, un portrait de l’adolescence en crise à la mode de ces années de slashers.

The Wisher n’est pas vraiment très entraînant, malgré l’expérience de son réalisateur canadien avec Christina’s House, qu’on aperçoit parmi les VHS de Mary. Hésitant entre thriller paranoïaque et slasher classique, il peine à provoquer l’effroi ou l’angoisse. Les hallucinations endormies de Mary gâchent les possibilités, « ouf c’était un rêve ». Le film abuse de quelques « bouh ! » un peu ridicules, comme (attention gros spoiler) ce chat qui gratte à la porte. Les quelques apparitions du croquemitaine en arrière-plan, dans la foule, dans un coin de fenêtre ou derrière un buisson ne font guère relever la tension, c’est plutôt le « Où est Charlie ? » du pauvre.

Utiliser le somnambulisme de Mary ou sa passion morbide pour les films d’horreur apparaît là aussi comme une facilité, pour jouer sur les différents niveaux de réalité, sur ce qui est imaginé de ce qui se passe. Avec l’hypothèse que Mary perde la tête, un classique du genre. L’adolescente peut ainsi continuer à ne pas être crue, malgré tous les indices de plus en plus incontestables autour d’elle. Liane Balaban dans ce rôle pas si facile est solide, découvrant un charisme certain, un regard perçant, une présence, à qui il sera demandé un jeu un peu plus subtil que crier devant la caméra. La réalisation de Gavin Wielding est d’ailleurs propre et efficace, sans grandes surprises mais fonctionnelle.

Ce qui est plus intéressant, au-delà des quelques qualités molles du film, c’est le discours qu’il offre sur le cinéma horrifique.

L’une de ses idées périphériques développées par Mary est le pouvoir d’attraction de ce genre de films mais aussi la malhonnêteté des personnes derrière, à travers l’exemple du film-dans-le-film « The Wisher ». Le film utilise le prétexte des images subliminales pour expliquer le succès du film d’horreur, une idée généralement casse-gueule mais ici employée pour exprimer la manipulation des grandes compagnies.

Du peu qu’il est vu du « faux film », avec son histoire de mécréant mystique échappé d’un arbre et qui exauce (mal) les vœux, difficile de déterminer quel film serait ainsi pointé du doigt, la catégorisation grossière des personnages étant de plus un trait récurrent de bien des films. Pourtant, s’il y a bien un film qui a attiré des millions de personnes et qui a causé des polémiques sur sa violence ou sur une appropriation par des jeunes dérangés, comme dans The Wisher, c’est bien Scream, même si le croquemitaine fait aussi penser à Freddy Krueger.

The Wisher semble donc accuser de tels films d’horreur, assez idiots mais bien vendus et assurément manipulateurs d’être responsable de comportements déviants de personnes qui ont décidé de passer à l’acte. La responsabilité de Mary qui dédaigne celui qui se cache sous le masque tout le long du film ne sera jamais évoquée, c’est une piste laissée là pour qui voudra la suivre, mais sans le même développement que les manipulations du studio derrière le film-dans-le-film The Wisher.

Assez curieusement, le film de Gavin Wielding semble donc accréditer les polémiques et attaques contre la mode des films d’horreur après le succès de Scream, accusant les spectateurs de les faire devenir violents ou de leur faire perdre la tête. Dommage que la réflexion ne soit pas engagée, que le discours soit approuvé ou contredit de manière plus claire. Ce qu’il reste du film, c’est une production ambiguë sur ses intentions et pas des plus passionnantes à visionner.


SimplySmackkk
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le 15 oct. 2022

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