Sujet racoleur pour film soporifique, cherchez l'erreur...

Il est toujours difficile de trouver une interprétation à un film où l'impact de l'image tente d'être plus important que les dialogues, où le suggestif est plus "fort" qu'une trame organisée et construite.

Une jeune femme coincée et propre sur elle va s'aventurer corps et âme dans le monde de la nuit.
Elle va rencontrer des hommes d'affaires généralement importants et tous plus barrés les uns que les autres. Marionette sexuelle, elle sera à la fois actrice et spectatrice de différentes humiliations aussi sordides que pathétiques.
Du pathos il y en a, de là à dire que ça pimente le film c'est déjà moins sûr. En revanche à travers leurs lubies sexuelles on observe un Japon en proie à la folie, où les valeurs morales volent en éclats car si le jour on imagine ces gens rangés sous la façade écrasante de la norme japonaise, la nuit, les conventions s'envolent bien loin de la stratosphère du raisonnable. Comme si la folie devenait la seule compensation possible à ce trop de raison.
Si le film ne tombe pas forcément dans l'imposture intellectuelle, il faut bien le concéder, on s'ennuie ferme. On est bien loin de la déchéance assumée, revendiquée et sans retour d'un Tinto Brass ( Caligula ), on est loin du regard virulent et désenchanté d'un Pier Paolo Pasolini.

Mon accusation première vis à vis de ce film, c'est que le film pourtant racoleur ne joue pas le jeu.
Rappelons nous quand même que comme beaucoup de pays où le puritanisme est roi, les déviances sexuelles y pullulent et le Japon en la matière, fait figure de bonne tête d'affiche... tout en tentant de choquer il reste justement puritain et fade. La pornographie n'y est que suggérée, les enjeux aussi et on passe son temps à se demander qu'elle est la quête de cette demoiselle semblant s'être égarée dans ces aventures d'un soir. Des tranches de vies qui malgré une surenchère d'attitudes plus que tendancieuses, laisseront la frustration pour dominante. Dommage qu'elle soit contagieuse pour le spectateur...

Si le film soulève quelques questions on en cherche pas forcément les réponses. Folie, aliénation, errance tout cela est abordé par le biais de la déviance sexuelle et des rencontres, où l'identité semble détruite jusqu'à en devenir presque animale, comme cette scène de la collègue prostituée qui traite son client de tortue ou bien encore le premier client qui demande à la protagoniste de se déplacer à quatre pattes comme une chienne quoi... .
Malheureusement ce côté ni fait ni à faire rend le visionnage pénible du début à la fin.

Vient une deuxième partie, peut être plus honnête, filmée de jour. Où l'on observe cette jeune femme déambulée dans les rues sans paroles, en état de choc. Retour à la réalité par une mise à jour de ses états d'âmes et aussi une mise à nue de ses émotions.
Rare scène d'émotion où assise sur le banc d'un square public, elle se fait accoster par une femme beaucoup plus âgée qu'elle et que la raison semble avoir désertée. Cette "amie" improbable qui l'empêchera la scène d'après, de se faire arrêter par la police sous les regards hautains et accusateurs des riverains dénués de compassion. Cette même femme, bien atypique, qui pour lui dire adieu, lui chantera une chanson pleine de grâce. Une grâce que l'on imagine volontier passée vu la " déraison" qui l'anime, une grâce qui est peut être également une mise en abîme de la recherche stérile de la jeune femme. Quoi qu'il en soit, la scène est franchement pleine d'émotion. Cette émotion qui par delà cette séquence manque cruellement à ce film en mal d'identité.
Dommage... car un film construit sous ce crédo aurait profondément gagné en énergie et en crédibilité.

Je vous laisserai juger par vous même, pour ma part je passe mon chemin sans trop le recommander.
AnimaMundi
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le 16 nov. 2012

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