Ton absence
5.7
Ton absence

Film de Daniele Luchetti (2014)

La vie de couple et de famille, puis l'art : trois ingrédients que Luchetti a forcés à se mélanger, faisant de son film une expérimentation.


En effet, l'art n'est pas ici qu'un thème, c'est un outil, et voilà bien l'intérêt de secouer l'éprouvette jusqu'à déranger les personnages : traversant une crise familiale, ils se tournent vers l'art sans le savoir, recherchant la grâce dans une situation conjugale qui n'en avait pas besoin.


« C'étaient des années heureuses, mais aucun d'entre nous ne le savait ». Le regret arrive un peu tard dans le cocon familial troublé, un peu malsain, où les enfants appellent leurs parents par leur prénom, comme des étrangers. Le père, artiste, cache ses liaisons, et la mère jalouse comble son vide intérieur par le sentiment coupable qu'elle achète l'affection de ses enfants.


On retrouve le côté politique de Luchetti dans la remise en question morale. Tour à tour infantilisé et adultifié, le spectateur ne sait plus quelle vision est la bonne, car l'art a contaminé toutes les valeurs que le film offrait seulement de dépeindre. À force de tout traduire en simili-art et de satisfaire des besoins imaginaires, Luchetti réalise étrangement sa propre critique – il nous demande pourquoi il a fait ce film, déplaçant l'inconfort : on n'est plus mis mal à l'aise par la famille mais par la raison de sa représentation.


Mais à force qu'il le fasse, on est aussi forcé à la contemplation de… rien. Il est facile de voir les humains de sa fiction comme des œuvres en cours de réalisation, mais on n'a pas la sensation de voyage qui devrait aller avec leur évolution. Au final, son ouvrage ne semble pas finie, comme une grosse boule lisse et conventionnelle dont la volonté d'avoir du sens a été aspirée par trop de paraboles.


Le film partait d'une bonne intention : glisser les conceptions les plus absconses du monde artistique au creux d'un drame classique, afin d'en faire le mouvement. Mais au final le « classique » l'emportera. Comme quoi, trop vouloir en faire, ce n'est pas qu'une erreur de jeunesse.


Quantième Art

EowynCwper
5
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le 29 juin 2020

Critique lue 181 fois

Eowyn Cwper

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TimFaitSonCiné
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