Vraiment pas tripette

Il était inutile de traduire Truth en français : ce film n'est pas pour nous.
Il n'est pleinement compréhensible que par des Américains. Pas tous les Américains, d'ailleurs, mais seulement ceux qui ont été initiés aux arcanes des grandes chaînes de télévision nord-américaines. Et qui se passionnent pour la politique US. Et qui connaissent le droit fédéral sur le bout des doigts. Et qui n'ignorent rien des modalités de la conscription dans l'état du Texas. Et qui suivaient de près l'actualité intérieure il y a 15 ans. Et qui regardaient le JT présenté par Dan Rather. Et... et je ne suis pas de ceux-là.
Quelle déception que ce film qui, traité différemment, aurait dû dresser les poils sur ma mâchoire et les neurones sous mon crâne !
Je vais être clair et net : je suis incapable de résumer la première demi-heure. En dépit (ou en raison) de la logorrhée des acteurs, je n'ai rien compris de ce qu'ils tentaient d'expliquer avec une verbosité démesurée. On aurait quand même pu leur remettre des feuilles de dialogue, à la place des brouillons gribouillés en écriture abrégée qu'ils ont dû lire par saccades accélérées.

Une fois mal passée cette première demi-heure, les acteurs ont droit à un débit plus modéré. Le calme ainsi revenu, on comprend que des mercenaires du scoop, recrutés façon 12 Salopards, s'en prennent au président des États-Unis. Mais les spin-doctors (experts en communication marketing) de la Maison Blanche ne laissent pas faire.

Allons-nous croiser les doigts pour que le journalisme d'investigation l'emporte sur l'odieuse pression de l'establishment ? Ben... franchement, moi, je n'ai pas pu. Certes, l'establishment m'inspire autant d'affinité que la bactérie de la peste bubonique ; mais je ne peux pas pour autant tresser des couronnes de laurier à des journalistes qui ont dérogé au plus important de leurs Commandements éthiques : bétonner l'information avant de la balancer à l'antenne.
Ah bon, ça ne se fait plus depuis quelques années ? Hé ! ne serait-ce pas un peu à cause de ça que le journalisme n'est plus trop crédible ces derniers temps ? Mais en 2004, époque du film, il était encore basique qu'un journaliste vérifie ses sources afin de garantir l'exactitude de l'information, puis les croise jusqu'à la rendre inattaquable. Et ça, nos Pieds Nickelés peu scrupuleux l'ont négligé. Je me demande comment le vrai Dan Rather, immense monument médiatique, s'est laissé embarquer dans une mésaventure people aussi naïvement fagotée.

Pour en revenir au film de 2016, j'ajoute que, non contents de dire des tas de choses qui ne font pas partie de ma compréhension européenne, les acteurs ne m'ont inspiré ni émotion ni distraction. Dans d'autres commentaires, j'ai lu qu'on les qualifiait de "transparents". J'ai trouvé l'appréciation flatteuse.

On aura depuis longtemps deviné mon opinion : Le Prix de la vérité ne vaut pas un ticket. Du moins dans les cinoches français