Mais où sont ces dinosaures promis sur l’affiche ?

Heureusement, une fois la connaissance acquise de ce genre de films d’aventure typiques des années 1950 avec leurs expéditions en terres oubliées, le spectateur sait que la rencontre sera parfois tardive, parfois mensongère.

Le tyrannosaure sur l’affiche de Lost Continent n’apparaissait pas sur la pellicule.

Et les créatures peintes sur l’affiche ne sont pas d'une très grande crédibilité.

Mais elles apparaissent, à 0h43, pour un film qui ne dure que 61 minutes.

L’amateur de gros sauriens pourrait en être déçu.

Mais assez curieusement le film aurait très bien pu exister sans cette dernière partie sur cette île peuplée de dinosaures et d’un gros volcan.

Il possède déjà un cadre assez particulier pour ce genre de films qui préfère confronter le monde moderne avec l’ancien, puisqu’il prend place en 1830 et en Australie. Un clipper américain est attaqué sur son trajet commercial par des pirates. Son propriétaire, Kirk Hamilton, blessé, est alors déposé dans une petite ville australienne où il doit se remettre sur pieds. Il y fait la rencontre d’Elaine, une des filles du juge local, mais elle est alors promise à Martin, le plus important propriétaire terrien de la région. Parallèlement, les autorités locales se réunissent pour contrer la menace des pirates aux alentours. Kirk propose alors d’importer une idée toute américaine et bien efficace, la création d’une milice locale. Mais entre-temps les pirates reviennent et pillent la ville, kidnappant Elaine et sa sœur. Après une bataille sanglante en mers, Kirk, Elaine, Martin et d’autres trouvent refuge sur une terre peut-être plus hostile que ces pirates.

Voici donc en quelques lignes les 3/4 du film résumés. De l’aventure et de l’action donc, que cela soit sur la mer ou la terre ferme, avec une bonne dose de mélodrame. Elaine va devoir choisir entre la sécurité et l’aventure, entre Martin et Kirk, dans un ménage à trois amoureux. Attention, c’est du sérieux, avec une voix off (Bill Shaw) qui n’est pas avare en adjectifs appuyés et en lyrisme. Certains dialogues, notamment sur la relation entre l’amour et le printemps, sentent l’eau de rose, ce qui change de la sueur attendue des explorateurs virils attendus, mais gare au ridicule.

Two Lost Worlds fonctionne pourtant grâce à ses personnages et leurs acteurs, suffisamment développés mais jamais approfondis. Il faut faire vite, chaque scène doit être efficace, et l’ensemble se tient malgré cette précipitation. Kirk Hamilton est l’aventurier assez classique, entreprenant et résilient, amoureux de la mer et d’Elaine, si celle-ci le souhaite. James Arness endosse avec facilité le rôle, lui qui ne s’était pas encore fait connaître avec la célèbre série Gunsmoke dont il sera le rôle principal pendant 20 ans. Bill Kennedy lui oppose un rival méfiant, froid, mais qui n’ira jamais en confrontation directe avec lui, se jaugeant mutuellement. Dans ce trio amoureux, la belle Kasey Rogers est peut-être un peu plus à la peine, avec ses expressions exagérées qui surjouent l’amour. Mais dans l’ensemble la distribution joue assez bien, surtout dans ce genre de films où on nous promet avant tout des dinosaures.

D’ailleurs Two Lost Worlds propose une pellicule à la réalisation assez soignée, signée Norman Dawn, considéré comme l’un des inventeurs du matte painting (et il y en a ici pour certains effets). Le réalisateur ayant signé plusieurs films mélodramatiques auparavant, il n’est donc pas étonnant d’y retrouver sa patte. Mais qu’il fasse un tel détour vers le film de série B, c’est une surprise à la vue de sa filmographie.

En tout cas le film propose des costumes d’époques, des décors reconstitués, il a une certaine allure. En dehors de quelques scènes en studio, on peut admirer aussi des plans en extérieur assez jolis, notamment avec la faune locale, dont des kangourous, et même quelques plans sous-marins qui semblent naturels, avec algues et poissons. La méfiance est de mise tout de même, car Two Lost Worlds est connu aussi pour reprendre des scènes d’autres films, notamment un impressionnant accostage explosif tiré de Capitaine Casse-cou (1940) et d’autres scènes de Tumak, fils de la jungle (1940). Les scènes avec les « dinosaures » sont assez naïves, puisqu’il s’agit d’un alligator à qui on a collé une crête ou de lézards incrustés sur des décors redimensionnés. La supercherie est assez évidente, mais ne jure pas trop. Par contre pour les besoins du tournage les animaux semblent avoir été maltraités, ce qui reste toujours un peu difficile à accepter de nos jours.

Il faut le savoir pour ces emprunts à d’autres films, car ce n’est pas forcément évident à constater, les coutures n’apparaissent pas. Two Lost Worlds emprunte donc de bonnes scènes sensationnelles qui n’ont pas vieilli, loin de là, sur un canevas sérieux tout de même bien mis en scène et bien joué, mêlant les deux avec un évident professionnalisme. Le film de Norman Dawn est donc surprenant, tel un film mélodramatique peut-être transformé en cours de production en série B. Et assez curieusement, cela n’en fait pas un mauvais film.


SimplySmackkk
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le 25 août 2023

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