Quand un triangle amoureux ne suffit pas

En 1950, le vétéran Inagaki (plus de vingt ans de carrière déjà) rejoint la Tōhō qui l'a attiré avec la promesse de pouvoir réaliser des films à gros budget. Ces Voyous dans un pays en guerre (traduction littérale de Sengoku Burai) n'est pas son premier avec le studio -- il a auparavant réalisé une trilogie sur le célèbre bretteur Sasaki Kojirō -- mais on sent déjà une plus grosse ambition.

Tiré d'un feuilleton de Yasushi Inoue publié initialement dans l'édition dominicale du Mainichi, le scénario est co-écrit par Inagaki et un certain Akira Kurosawa. La trame narrative, complexe, évoque par moments le Musashi d'Eiji Yoshikawa -- un grand succès populaire qu'Inagaki reprendra plus tard, avec ces personnages aux destins croisés qui parcourent un pays en guerre sans se défaire des relations amoureuses qui les lient.

Le film est servi par un casting quatre étoiles avec Toshirō Mifune et Rentarō Mikuni pour jouer les deux premiers rôles, et dans les seconds rôles des noms connus comme Takashi Shimura (qui tient son plus beau rôle dans Vivre la même année), l'éternel second rôle Eijirō Tōno ou le célèbre acteur de kabuki Danshirō Ichikawa III. Mais au-delà de ces acteurs masculins prestigieux, c'est ici Yoshiko "Shirley" Yamaguchi qui crève l'écran, par son personnage intense et audacieux et un regard absolument captivant. Inagaki offre à l'actrice un des premiers grands rôles féminins du cinéma japonais, dans la lignée des premiers rôles tenus par Setsuko Hara dans Je ne regrette rien de ma jeunesse (1946) ou par Isuzu Yamada dans le diptyque de Mizoguchi (L'Elégie d'Osaka, Les Sœurs de Gion, 1936).

L'histoire est un peu complexe, et comme si un triangle amoureux ne suffisait pas, le scénario en introduit un deuxième ! Malheureusement, la seule copie existante du film est d'assez mauvaise qualité et surtout a été amputée de 29 minutes, des coupes franches qui n'aident pas à saisir la complexité du contexte historique et l'évolution des deux antagonistes. Du côté des points négatifs on peut aussi signaler le jeu parfois daté des acteurs dans certaines scènes, très lourdauds dans leurs gestuelles.

Mais c'est un film qui mériterait une réédition dans une version complète et améliorée pour en admirer la pleine valeur.


Note finale : entre 6 et 7

Yushima
7
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le 7 janv. 2024

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