Mon scénario relève d'une histoire incroyable d'un assistant ingénieur du son qui a travaillé sur un documentaire sur les grottes très anciennes situées au Sud de l'Iran. Il s'est perdu dedans pendant 2 jours et quand il a réussi a enfin ressortir, il a raconté qui avait rencontré une étrange créature dans une crevasse qui lui avait appris l'Allemand,  On ne l'a pas cru jusqu'à ce qu'il récite des poèmes de HOLDERIN dans un allemand parfait."



Mani Haghighi nous sert une allégorie sur la vérité et l’imaginaire. Le metteur en scène iranien prend un malin plaisir à nous perdre, nous donne de fausses pistes et nous fait attendre ce qui ne vient pas. Récit fantasmagorique pour le moins fascinant dans sa construction.


Un bateau, un cimetière et une Impala orange pour tout bon détective qui se respecte, voilà un thriller, ponctué de mythologie et de superstitions, qui prend place dans un décor de western désertique et grandiose, de sable, de grottes et de montagnes aux multiples recoins qui servent à merveille le fantastique et la paranoïa, rappelant à la politique et à la dictature du pays, même si celles-ci restent en filigrane.
En 1965 au moment de l’assassinat du premier ministre, Hassan Ali Mansour, un agent de la police secrète du Savak, Babak Hafizi se rend sur l'île de Qeshm pour élucider la mort suspecte d’un dissident exilé près d’un cimetière hanté...objet de toutes les craintes. A chaque enterrement, une secousse sismique…Aidé de Charaki, un agent local peu engageant, il semble que bien des mystères existent et l’agent se heurte au silence. Il décide avec un géologue et un ingénieur du son de revenir et de rester sur place pour démêler le mythe de la réalité...Un certain nombre d’indices vont les mener à une enquête supplémentaire.


Entre temps, Mani Haghighi qui nous assure qu’il s’agit d’une histoire vraie, ancre son récit dans la réalité.
Le metteur en scène mène donc son enquête pour le tournage de son prochain film et tente d’élucider à l'aide de témoignages, la disparition de ces trois hommes, dans la vallée des étoiles...
Tout partira d’une photo trouvée dans un coffre par le cinéaste, qui recoupera les éléments et notamment ceux concernant l’ingénieur, qui travaillait au moment de sa disparition sur le tournage du film La Brique et le Miroir,  (tourné en 1965 par le grand-père du metteur en scène, Ebrâhime Golestan). Un hommage au cinéma dans le cinéma, références littéraires et poétiques, jouant sur les sons et la perception, point commun aux trois intrigues, que ce soit les enregistrements d’interrogatoires, études du sol et surtout étude du silence, cris nocturnes, en terminant par l’écoute d’une cassette étrange, l’histoire navigue du passé fictif au présent du (faux?) documentaire sur un ton surréaliste.
Intrigues multiples et mise en scène à tiroirs...
...La narration repart sur l’enquête du trio, croisée elle-même avec des interrogatoires inquiétants dont ils feront l’objet par le Savak, et laisse planer le Mystère...Malgré ce melting-pot, au fil de l’intrigue tout est suffisamment lisible pour se laisser guider par un cinéaste inspiré. Période hippie, ballons multicolores et sondes sismique, disparition, histoire d’amour, miracles linguistiques, bébé sauvé, sans oublier un chameau de l‘au-delà et un clin d’oeil à Zohak, monstre légendaire persan…


Les acteurs  Babak Hafizi (Amir Jadidi) Behnam le géologue (Homayoun Ghanizadeh) et Keyvan l’ingénieur son (Ehsan Goudarzi) sont excellents et fort bien choisis, les cadrages, le montage fluide, les prises de vues tant extérieures qu’intérieures sont réussis, la lumière, la photographie et la musique de Christophe Resai sont parfaites. S’ajoute une ambiance onirique et un bateau-maison, personnage à part entière, échoué tel un fantôme du passé accentuant la magie des lieux.
Même si le final, plus terre à terre, nous laisse sur un fantastique suggéré, comme lors d’un rêve où la réponse semble à portée mais s’évapore, l’ensemble sert finalement un polar d’espionnage parfois loufoque et une sorte de métaphore politique, de menaces invisibles et de mémoire historique, nous parlant de la conquête anglaise sur les portugais ou encore de l’organisation secrète hozvarech -politiques d’opposition-, et on peut être surpris de la manœuvre abrupte du cinéaste à nous balader entre les temporalités.


Mais l’essai particulièrement inventif et fantaisiste, se prête en tout cas aux envies de voyages et à la lecture aux bougies de Le pays du Non-où de Bahrâm Sâdeghi.


A découvrir.

limma
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Ces films étranges qui retiennent l'attention et Vous ne les avez pas vus...

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le 26 sept. 2017

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limma

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