Véronique et son cancre
6.4
Véronique et son cancre

Court-métrage de Éric Rohmer (1958)

En 1958, alors qu'il a déjà réalisé plusieurs courts-métrages, Eric Rohmer continue le développement de son oeuvre avec Véronique et son cancre, une œuvre minimaliste où l'intimisme rejoint le message contestataire, précurseur des années 60.

En 17 petites minutes, Rohmer met en scène Jean-Christophe, un élève plutôt fainéant, un cancre en sommes, qui va recevoir son premier cours avec son professeur particulier, la jeune et très jolie Véronique. La mère de Jean-Christophe prévient Véronique, elle ne doit pas hésiter à "être sévère, dure même, très dure". Rien de plus n'est dit sur cette situation. La classe de Jean-Christophe est inconnue (même si on peut penser qu'il doit avoir 11-12 ans), savoir si Véronique est sa première professeur particulière, ou même le métier de ses parents (même si au vu de ce qu'il raconte sur son père, sur la réaction de sa mère et sur le fait qu'il possède une femme de ménage, on peut penser qu'il est plutôt d'un milieu aisé).
On assiste alors au cours particulier de Véronique, cela en deux étapes. La première partie étant sur les mathématiques, plus particulièrement la division par des fractions et la seconde, après une ellipse temporelle, portant sur une rédaction en français. Une fois sa mère partie, Jean-Christophe parvient en quelques minutes à persuader Véronique de le laisser, après tout, l'heure est passé. Il l'expédie pratiquement dehors et retrouve rapidement sa liberté.

Le film, très court de ce fait, est cependant empli de petits messages très agréables et très intéressants.
Le cours de mathématique est l'occasion de nous montrer des brides d'une réflexion contre l'apprentissage ou plutôt sur l'apprentissage. Rohmer n'est évident pas contre la culture, mais comme tant d'autres avant lui il se questionne sur le mode d'apprentissage, sur la transmission de connaissance et sur les connaissances même. La seconde partie, sur la rédaction amène aussi cela. La question est posée "Comprendre/Apprendre l'un implique-t-il l'autre ? Les faut ils vraiment ?".
Rohmer institue aussi dans le film un côté séduction vite remarqué par le spectateur. Nicole Berger (âgée de tout juste 22 ans), très jolie en Véronique séduit le spectateur en même temps que le garçonnet. Celui-ci cependant possède une rhétorique puissante et parvient à manipuler la jeune femme. Là où l'on pourrait penser qu'une fois sa mère partie, l'enfant tenterait de séduire son enseignante, c'est tout le contraire. Le retour vers la liberté à la place d'un simulacre de sexualité est vite préféré par Jean-Christophe.
Clairement, nous voyons ici le plaisir des sous-entendus de Rohmer et des nombreuses pistes qu'il a glissé à travers son œuvre pour réfléchir par soi-même.

Comme souvent, il n'y a pas de pensée toute faite dans cet oeuvre de Rohmer, mais beaucoup de chemin de réflexion possible. Sur le travail, sur la sexualité, sur les femmes, sur les enfants, sur l'éducation, sur la liberté, sur la paresse. Rohmer, en 17 minutes, offre un beau monument aux courts métrages, le tout avec une belle maîtrise qui annonce ses débuts dans les longs métrages.
Cependant, ma note (6/10) tend à rappeler qu'il ne faut pas non plus exagérer la porté de cette oeuvre. Certes, des chemins existent, des pensées sont présentes, mais ce n'est pas aussi développé que ça le sera dans l'avenir. C'est cependant toujours un plaisir de voir un travail de Rohmer, qui plus est avec la jolie et regrettée Nicole Berger.
mavhoc
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le 30 oct. 2014

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mavhoc

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