Wounds
4.2
Wounds

Film de Babak Anvari (2019)

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Plaies ouvertes et métaphores bancales (spoilers de partout)

Après avoir regardé bon nombre de productions Netflix estampillées horreur tristement creuses (je pense notamment à l'affreuse et malhonnête série Chambers, l'insipide Dans les hautes herbes, ou le très récent Bloodride scandinave vaguement divertissant mais dénué de la moindre originalité) ou ratées malgré de bonnes intentions de départ (la française Marianne vraiment trop approximative sur tous les plans), je n'attendais, notes pourries à l'appui, pas grand chose de Wounds.


D'entrée de jeu, la vie modeste et un peu dissolue d'Armie Hammer est nimbée d'une atmosphère légèrement viciée: le rade pourri dans lequel il bosse, l'attitude fantomatique glaciale voire hostile de sa meuf, la relation ambiguë qu'il entretient avec Zazie Beetz, et l'instabilité palpable de ce vétéran complètement flingué... Composent avec une subtilité certes toute relative un tableau équivoque que j'ai trouvé efficace, et fait partir le film sur un bon pied.


L'élément déclencheur qui fait basculer tout ça est amené par un concours de circonstances écrit selon une logique assez solide : le perso d'Armie Hammer, en bon barman cool et insouciant, traverse cette existence un peu glauque dans un état de semi-ivresse constant, et laisse une bande de lycéens picoler dans son bar / le vétéran impulsif se trouve mêlé à une bagarre, au cours de laquelle il écope d'une plaie ouverte à la joue / la perspective d'une visite des flics fait décamper les jeunes qui, dans la commotion, "perdent" un iphone / le barman (bourré) ramène accidentellement le téléphone chez lui.
S'ensuit la mise en place d'un genre de malédiction ésotérique qui se transmet via ledit téléphone (clin d'oeil nostalgique aux années 2000), c'est un peu bancal mais mis en scène de manière plutôt habile: quelques fulgurances de gore numérique, racoleur juste ce qu'il faut, associées non sans audace à un rituel mystico-religieux visant la transcendance via les blessures ouvertes. Bon.
Le tout s'envenime à mesure que les relations déjà toxiques du barman, hanté par des fantasmes de têtes coupées et cédant complètement à son alcoolisme latent, explosent l'une après l'autre. C'est là que ça devient confus.


On n'arrive jamais vraiment à tirer au clair les différentes pistes esquissées par le réalisateur: la relation du couple et la duplicité potentielle du perso principal (une métaphore sur la confiance perdue, les relations gangrenées qu'on maintient en vie malgré tout?), l'infestation de vermines qui commence dès le début du film (une métaphore de l'addiction? Cette piste constitue un fil rouge assez clair, le personnage "contaminant" à peu près tous ceux qui l'entourent de son propre alcoolisme, et aurait mérité d'être mieux exploitée), le rôle du vétéran agonisant et de sa balafre infectée, l'implication du groupe d'adolescents dans toute l'affaire, cet oeil...?
Jusqu'à un final un peu grotesque en CGI moche, qui se pose comme un cheveu sur la soupe de toutes ces allégories avortées.


C'est dommage parce que les bonnes idées (visuelles et narratives) ne manquent pas, l'interprétation est correcte, mais comme souvent (toujours?) avec Netflix on sent que le tout à été ficelé à la hâte, laissant plein de brèches béantes dans un film qui a pourtant du potentiel.

EstherQuernai
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le 28 avr. 2020

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