Zombie Lover
4.3
Zombie Lover

Film de Deagol Brothers (2009)

Même si son titre français est moins subtil que « Make-Out with violence », il n’en reste pas moins surprenant, suscitant une certaine curiosité. Dans des années 2000-2010 un peu trop riches en zombies où le pire putride est la norme, rares sont les bons films à se démarquer. Et Zombie Lover le fait avec un éclat fascinant.


Car l’ambiance est poisseuse. Elle est malsaine. Et elle ne devrait pas. Car c’est l’été, les jumeaux Patrick et Carol Darling ont terminé le lycée, leurs amis aussi, Rody et Addy. Mais leur belle amie, la lumineuse Wendy a disparu.


Le deuil est difficile, même brutal pour certains. Et la vie continue, malgré tout, avec les maladresses de ses étudiants, aux amours fragiles, contrariés. Pour Patrick, c’est d’autant plus difficile pour lui qui était secrètement amoureux de Wendy, qui garde l’espoir qu’elle revienne pour lui déclarer sa flamme, et tant pis si elle en aimait un autre.


L’opportunité semble lui être offerte quand ils retrouvent Wendy dans la nature, un cadavre ambulant péniblement, un zombie presque inanimé. Carol et Patrick, aidé de leur petit frère Beetle, décident de la garder près d’eux, de la nourrir, de lui redonner sa vie. Mais la relation de Patrick avec elle devient de plus en plus toxique, nocive pour tous.


Zombie Lover ne cède pas aux habituelles facilités du film d’horreur. « Zombie Wendy » est quasiment amorphe, elle apparaît comme un pantin aux mains de Patrick et Carol. Mais ses quelques gestes, abrupts, cassés, rappellent ce qu’elle est, et un accident est vite arrivé. Pourtant, le sang et les tripes sont peu présents. L’angoisse est bien là, mais c’est un malaise, il se glisse dans les tripes, causé par le comportement de Patrick et de ce secret des Beetle si lourd à porter quand toute la communauté est encore sous le choc de la disparition de Wendy.


Peu bavard, le film explique peu, préférant offrir au spectateur son action, plutôt que de s’expliquer. Certaines interrogations resteront en l’état. S’il y a bien une voix off, c’est celle désabusée du jeune Beetle devant le comportement de ses grands frères et de ses aînés. Il est assez rare qu’un film proposant un zombie dans son histoire ne prenne pas son public pour des andouilles à qui il ne faut réserver que des sujets simples.


Zombie Lover est bien plus intelligent, bien plus audacieux, au risque peut-être d’être prétentieux. Le premier film des Deagol Brothers, à la production, au scénario et à la réalisation est un indépendant de la meilleure des espèces, un premier film qui ne cherche pas à singer Sam Raimi ou Wes Craven. Il cherche sa voie, et celle-ci est un risqué mélange entre le drame pour jeunes adultes et le film d’horreur, où on peut y déceler aussi les influences de Twin Peaks (Wendy remplaçant Laura Palmer, au centre de tout même sans être là) et celles d’American Graffiti, de ce dernier été d’une bande d’amis, ici crépusculaire.


Si la photographie est alors parfois un peu trop froide, elle ne l’est peut-être par hasard. Tout semble étudié, dans le moindre des cadres. La réalisation enveloppe cette histoire en la découpant par cases, par des plans rapprochés, en laissant à chaque scène se développer, vivre pour elle-même. Certains plans sont ainsi très beaux, mais la maladresse se devine ailleurs, dans des scènes plus communes, trop banales, ou parfois quand la recherche de la belle image se fait un peu trop visible.


Le soin apporté au projet se ressent aussi dans la direction d’acteurs, mais aussi une certaine inexpérience. Et pourtant le jeu gauche de certains comédiens se révèle assez troublant, car avec ses imperfections il fait ressentir le côté paumé de leurs rôles, des adolescents qui se questionnent, qui errent. C’est possible avec une réalisation calme, un film à l’atmosphère morbide, où les intériorités fragiles sont plus importantes que les cabotinages meurtriers. Mais d’autres acteurs sont encore plus bluffants, à l’image de Shellie Marie Shartzer qui incarne Wendy, Wendy la vivante, la radieuse, ou Wendy la morte, l’amorphe.


Pourtant récompensé par de nombreux prix dans les festivals où il a participé, Zombie Lover écope pourtant de notes assez mitigées sur ce bon vieux Internet, si facilement un peu méchant. Sa proposition ne laisse pas froid, c’est évident, mais il serait dommage de bouder un tel film assez original, loin des attentes. La prise de risques est à saluer, mais pas seulement car Zombie Lover est une perle, aux qualités évidentes, un rappel de cette adolescence contrariée, des espoirs déçus, mais aussi une histoire d’amour morbide et malsaine, développée avec un sens de la réserve bienvenu.

SimplySmackkk
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le 25 févr. 2022

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