Il y a des soirées qui commencent bien:
restaurant au cadre magnifique, la carte promet des plats raffinés et l'atmosphère est à son diapason.
La promesse de moments à venir mémorables.

Puis les choses se gâtent peu à peu: le vin à la robe si élégante est bouchonné, la nourriture trop cuite et le serveur plutôt désagréable.

C'est un peu ça l'effet Assassin's Creed 3: des promesses sur le long terme qui ne sont pas tenues.

Paradoxe quand tu nous tiens, c'est le prologue qui annonçait un ciel vidéoludique sans nuages.
Rythmé, prenant et audacieux (et ce malgré quelques bugs cosmétiques habituels dans ce type de jeu), tout démarre sous les meilleurs hospices. Les choses commencent sérieusement à se gâter lorsque Connor finit par enfiler son costume d'assassin.

Alors certes, c'est joliment emballé, le moteur Anvil Next fait merveilleusement bien son office sur des visages magnifiquement détaillés et des décors superbes poussant à l'exploration. Nous avons même droit à des conditions météorologiques très réussies et variées et des changements de saison convaincants. Notamment la saison d'hiver, bluffante de réalisme ou chaque pas dans la neige marque son empreinte et influe sur la gestuelle du héros. On ne nous avait pas menti: Assassin's Creed 3 a de la gueule.

Mais comment un jeu aussi ambitieux, véritable figure de proue d'Ubisoft a pu passer le contrôle qualité?
Serait-ce le budget marketing qui a fait fondre le confort des développeurs comme neige au soleil?
Autant de bugs est impardonnable pour un jeu de cette trempe.

PNJ qui disparaissent devant vous, réactions absurdes et incohérentes, des scripts de dialogues ou d'animations qui tournent en boucle, des objets en lévitation, chevauchements de polygones, clones d'individus superposés et j'en passe. Leurs interventions sont fréquentes et il va falloir faire avec jusqu'au prochain patch. L'immersion en prend un sacré coup. Même Skyrim n'a pas été capable de nous en gratifier autant en permanence.

Et, plus gênant, ils ne sont pas que cosmétiques. Ils peuvent influer directement sur le plaisir de jeu et la façon dont il faudra l'appréhender.

L'IA est souvent défaillante et a de la peine à faire correctement son travail, la rendant imprévisible dans le mauvais sens du terme.
Entre des soldats capables de vous flairer des kilomètres à la ronde, ceux qui restent pantois alors que vous venez de commettre une infraction juste devant eux, d'autres qui se jettent dans le vide sans raison ou le zèle de certains qui continuent de vous poursuivre alors que vous venez de sortir de la zone rouge.
Il y a de quoi en perdre son latin et transforme chaque missions en un véritable festival absurde qui vire parfois au comique. (Il faut voir des soldats vous repérer, puis une fois planqué dans une meule de foin située droit devant eux vous oublier aussitôt).
Malheureusement, il peut survenir un autre bug bien plus dérangeant: le freeze. En effet, soyez avertis que lors d'un loading, le jeu peu brusquement s'arrêter et vous forcer à redémarrer votre console. Sans parler des changements de saisons qui plantent, vous faisant passer de l'été à l'hiver puis retour en été une fois franchit une nouvelle zone. De quoi instaurer un climat de paranoïa autour du bon déroulement de l'intrigue. Destabilisant.

Mais les choses ne s'arrêtent pas là: il y a aussi de gros soucis de game design couplé à un manque de finition pénible.
Il n'est pas rare - surtout lors des moments de stress - de voir Connor se percher sur un tonneau alors que vous passiez en trombe juste à côté, la garde à vos trousses.
Ou lors d'une course-poursuite effrénée dans les rues de Boston, voir notre saillant assassin plonger dans un tas de foin situé juste à côté de lui. Le temps d'en sortir et que l'animation scriptée fasse son office, votre cible aura disparue dans la nature. Donc, malheur au joueur téméraire qui effleure d'un peu trop près certains éléments (trop) interactifs du décor.
Rageant et frustrant.

En résumé, lorsque les passages deviennent trop étroits, il faut faire preuve d'une grande vigilance pour ne pas voir notre bel amérindien dans le feu de l'action s'accrocher bêtement à quelques chose.

Le seul endroit où ce gameplay trop ou peu précis (allez savoir!) devient à peu près agréable, c'est dans la Frontière.
Proprement magnifique, cet environnement sauvage est l'occasion de laisser exprimer l'acrobate qui sommeil en vous. Grimper d'arbre en arbre est un vrai régal, une sensation de liberté bienvenue ou l'immensité de l'environnement à la structure ouverte atténue grandement les soucis de gameplay.
Les bugs continuent cependant d'affluer, notamment lorsque l'on éperonne son fidèle destrier. Ces imbéciles de canassons ont une fâcheuse tendance à se bloquer un peu partout et il devient fortement déconseillé de choisir des chemins de traverses. Restez sagement sur les chemins balisés si vous ne voulez pas piquer des crises de nerfs à répétitions.

Seules les batailles navales semblent avoir bénéficié d'un soin tout particulier. Superbes, la promesse est cette fois-ci tenue, que ce soit visuellement ou en terme de plaisir de jeu. Il faut voir votre fabuleux trois-mâts fendre des vagues immenses en pleine tempête, à la poursuite d'un galion dissident. Les combats rythmés par les coups de canons sont intenses et immersifs.
Ne boudez pas votre plaisir une fois qu'une mission navale se présente à vous, foncez matelot!

En ce qui concerne la partie scénarisée du jeu, là encore, c'est un peu des promesses à moitié tenues. Démarrant sur les chapeaux de roues avec un étonnant retour de situation à l'appui, le prologue tient une fois de plus en haleine. Les différents protagonistes sont attachants et la mise en scène ainsi que les dialogues très convaincants.
Les cinématiques sont nombreuses et fort bien travaillées. Dommage cependant qu'elles soient continuellement ponctuées d'horribles screen blanc de loading qui cassent tout sentiment d'immersion. Ubisoft à voulu en mettre jusqu'à la gueule, et ce sont nos pauvres consoles au hardware asthmatique qui en font les frais. Mais surtout, quelle idée saugrenue d'avoir fait ces screens de loading en blanc, une véritable agression pour la rétine.
Autre souci et non des moindres, des bugs qui interviennent directement dans la narration. Il peut arriver que le jeu vous fasse faire un bond dans le temps, vous faisant perdre un pan de votre aventure. Notamment lors de l'une des premières mission sur New York, donc soyez vigilants.
Dommage puisque l'histoire est plutôt réussie.

Concernant l'interface même du jeu, là aussi, cet assassin souffle le chaud et le froid aux rythmes des saisons. Très réussie par moments, elle peut devenir vite envahissante.
Quelle idée saugrenue d'avoir mis la roue de raccourcis en plein écran! Dans certains moments chauds cela peut être même handicapant, puisque cela vous fait perdre tous repères une fois celle-ci disparue. La carte est aussi relativement peu claire (notamment celle de la Frontière) la faute à une esthétique qui prend le pas sur la lisibilité.
Il faut également s'armer de courage pour décrypter toute la partie liée au commerce, inutilement tarabiscotée et sacrifiée sur l'autel de l'esthétisme tape-à-l'oeil.
Autrement le reste est au poil et certaines choses ont été améliorées en terme de lisibilité comme le HUD, plus rapidement consultable et assez discret.

En conclusion, Assassin's Creed 3 est un repas copieux et généreux mais faisant de l'esbroufe dans sa présentation. Une fois quitté la table on se sent le ventre lourd, la faute à des ingrédients trop épicés et d'autres pas assez cuits.
En ce qui me concerne, la sauce n'a pas pris et je m'interroge sur la complaisance générale dont le jeu a bénéficié auprès des joueurs et de la presse spécialisée.
JulienNicaud
5
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le 19 nov. 2012

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JulienNicaud

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