Darksiders est le premier jeu de Vigil Games, studio de jeu fondé par le dessinateur de comics Joe Madureira. Mais Darksiders, c'est aussi un jeu qui n'a pas eu de chance : édité par un THQ qui commençait à sentir la fin, la promotion n'a pas été à la hauteur de son potentiel et de ses ambitions. Les conséquences furent assez funestes : après un démarrage catastrophique, pratiquement sans promotion, le jeu n'a rencontré son public que sur le tard, trop tard pour en faire autre chose qu'un succès critique. J'ai personnellement acquis le jeu environ 3 mois après sa sortie pour à peine 10 euros, somme ridicule totalement disproportionnée par rapport aux grandes qualités de ce titre.
Résumer Darksiders s'apparente à un exercice d'équilibriste. Très grossièrement, c'est un jeu d'aventure-action en monde ouvert dans un setting fantasy à inspiration biblique. Le héros du premier épisode n'est autre que War, un des quatre cavaliers de l'apocalypse, dont le rôle est de réguler la lutte entre les enfers et les cieux quand l'apocalypse signera la fin de l'humanité. Au début du jeu, War se retrouve sur terre alors que la lutte semble avoir commencé. Seulement voila, il y a comme un problème : il se retrouve seul, alors que ses frères (Death, Strife et Fury) devraient normalement être là. War ne va pas tarder à réaliser qu'il a été victime d'un complot, et le jeu narre sa rédemption et sa quête de vérité.
Malheureusement, cette quête est racontée à travers des cinématiques plutôt mal fichues et pas très claires. C'est un des rares défauts du jeu, car le reste est vraiment à la hauteur. Dans la forme, Darksiders ressemble à un mélange entre Zelda (pour la dimension exploration / évolution du personnage) et God of War (pour le système de combat). Et ce mélange, aussi hasardeux qu'il puisse paraître, fonctionne pourtant parfaitement et offre de longues heures de jeu : une quinzaine en se contentant de tracer en ligne droite, beaucoup plus pour faire le jeu à 100%. Comme dans Zelda, le monde est gigantesque et plein de recoins et de trésors cachés pour qui veut aller les chercher. il est structuré en zones ayant chacune son Donjon, son objet spécial et son boss. Rien d'original, mais le level design est équilibré et bien pensé, rendant la progression tout à fait agréable. Comme dans God of War, le système de combat, dynamique et varié, permet d'alterner les combos et les armes de manières très fluide. Une bonne maitrise en sera indispensable face aux vagues incessantes d'ennemis. Les points d'orgue de cette face action sont sans doute les mémorables combats contre les boss, épiques et retords à souhait. Finalement, seule la face RPG/customisation du personnage semble un peu en retrait, les améliorations proposées étant un peu anecdotiques.
Pour parachever encore ce constat déjà flatteur, la direction artistique est très nettement au dessus de la moyenne, Madureira oblige. L'esthétique comics, classieuse et grotesque à la fois, est on ne peut plus adaptée au contexte. Dommage, comme précisé plus haut, que l'histoire soit un peu difficile à suivre. Un tour sur Wikipédia (ou sur le wiki dédié à l'univers Darksiders) s'impose pour en maitriser les tenants et les aboutissants. Car oui, même dans son scénario riche et dense en personnages et en intrigues, Darksiders est vraiment généreux avec ses joueurs.
Cette générosité a malheureusement été boudée par le public qui, la faute à un plan com un peu défaillant, n'était probablement pas au courant qu'un jeu aussi soigné lui tendait les bras. Mais le temps aidant, Darksiders a fini par acquérir un noyau dur de fans, dévoués corps et âmes, qui ont obtenu une suite sortie en 2012 et qui militent désormais pour finir la saga malgré la mort de THQ et Vigil Games. Après moult péripéties (la franchise était la seule à ne pas avoir été rachetée après le dépeçage de THQ), les droits de Darksiders sont donc désormais dans les mains de Nordic Games, qui a promis quelque chose sous peu. Problème, la majorité de l'effectif de Vigil Games travaille maintenant ailleurs, et Joe Mad est parti vers d'autres horizons. Souhaitons donc que la nouvelle équipe en charge de la suite soit aussi talentueuse que l'ancienne...