Tous les roguelike sont confrontés à une épineuse question, du fait du concept même de roguelike. Comment mettre en place une narration dans une boucle de gameplay ?
Certains évitent la question, tandis que d'autres trouvent des astuces pour justifier le recommencement, la seule réelle intrigue demeurant à la fin, lorsque l'on brise (ou non) le cycle. Par exemple Rogue Legacy qui nous fait incarner les descendant d'une lignée l'un après l'autre en n'ayant de réelle révélation qu'au boss de fin de cycle.
D'autres encore tentent de justifier les résurrections successives du même personnage et le fonctionnement de cet univers fermé (ex: Dead Cells).
Mais de manière générale, on n'a jamais réellement de progression cyclique, on n'apprend que par des easter eggs révélés avec parcimonie le lore du monde dont on essaie de s'échapper.
C'est de cet écueil narratif qu'Hades a essayé de s'extirper, avec brio, tirant inspiration de jeux plus scriptés (le côté procédural du roguelike complique les choses) jouant sur les boucles temporelles, notamment polars.
Le principe est simple, notre héros est le prince des enfers, bien décider à s'évader du domaine de papounet. La rivière Styx, qui emporte les défunts aux enfers, est une fort bonne justifications aux résurrections permanente de notre dieu de protagoniste, immortel/déjà mort, ce qui justifie en soit la boucle en elle-même (d'autres bonnes justifications sont apportées pour le recommencement une fois la tâche accomplie, et même une fois la première fin du jeu atteinte). Une vraie histoire est à dérouler, d'abord jusqu'à la sortie, puisque le joueur découvre de nouvelles choses à chaque interaction avec les PNJ du hub central, ou avec les Olympiens qui lui apportent leur aide, puis à chaque run réussie, où il découvre peu à peu la véritable intrigue derrière sa situation.
Cette intrigue est d'ailleurs très réussie, puisque je me suis trouvé investi dans l'histoire, avec une réelle envie d'arriver à la prochaine fin, et réellement frustré lors d'échecs.
Les personnages en eux-mêmes sont vraiment intéressant, ce qui est nécessaire pour garder le joueur intéressé afin qu'il continue à interagir avec eux à chaque boucle. Les affinités qui se forment avec le protagoniste, les relations que l'on découvre entre personnages, tout est travaillé avec soin.
Côté gameplay, on a un roguelike relativement classique, chaque salle permet d'obtenir un Bienfait de l'un des Olympiens, permettant d'améliorer une des capacités. Chaque Olympien a ses spécialités (Athena a un réflecteur, Dyonisos empoisonne, Aphrodite affaiblit, Demeter gèle, etc), et des combos existent par paire, débloquant un Bienfait spécial si certains prérequis sont atteints.
Cela offre une bonne diversité dans les builds possibles, et des combos potentiellement dévastateurs.
Combinés aux 6 armes possibles (et leurs formes alternatives), l'ennui de la routine est assez facile à éviter. Les pénalités de difficulté que l'on s'inflige une fois la fin atteinte pour la première fois permettent également de rajouter des challenges particulier, et même d'affronter une version sous stéroïdes de chaque boss.
Graphiquement c'est impeccable, les effets visuels sont clairement identifiables (évidemment certaines salles chargées peuvent provoquer un écran plein de lumières dans tous les sens, à la Dead Cells, mais le style plus simple du décor et les codes très marqués de chaque élément évite que l'on soit perdu). Le design sonore est également au poil, et je suis encore hanté par le chant d'Eurydice.
Un vrai excellent jeu à recommander à tous, et qui de mon expérience arrive même à séduire les réfractaires du genre. Foncez-y !