Aussi étrange que cela puisse paraître si l’on se focalise sur l’aspect exterieur du jeu, j’abordais la majorité des niveaux d’Hotline Miami comme celui d’un jeu d’infiltration, observation des rondes, destruction des crânes un par un, improvisation brutale lorsque un plan finement préparé tombait en miette car ce dernier avait omis le sale trou du cul planqué dans les chiottes (ce qui, soyons honnête, arrive toujours). Une approche en préparation et en étape par étape en grande partie permise pas un level design étriqué qui misait sur la multiplicité de petites pièces dans un niveau général assez modeste dans sa taille et sa population.
Si cette précision est nécessaire, c’est évidement parce que je fais partie des « hardcore intégristes fans du premier forcement déçu de la suite par pur aveuglement ». Ce level design... sérieusement qui a eu l’idée de multiplier les niveaux immenses et remplis d’espaces vides qui étaient déjà relous dans le premier ? Et puisque ça ne suffisait pas pourquoi ne pas remplir ces même niveaux de vitres, après tout clamser une fois sur deux à cause d’un ennemi hors champs, c’est évidement ce qu’il y a de plus plaisant dans la franchise. Le gros souci c’est que ce genre de niveaux sont à mon sens assez inadaptés au gameplay hotline.
Car d’une part ils cassent l’équilibre cac/jet/arme à feu, parce qu’évidemment, je vais taper le cent mètre à découvert avec mon club de golf en priant pour que l’ia d’en face disjoncte et oublie d’envoyer une délicieuse rafale de plomb rencontrer mes tripes. Et histoire d’enfoncer le clou à la batte le nombre d’ennemis a été bien multiplié, donc n'hésites pas à lancer ton arme pour étourdir un ennemi, deux de ses copains équipés de shotguns t'attendent à la finition.
Et d’autre part ces niveaux obligent à abuser de la vue éloignée qui excentre complètement le personnage et fait perdre en visibilité proche, un minimum nécessaire pour jouer de la couverture et de l’esquive (vue qui provoque également de brusques mouvements de caméras assez désagréables).
On se retrouve donc à leurrer les ennemis et exploiter leur comportement « je t’entends ou je te vois et j’arrive » vers un spot safe et les dessouder par paquet, évidement un PGM du combo clavier/souris viendra surement me contredire, mais j’ai régulièrement eu le sentiment que c’était la méthode quasi obligatoire de réussir certaines sections.
Alors comme je le disais ce genre de structure n’était pas absente du premier, mais elle était tellement moins prépondérantes. De quelque chose comme le sixième des niveaux on passe à deux tiers. Evidement il n’y a pas que du noir qui ressort de ce choix, ce second épisode propose ainsi un sentiment d’anxiété face à l’inconnu plutôt absent du premier, où il était globalement possible d’avoir toujours un coup d’avance, un aspect inattendu qui renforce encore l'intensité des parties ; mais ça reste accessoire face à ce qu’on perd en subtilité et en justice dans l’échec comme dans la réussite. Finalement cet ensemble de choix, ce n’est à mon sens ni encourager le skill ni la réflexion, mais la campe et l’exploitation du ia toujours aussi conne (et buggé, là pour le coup la similarité avec l'original est totale), face à une difficulté rehaussée de manière artificielle ; et pourvu que la chance soit dans les parages.
Heureusement par son statut de suite, ce second Hotline apporte également son lot d’améliorations, à commencer par la narration. Honnêtement même si je l'ai suivie d'un oeil peu attentionné, l'effort fait sur la non linéarité des événements et la structure autour de différents protagonistes est à souligner ; notamment le côté comique à travers le gameplay du fait de nous faire incarner un perso, peut être pas non violent, mais au moins un peu plus mesuré que les autres. En revanche cette multiplicité d'intervenants appauvrit sévèrement le système de personnalisation par les masques : cinq "spécialités" maximum proposées par niveau, quand certains avatars n'en sont pas complètement dépourvus, sachant que les nouveaux masques ne sont pas spécialement folichon (mention spéciale pour le cygne et son second personnage au pathfinding complètement naze).
Level up côté enrobage également, toujours du pixel art criard et halluciné monstrueusement généreux dans les explosions de sang et d'organes ; mais dans des intérieurs plus variés et fourmillant encore plus de détails, auquel on ajoute désormais des sorties à l'air libre dans des atmosphères paradisiaques complètement dans le ton. Une volonté d'imposer une ambiance forte jusque dans l'écran de pause façon VHS grésillente.
Quant à la bande son, à la fois terriblement marquante et porteuse de l'expérience intense du premier ; si elle ne l'enterre pas côté qualité l'égale au moins dans ses vertues hypnotiques et propose imo plus de variété : toujours du syntwave orgasmique et de l'électro ultra péchue mais avec une place plus grande offerte à de l'atmosphèrique plus doux, trip hop-esque, à la limite de l'angoissant parfois. Une diversité permise par la démesure (on y revient): plus du double du nombre de pistes de l'ost du premier, à te faire maudire les possesseurs de l'édition collector (même si elle ne contient "qu'une" trentaine d'entre elles sur vinyles)...
Voila Hotline Miami 2 c'est une suite dans la continuité et le polissage en ce qui concerne la forme mais dont la nouvelle philosophie de jeu m'a régulièrement exaspérée, car elle me fait bien plus rager contre le dit jeu que contre la médiocrité de ma réflexion ou de mon exécution.
Pas pour moi, même si la flamme de la passion brûle encore dans l'attente des pépites tordues permises par l'éditeur de niveaux.