Après des années passées sous le sable fin des nostalgiques et de ceux qui ont grandi (ou non) avec lui, Mad Max est revenu. D’abord en gros cylindres avec Fury Road, l’excellent quatrième volet du papa de la série, George Miller. Quand vient l’adaptation vidéoludique en cette rentrée 2015, on est méfiants. Pourtant, l’avantage de la circonspection réside dans sa capacité à surprendre.


Mad_Max jaquette
Voilà une tradition qui n’est pas nouvelle. Depuis les anciens temps d’E.T. de Spielberg, les très grosses productions se sont toujours accompagnées de leur homologue interactif. Avec souvent et malheureusement à la clef, des résultats peu probants. C’est qu’un jeu vidéo de commande, au même titre que les films ou les ouvrages littéraires, transpire rarement la confiance. La faute aux productions qui y voient souvent une manne financière plus qu’un titre artistique. La faute aux exécutants, parfois peu motivés et fréquemment contraints.


On imagine bien comment la Warner, maison productrice du film et détenteur des droits du plus célèbre des dérangés australiens a pu bondir sur le dossier de marché d’Avalanche Studios. Les développeurs des Just Cause, renommés pour leur monde ouvert gigantesque, sont tout indiqués pour reproduire la sensation d’immensité du désert aride. On suit alors Max dans ce prélude du dernier opus, pour un premier dernier ride.



FUEL FOR LIFE



Tout se passait pourtant si bien. A bord de son fidèle « Magnum Opus », son bolide chromé, blindé, au V8 rutilant, Max arpente les routes comme il racle sa gorge. Sec. Sauf qu’à l’instar du film Mad Max Fury Road, le destin en veut autrement. Mis à terre, sa belle est morte, réduite en poussière et éparpillée aux quatre coins de l’anti-monde. Une peine presque plus grande que celle de la désolation de ce monde, d’une famille qui n’est plus qu’un lointain souvenir. Qu’importe, Max aime repartir de zéro. Après avoir fait la rencontre de Chumbucket, un mécano bossu apôtre de la déification métallurgique et mécanique, il s’en va en quête de reconstruction personnelle et matérielle.


Une réinvention de soi qui possède son lot d’obstacles. Outre un environnement aussi accueillant que Joey Starr un samedi matin d’hiver, les dunes grouillent de war boys, ces soldats décérébrés à la solde de la violence même. Ou plus précisément, de Scrotus, le seigneur de guerre terrorisant son petit monde. Voici notre ennemi public numéro un. Mais avant de pouvoir saigner le Sheitan, il faut se coltiner les sept niveaux de l’enfer. Les terres désolées sont jonchées de camps, de forteresses, de tours macabres, de snipers à abattre. Et bien sûr, de milliers de petites frappes pas fâchées de pouvoir vous mettre un ou deux taquets derrière les oreilles. Au fil de ses aventures, Max rencontre d’autres illuminés, comme lui, chefs de forteresse rebelles où les survivants font traîner leur mort entre deux tempêtes.



THEY SEE ME ROLLIN’



Le premier constat est graphique. C’est le plus immédiat, et pour peu qu’on ait peu suivi les vidéos de gameplay et les différentes bande-annonces diffusées par la Warner, c’est le plus surprenant. Mad Max se révèle aussi beau que fluide, dans toute la variété de ses environnements, indifféremment des dunes, des lacs de sels, des épaves et des canyons. Le jour, la chaleur écrasante suit le contraste exagéré de Fury Road. La nuit, le gris-bleu prend le relais et transforme le tout en mer immense. Le genre de jeu où on gravit une montagne juste pour voir le lever de soleil. Si, promis.


Mad Max n’est pas un jeu de course. Que les sceptiques et les phobiques soient immédiatement rassurés. Certes, la Magnum Opus à reconstruire de rien prend une place prépondérante dans le scénario autant que dans le gameplay du jeu. Pour autant, le bolide est davantage à considérer comme un personnage à part entière que comme un simple moyen de transport à chromer. C’est que là, dehors, des convois ennemis sont prêts à en découdre avec vous, à coups de fusils, d’abordages sauvages, et de plaquages de tôle. Avalanche a porté un soin tout particulier à la conduite des véhicules, jamais trop arcade mais toutefois accessible. Une fois lancé sur les pistes, il faut du sang froid et une bonne gestion du frein à main et du rétroviseur pour venir à bout des poursuivants lancés à vos trousses. On aime tout particulièrement les affrontements lors des tempêtes procédurales, aux effets de particules absolument démentes, avec détonations, éclairs et gravité aléatoire. Le tout, sans chute de framerate, s’il vous plaît.


Toutefois, notre bon vieux Max en a sous la calandre, même hors de sa chérie. Une fois le pied posé à terre, il faut parcourir différents objectifs en forme de missions aux déroulements différents. Après avoir détruit au harpon les différentes tourelles qui rappellent un peu trop le joug des agresseurs du petit-peuple, il faut s’attaquer aux bastions ennemis. Si le système de repérage à la Far Cry est clairement raté, la faute à un gameplay infiltration complètement absent (dommage…), une fois à l’intérieur, Mad Max fait la part-belle aux pains. Signature de chez Warner, le jeu emprunte le système de combat à deux boutons de la série des Arkham. Un choix complètement légitimé par des combos forcément ultra-violents et des finitions dignes de la WWE, par moments. S’il ne brille pas par sa profondeur, le système a le mérite d’être efficace et de récompenser le sang-froid plutôt que l’acharnement. Certains camps se ponctuent par un affrontement de boss. Sans charismes et beaucoup trop faciles, ils ne font, eux, clairement pas l’intérêt du jeu.



PIMP MY RIDE



Mad Max est efficace et beau, certes. Au détriment toutefois de la profondeur scénaristique. Les missions de l’histoire manquent clairement d’inspiration, peinent à éveiller un quelconque sursaut d’empathie chez le joueur. A vrai dire, difficile de composer avec un héros à la limite de l’autisme, au passé volontairement flou. L’objectif final est seulement de forme, pour un fond dispensable et dispensé, d’ailleurs. De même, si les missions secondaires et le nettoyage général sont plaisantes un temps, elles tournent rapidement en rond. Elles deviennent une histoire d’envies subites de violence plutôt qu’une longue et sinueuse chorégraphie. Pourquoi pas.


Dans Mad Max, on prendra clairement plus de plaisir à équiper sa voiture d’un nitro de dernière génération, d’un V8 « Big Boss » et de jantes à pointe, de caler des peintures de guerre sur la trogne de Max et de l’équiper d’un gros blouson de biker pour encaisser les coups. Toutes ces modifications s’achètent grâce à la ferraille, la monnaie du jeu, qu’on ramasse à tours de croix un peu partout. Le tout est couplé à un système de niveau qu’on incrémente non pas en martelant le crâne d’ennemis, mais en effectuant des défis de plus en plus ardus. La qualité plutôt que la quantité, donc, pour venir faire briller Max aussi fort qu’autrefois.


Il manque à ce Mad Max le soupçon de mythologie et de charisme qui fait la légende du film. Pour autant, ranger le vengeur cinglé au rayon des adaptations sans saveurs est une grave erreur. Tirant le meilleur parti des consoles next gen et défouloir diablement efficace si tant est qu’on le joue par pulsion, le titre d’Avalanches Studios fait figure de révélation surprise de la rentrée. Et nous gratifie au passage d’un nouveau diction : un mirage n’est pas forcément une désillusion.


Publié sur Hypesoul.com

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le 17 nov. 2015

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