Découvrir un nouveau Zelda est toujours une expérience unique, surtout quand il a fallu attendre 7 ans pour avoir le droit de mettre la main dessus. Les mauvaises langues diront que la série n’évolue plus depuis son titre phare, Ocarina of Time, mais on ne saurait leur donner raison : comment nier l’originalité folle d’un Majora’s Mask, d’un Wind Waker, ou même de Skyward Sword ? Certes la formule reste la même, un héros, une épée, des donjons… Mais les mécaniques du jeu, l’ambiance, Nintendo a toujours su les réinventer. Breath of the Wild est toutefois une réponse aux détracteurs : oui, il est possible de sortir complètement une série des carcans habituels inhérents à son genre. Reste à savoir si l’originalité suffit à faire un bon jeu.
A moins que vous ne soyez un vieux blasé du jeu vidéo, les premières heures de Breath of the Wild ne peuvent que susciter un émerveillement constant, tant le monde qui s’offre au joueur dès la fin du tutoriel est riche de possibilités. On explore pendant des heures une sorte de vaste terrain de jeu, la simple découverte des nouvelles mécaniques de gameplay et des lois de la physique a de quoi divertir le joueur sans même qu’il ait à se préoccuper de la quête principale. Nintendo a su piquer chez la concurrence le meilleur de l’open-world, pour former un tout cohérent jouissif et captivant. La sensation de liberté qui en découle est bluffante, aucune limite ne semble être posée, tout parait possible. On va de surprises en surprises : le royaume d’Hyrule est en constant changement, et les choix du joueur peuvent transformer le monde selon sa volonté, pour peu qu’il en comprenne les lois.
Passé l’émerveillement (qui dure heureusement de nombreuses heures), le jeu semble toutefois un peu tourner en rond. D’abord parce que la difficulté est décroissante : les gigantesques ennemis invincibles que rencontrait le joueur au début sont de plus en plus faciles à abattre, et ils ne sont pas remplacés par de plus puissants. Sans dire que l’on en vient à s’ennuyer, le jeu n’est plus autant stimulant. Les simulacres de donjons qu’on nous propose sont certes très ingénieux, mais ils ne sont pas aussi riches qu’on pourrait l’espérer d’un Zelda, et ils manquent d’une véritable identité, d’une plus grande diversité. Le jeu s’essouffle progressivement sur la fin et manque de rejouabilité, puisque l’essentiel du plaisir se trouvait dans la découverte. La fin du scénario est aussi assez décevante, comme si les développeurs n’avaient pas su trouver d’autres ressorts que la surprise pour plaire. Les combats deviennent rapidement répétitifs, car la puissance des ennemis se mesure surtout à leur nombre de PV, beaucoup plus qu’à l’inventivité qu’il faudrait déployer pour trouver leur point faible, comme dans les anciens Zelda.
Cet épisode n’en reste pas moins extraordinaire, car il inflige au joueur et à la concurrence une leçon de jeu vidéo. Un an après, il faut se rendre à l’évidence : Breath of the Wild a redéfinit les critères selon lesquels on juge un triple A. Il nous a rappelé qu’un jeu vidéo doit avant tout être ludique, et non cinématographique, car le scénario n’est jamais raconté à un spectateur passif, il est au contraire construit par les actions du joueur, chacun aura une expérience de jeu différente. En cela, on est bien en face d’une excellente synthèse de ce qui se fait de mieux dans le jeu vidéo actuellement, qu’il sera difficile d’égaler à l’avenir, car ce qu’on espère après avoir exploré le jeu de fond en comble, c’est qu’on retrouvera un jour le même plaisir de la découverte, dans un jeu encore plus abouti. En bref : vivement le prochain Zelda.