The Witcher 2. Un jeu à vous faire aimer le kapusniak.

Il y a quelques années, si un petit malin m'avait dit que je jouerai à un jeu vidéo polonais, je lui aurais probablement répondu "Mais bien sûr. Et je conduirai une Lada en mangeant des blinis, aussi, ce sera super."
Si en plus il m'avait dit que je trouverai ce jeu excellent, j'aurais sûrement appelé Edgar Hoover pour qu'il renvoie ce séditieux communiste dans son pays.
Mais voilà, le monde a changé et, je dois bien l'avouer, pour moi LE jeu de cette année 2011 pourtant bien fournie est polonais. Le bougre s'appelle The Witcher 2.

J'avais joué au premier opus, adaptation d'une série de romans écrite par un certain Andrzej Sapkowski - dont le nom est une bénédiction pour tout joueur de Scrabble qui se respecte - et j'avais bien aimé. Essentiellement parce qu'on pouvait collectionner des cartes avec des filles dénudées. Mais aussi parce qu'il proposait un univers fantastique original.
On y suit Geralt of Rivia, un chasseur de monstres professionnel qui essaie de faire tranquillement son travail sans trop s'embourber dans les intrigues du royaume. Car en plus des querelles politiques humaines, voilà t-y pas que les elfes et les nains se rebellent sous prétexte qu'on les parque dans des ghettos et qu'on les traite comme de la merde. Geralt évolue dans un beau bordel, donc.

Dans ce volet, vous êtes encore plus dans la mouise car l'un de vos collègues witcher s'est mis en tête d'assassiner toutes les têtes couronnées des alentours, et de vous faire porter le chapeau par la même occasion.

Avec The Witcher 2, la première claque est technique. Graphiquement, le jeu est simplement magnifique : des textures riches, des couleurs qui réussissent à rendre un look gritty avec autre chose qu'une palette de bruns et une utilisation habile du motion-blur. Le sound-design n'est pas en reste. L'immersion sonore est totale - mention spéciale à l'acte d'introduction et son siège de château assourdissant - et le doublage anglais est excellent.

Mais là où The Witcher 2 frappe fort, c'est au niveau de la narration. En proposant un univers en demi-teintes, déjà. Ici, personne n'est vraiment bon ou méchant : il y a toujours une seconde couche, une raison qui remet en question le jugement du joueur en donnant de la finesse aux personnages. On se retrouve bien souvent à se faire des réflexions du genre "Ok, ce type est un gros bâtard... Mais en même temps il fait ça pour protéger sa ville, c'est vrai que les autres sont pas super sympa non plus... Mais fichtre, c'est quand même un sacré bâtard, est-ce que je dois vraiment l'aider ?". Une épaisseur bienvenue dans un milieu où la caricature est de mise, et qui contribue à un petit miracle vidéo-ludique : impliquer le joueur. Et réussir à impliquer un gars qui a pour habitude de sauver l'univers tout en mangeant de la pizza froide, c'est quand même un sacré tour de force.
Et comme chaque choix a une influence importante sur la storyline, le dilemme est encore plus grand. On est loin ici de ces jeux où "impact narratif" signifie "si vous tuez son chien, ce marchand ne voudra plus vous parler". Il s'agit là de pans entiers de contenus qui seront ou non accessibles. Toute la différence est là. Plutôt que de se dire "C'est bon, de toute façon les devs ne vont pas me laisser passer à côté de leur travail aussi facilement", le joueur fini par se rendre compte que, sans jamais être bons ou mauvais, ses choix vont avoir un impact énorme sur son expérience de jeu.

Ajoutez à cela un gameplay agréable avec son lot de bonnes petites idées, des DLC gratuits et plus intéressants que la moyenne, un peu de nudité féminine et vous obtenez l'un des jeux les plus savoureux de ces dix dernières années.

Bien sûr, le jeu n'est pas sans défaut. L'histoire me paraît difficile à saisir pour qui n'a pas joué au volet précédent. L'introduction inquiète par sa difficulté un peu frustrante pour un début de partie. La gestion de l'inventaire n'est pas vraiment glorieuse, et les contrats de witcher (petites quêtes annexes durant lesquelles vous faites ENFIN votre job) auraient pu être un peu mieux intégrés.
Aussi, que les inconditionnels d'univers ouverts où on peut voler des voitures et aller aux putes passent leur chemin. Même si vous pouvez aussi aller aux putes, on est plus proche ici du film interactif que du grand bac à sable.


En fait, The Witcher 2 se consomme comme une bonne série télé. On suit l'histoire avec avidité, on s'attache aux personnages, on s'émeut de la cause libertaire des non-humains, on s'indigne de leurs méthodes. Et quand on veut recommencer le jeu pour voir ce qu'on a manqué, on se surprend de la difficulté à prendre un chemin qui va à l'encontre de nos convictions.

Incontestablement, The Witcher 2 est un chef-d'oeuvre de narration rare, et un jeu vidéo comme on aimerait en voir plus souvent.
VikingJojo
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le 15 nov. 2011

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VikingJojo

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