Valkyrie Profile: Lenneth par Guigz94

Je viens de terminer il y a quelques jours le premier opus de la saga, Valkyrie Profile : Lenneth, sur PSP.

Commencé il y a près de deux ans et régulièrement abandonné faute de temps, je pense bien avoir trouvé le RPG qui m'aura donné le plus de sensations depuis ces 5 dernières années.

Aussi, pour rendre justice et hommage à ce jeu dont on ne parle pas assez sur ce forum, en voici une petite présentation détaillée.

Longtemps attendu sur le territoire européen, Valkyrie Profile est sorti en 1999 sur PS1 au Japon. Il aura fallu patienter pas moins de 7 ans pour voir un remake arriver sur la console portable de Sony.

Pour l'occasion, l'introduction animée qu'on peut voir ici a été complétement remaniée par des images de synthèse qui collent on ne peut mieux à l'atmosphère adulte et mélancolique du jeu, même si l'aspect trailer de film s'en trouve renforcé par la même occasion (la nouvelle intro est visible ici).

L'histoire de Valkyrie Profile : Lenneth est plus complexe que la plupart des J-RPG traditionnels. Le cadre choisi pour l'aventure est la mythologie nordique, que je trouve de manière générale peu abordée dans le jeu vidéo de fantasy, alors que nombre des ses légendes à caractère épique se prêtent pourtant très bien au genre.
Le joueur incarne incarne Lenneth Valkyrie, Déesse réveillée par Odin et Freya pour recruter les humains tombés au combat, les entraîner et les envoyer au Valhalla afin que ceux-ci puissent combattre lors du Ragnarok qui s'annonce imminent.

Le cadre de l'histoire est ici posé et par là même ce qui fait la structure principale du jeu. L'aventure est déclinée en 8 chapitres de 24 phases chacune. Chaque phase est en réalité un coût que vous dépensez lorsque vous entrez dans un donjon, une ville, ou que vous cherchez un Einherjar (un humain mourant que vous pourrez recruter). Ces actions que vous effectuez vous coûtent un ou deux points à chaque fois et au bout de 24 phases "dépensées" vous passez au chapitre suivant.

Durant chaque chapitre, vous êtes tenu d'envoyer au moins un ou deux Einherjar au Valhalla en faisant attention à ce qu'ils correspondent bien aux critères demandés à chaque début de nouveau chapitre. Freya peut par exemple au chapitre deux vous demander de lui envoyer un archer disposant de certaines compétences précises. Plus vous respectez ces demandes à la lettre, plus vous êtes récompensés en objet et expérience, ce qui facilite quelque peu la suite de votre périple.

Relativement linéaires, les chapitres se décomposent généralement de la même manière, vous recrutez quelques Einherjar, puis vous trouvez un nouveau donjon rempli d'ennemi qui s'achève par un boss que vous devez achever pour récupérer de nouveaux artéfacts qui seront utiles lors du Ragnarök.

Un scénario à nul autre pareil

Ce qui fait la force de Valkyrie Profile : Lenneth, c'est l'attention accordée à son scénario et à ses sous-intrigues que composent les multiples Einherjar que vous allez recruter. Chacun possède une destinée tragique (en général ils ne meurent pas de vieillesse) qui nous est relatée avec force dialogues déchirants et doublages somptueux.
Ce qui pourrait facilement passer pour un ralentissement de l'intrigue principal se révèle en réalité le coeur du jeu. Le joueur se retrouve ainsi plongé dans un univers profondément mélancolique, ou tragédie et fatalité se mêlent pour clairement remettre en question (même si cela reste sous-entendu) le droit des dieux à manipuler les destinées humaines.
Car la force du titre de Tri-Ace se trouve également là, Valkyrie Profile : Lenneth parvient sans accroche à prendre ses libertés avec le cadre de la mythologie nordique, sans que cela en paraisse pour autant incongru. Parvenant par là-même à se procurer une identité propre qui réussit l'exploit de conserver l'esprit froid et et désespéré du matériau d'origine (surtout au moment du Ragnarök), tout en y ajoutant une touche RPG traditionnelle avec la quête de l'identité cachée, des relations entre les personnages faites d'amour, haine et de manipulation en tout genre.

L'une des autres grande force scénaristique de Valkyrie Profile consiste en sa propre limite imposée de la vision de son intrigue. On suit l'histoire principale du point de vue de la Valkyrie Lenneth, qui vient de se réveiller d'un sommeil plus ou moins long. On ne sais absolument pas ce qu'elle a vécu ou fait auparavant, si même elle a déjà eu une vie, rien. Cet aspect fermé qui cantonne l'histoire à un seul point de vue autorise donc des découvertes et révélations qui sont disséminées au fur et à mesure de la progression du jeu. Le joueur va donc, en même temps que l'héroïne qu'il contrôle dans le jeu, découvrir petit à petit la véritable histoire de Lenneth et faire ainsi évoluer sa vision des protagonistes qui l'entourent.

Une système de combat immersif

L'autre grand point fort de Valkyrie Profile : Lenneth réside dans son système de combat pensé pour être à la fois très dynamique sans négliger pour autant l'aspect tactique.
Visibles dans les lieux que vous parcourez, les combats contre les ennemis se font au tour par tour. Mais à la différence d'un Final Fantasy "à l'ancienne" (entendre : pas le XII ni le XIII donc), chacun de vos personnages est assigné à un bouton de la console et possède une action prédéfinie qu'il réalisera au moment ou vous serez autorisé à appuyer sur ledit bouton (entre une et trois fois par personnage, selon l'arme que vous choisirez et si vous êtes plutôt guerrier ou magicien). À chaque fois qu'un de vos personnages réussit un coup sur un adversaire, une jauge (allant de 0 à 100) se remplit. Si la jauge atteint 100, vous pouvez déclenchez des attaques spéciales dévastatrices. qui contribuent à remplir une nouvelle fois la jauge qui doit atteindre encore une fois 100 pour qu'un autre personnage soit autorisé à utiliser une attaque spéciale.
Rien de bien compliqué en apparence donc, en apparence seulement. Car en connaissance de cela, il faut également savoir que les mages ne peuvent souvent déclencher qu'une magie lors d'un tour et doivent par la suite attendre plusieurs tours sans rien faire afin de pouvoir relancer un coup (d'où l'utilité de bien choisir les sorts que vous leur assignez), mais également que certains adversaires peuvent bloquer vos tentatives de combos si vous n'appuyez pas au bon moment, déclencher une contre-attaque grâce à un bon timing de votre part, etc. Le système de combat est rempli de ce genre de petites subtilités qui astreignent le joueur à rester vigilant lors des combats et amoindrissent l'aspect répétitif, défaut récurrent de bon nombre de RPGs.

Les défauts

La perfection n'étant pas de ce monde, même les chefs d'œuvre possèdent toujours des points sur lesquels il est difficile de fermer les yeux. En ce qui concerne Valkyrie Profile : Lenneth, il réside principalement en son système de différentes fins. Suivant vos choix dans le jeu vous pouvez avoir accès à 3 types de fin, A, B, C. La fin C correspond clairement à un Game Over, elle se déclenche lorsqu'en gros vous faites n'importe quoi et n'envoyez pas d'Einherjar avant la clôture des chapitres ou qui ne correspondent pas aux directives que l'on vous impose. La fin B correspond à la fin que vous déclencherez en jouant "normalement" et en vous comportant en bon petit soldat d'Odin sans vous poser trop de questions. Cette fin B est très frustrante et n'apporte aucun éclairage sur les différentes zones d'ombre de l'intrigue. La fin A en revanche, est la fin indispensable que tout joueur se doit d'obtenir s'il veut comprendre l'intégralité de l'histoire et en saisir parfaitement les enjeux. En gros cette fin correspond à celle que vous aurez si vous cherchez vraiment les secrets autour de l'identité de Valkyrie et des véritables buts d'Odin. Complètement satisfaisante, voire parfaite, cette fin A est malheureusement complètement impossible à avoir sans soluce ou aide de jeu. En effet, à certains moments de l'histoire, il faudra vous rendre à des endroits bien précis qui déclencheront des événements, vous devrez également rencontrer obligatoirement certains personnages avant la fin de tel ou tel chapitre. Ce principe à la limite de l'absurde oblige donc le joueur à se faire aider s'il veut pouvoir profiter réellement de Vakyrie Profile.

Autre point noir, le déséquilibre relatif à certains chapitres. Sur les 8 chapitres que vous ferez au cours du jeu, certains vous demanderont un timing très serré qui exploitera parfois l'intégralité des 24 phases (surtout si vous souhaitez la fin A, le chapitre 4 est d'ailleurs à ce sujet une référence) alors que d'autres chapitres se contenteront du minimum syndical en ne vous offrant par exemple qu'un ou deux nouveaux donjons à explorer et un ou deux Einherjar à recruter.

Et pour conclure

Par ce titre, l'éditeur Tri-Ace nous donne sa propre version d'une mythologie scandinave, vision rendue ô combien fascinante par l'entremise d'un scénario unique, rempli de sous-intrigues qui contribuent pleinement à renforcer l'aspect aux abords très fataliste et dramatique de Valkyrie Profile.

Doté d'une réelle maturité, Valkyrie Profile : Lenneth montre que le jeu vidéo et particulièrement le RPG sait non seulement se renouveler, mais sait le faire avec une maestria que l'on ne peut encore aujourd'hui qu'acclamer.

Si vous avez eu le courage de me lire jusqu'au bout, vous aurez donc peut-être compris que Valkyrie Profile : Lenneth est un chef d'oeuvre, une oeuvre d'art dont presque aucun aspect n'a été laissé à l'abandon, le symbole d'une mouvance créative audacieuse et qui parvient toujours à nous faire rêver.