Days Gone
6.8
Days Gone

Jeu de Bend Studio et Sony Interactive Entertainment (2019PlayStation 5)

"-Elle est pas un peu vieille, ta bécane? -T'inquiètes, elle roule bien!"

Il y a plus d'un an, j'écrivais en réaction de ce titre :


"Un jeu brisé, décousu, dénué de la moindre originalité mais qui parvient pourtant à dégager un certain attachement. Malheureusement, l'expérience demeure bien trop longue pour ce qu'elle a à proposer."


Et je ne vais pas vraiment contredire cette première impression; néanmoins, un an et demi plus tard, je me suis décidé à relancer ma partie de Days Gone pour poursuivre l'aventure, intrigué par les révélations de quelques amis à l'égard de ce titre et désireux de lui redonner une deuxième chance. Pourtant, c'est certain que le bougre ne paye pas forcément de mine et fait même parfois triste figure à l'égard de ses nombreux confrères dans un domaine aussi concurrentiel que le jeu à monde ouvert ou même les œuvres mettant en scène les indémodables zombies.


Une carte très belle à contempler, plaisante à parcourir mais redondante à explorer; des dialogues et une mise en scène qui souffrent immédiatement de la comparaison avec un certain titre de Naughty Dog; un système de combat pas spécialement novateur en apparence et déjà rébarbatif face à des antagonistes humains et une pléthore d'activités annexes aussi peu inspirées que convenues dans ce type d'expériences (oui les camps de bandits à nettoyer sont là) : toutes les cases du parfait AAA impersonnel semblent être cochées avec un automatisme détaché.


Hors, ce serait justement se méprendre sur les qualités insoupçonnées de ce titre; non pas que son classicisme soit une esbroufe, il est réel et entache l'expérience dans sa globalité mais il dissimule également aux yeux du joueur une vraie générosité dans cette proposition interactive et surtout une indéniable passion pour l'univers illustré, bien loin d'un simple produit de commande mercantile. En résumé, il n'y a pas de véritable génie dans ce jeu mais il y a par contre du cœur à l'ouvrage et c'est ce sentiment qui finit par prédominer en dépit d'une certaine austérité globale dans la fabrication et la structure de jeu.


L'écriture n'est clairement pas exceptionnelle mais il y a pourtant de vraies fulgurances dans la narration, en particulier sur la relation de Deacon avec sa bien-aimée Sarah; le gameplay est redondant la plupart du temps mais l'affrontement contre les Hordes propose une montée d'adrénaline quasiment inexistante dans les AAA de cet acabit; le monde ouvert se découvre la plupart du temps avec un détachement coutumier mais certaines embuscades et autres rencontres malencontreuses offriront de véritables sensations de survies inattendues; enfin le titre met en place un véritable sentiment de progression face à la menace des mutants, muant efficacement notre protagoniste de proie en chasseur, à mesure qu'il recouvre lui même une raison de poursuivre son combat au lieu de se laisser porter par les évènements.


Même chose en ce qui concerne la structure du scénario qui reprend explicitement les codes d'une série télévisée, moins superficiellement que le découpage épisodique d'un Alan Wake, mais en proposant une multitude de récits parallèles associés aux différents protagonistes de son univers tourmenté; l'intrigue donne le sentiment d'avancer à pas de fourmis mais à plusieurs reprises, le récit déjoue nos attentes en faisant intervenir des personnages que l'on avait associé à tort à des quêtes secondaires alors qu'ils étaient voués à interférer avec l'intrigue principale; cet entremêlement confère une certaine personnalité au récit à l'égard de ses nombreux concurrents et il est de même à bien d'autres égards pour le reste de l'aventure.


Une aventure qui est portée solidement par un héros à la sensibilité écorchée, désireux de trouver sa voie au milieu de ce merdier à l'image du titre qu'il porte sur ses épaules fragiles; l'acteur Sam-Starkiller-Witwer incarne avec brio ce protagoniste en proie aux doutes et à l'angoisse tangible et à bien des égards à nouveau, le comédien symbolise parfaitement l'attachement que parvient à susciter ce titre : un comédien souvent infortuné, cantonné aux seconds rôles à la télévision ou au cinéma, et qui trouve enfin un rôle de premier plan qui exploitera toutes les facettes de son talent; ça cabotine un peu, c'est moins précis qu'une cinématique archi millimétrée d'un Naughty Dog ou d'un Rockstar mais l'investissement du comédien à l'écran est indéniable, tout comme les concepteurs qui s'évertuent à proposer une aventure gargantuesque dans un univers apocalyptique.


Dès lors, à qui s'adresse véritablement ce Days Gone? Et bien, je pense avant tout aux véritables fans des récits de zombies et pas seulement ceux qui affectionnent démolir des sacs de viande sans cervelle; en ce sens, Days Gone est une expérience (à bien des égards? :p) moins radicale mais plus complète que la concurrence : son intrigue ne peut rivaliser avec celle d'un Last Of Us mais son monde ouvert propose la liberté et surtout les imprévus qui font tant défaut aux expériences linéaires de Joel et Ellie; sa dimension survie est moins aboutie qu'un State Of Decay mais il propose par contre la narration qui manque cruellement à cette expérience; sa structure télévisée n'est pas aussi bouleversante que la proposition de TellTale mais son gameplay ne consiste pas simplement à marcher ou faire des choix de dialogues; bref, c'est en somme un jeu somme sur l'imaginaire prolifique associé au Zombie : Days Gone n'est le maître d'aucun de ses composants mais par la multitude de facettes qu'il propose, il en sera peut être l'incarnation la plus satisfaisante aux yeux de certains joueurs. Un peu comme le liant qui consoliderait les pièces d'une bécane rouillée et lui permettrait de poursuivre sa route.


L'industrie du jeu vidéo n'est certainement pas prête à passer à autre chose mais Days Gone, lui, l'a déjà fait.

Leon9000

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