Chanceux que je suis ! Je viens d’installer Euro Truck Simulator. A moi les routes d’Europe, le camion à Dédé et le klaxon rigolo ! Ah, non. On me dit que dans ETS, en tout cas le premier, il n’y a pas de klaxon rigolo. Mince, déception. Mais on me dit aussi que le camion fait ‘biiip biiip’ quand il recule, alors ça va, je suis rassuré.

Je lance le jeu. Première impression : c’est calme et efficace. L’interface sobre et épurée, à la Assassin’s Creed. Je clique sur ‘Nouvelle Partie’.
On me demande de choisir mon pays de départ parmi une petite dizaine situés en Europe. On me précise que je pourrais étendre ma zone de transports par la suite (ooooh). Je choisis donc un pays ensoleillé, le Portugal.

Ecran suivant, je dois choisir mon camion parmi une dizaine de modèles exposés dans un salon de type concessionnaire.
En plus de leur prix, les camions ont 3 caractéristiques : la puissance du moteur, la taille du réservoir (mais pas la consommation) et le nombre… de vitesses. Il est probable que le nombre de vitesses soit un facteur de reconnaissance, un peu comme les objets ‘épiques’ dans un MMO. "Barre toi noob lol, t'as un camion à 11 vitesses et tu veux faire un Paris Varsovie !!! Lol ! C'est comme être une fille et pas avoir de shampoing !! Noob, lol, pdtr".

Bon, j'ai que 100 000 euros en poche. Seuls trois des camions proposés sont abordables (aucun à moins de 93 000). Je comprends le message. Si je veux la Rolls des semi-remorques il va falloir trimer. Il va falloir en trimbaler des tomates et du lait en poudre. Oh doux fantasme de l’élévation sociale !
J’en choisis un et je valide.

Ça y est, me voilà au volant du monstre. Douce ivresse de puissance ! Je dois me diriger vers un entrepôt pour prendre ma première missi… livraison. Coup de chance, l’entrepôt est à 300m.

Arrivé sur place, on m’indique une liste de cargaisons possibles à transporter jusqu’à Madrid ou Barcelone. Longue liste. Vais-je charger des ananas (pas de danger, ils sont froids), du cacao, de l’électronique ou du fuel ?
Pas le fuel, pour ça il me faudrita une licence spéciale que je ne peux pas me payer pour le moment. Notez la profondeur du gameplay, l'arbre des talents du petit entrepreneur routier - sans l’arbre en fait, mais y a l’idée.
Je me décide pour de l’électronique à délivrer à Barcelone. Je valide, la magie opère, le challenge commence.

Première difficulté: manœuvrer pour accrocher la remorque. Il faut être précis, rigoureux. Lent. Je galère un peu et suite à une manœuvre osée que renierait probablement le syndicat des moniteurs d’auto-écoles, je parviens à mes fins et peux alors attacher la remorque. Pas de QTE à la Quantic Dream, une simple pression sur la touche T et la voilà tractée. Toujours, au cœur de l’action : la conduite de poids lourds.

Deuxième difficulté: sortir de l’entrepôt. Il faut être un peu précis, mais surtout, lent. Je tourne un peu trop abruptement, et je décroche ma remorque. Je recommence donc ma manœuvre. J’y arrive mieux que la première fois, l’expérience se fait.
Deux minutes plus tard, je sors de l’entrepôt.

Nous sommes près d’un feu rouge, pourtant, les conducteurs me laissent la voie libre pour m’engager, au lieu de s’entasser, comme des bourrins, les uns derrière les autres. C’est surprenant. Puis je me souviens que nous sommes au Portugal et que les portugais sont sympathiques. Il est probable qu’à Paris, on doit attendre un bon quart d’heure avant de pouvoir sortir du parking.

Je m’insère - en partie - dans la circulation et je constate qu’il y a eu un accident au niveau du feu. En effet, ce dernier est passé au vert et personne n’avance. Les voitures en première ligne ont leurs warnings allumés.
Diantre ! Un événement aléatoire ! Comme dans la vraie vie ! Que d’intensité, que d’immersion ! Qu’à cela ne tienne, me dis-je ! L’électronique n’attend pas ! Je vais dépasser tout ce monde. Je recule un peu, braque sur la gauche pour prendre la voie opposée. Hop, une amende pour avoir roulé en contresens. Mince. Je me rabats. Bim, je cogne un véhicule. Une amende en plus ! Je contrebraque. Bam, une seconde voiture. Aaaaagh.

Je me ressaisis, je me colle comme je peux et roule bien droit. Je dépasse le feu, je tourne, j’avance, un autre feu au loin, je m’approche, je ralentis, je freine et je m’arrête. Quelle tension ! On dirait une poursuite de GTA, mais en vachement plus lent. Un peu comme un 100 mètres haies handisport des plus de 80 ans.
Je tourne encore. J’avance sur quelques centaines de mètres et voilà, je sors de la ville. A moi la liberté ! Enfin, des choix de routes !! Vais-je choisir entre les nationales et les autoroutes ?

Trente secondes plus tard je suis au premier choix. L’autoroute vers le Nord ou l’autoroute vers l’Est. Je sens qu’il faut aller à l'Est, sinon, il me faudra faire le double du trajet pour aller au même endroit.
Me voici sur l’autoroute et l’ivresse des 85 km/h.

Sept minutes plus tard, je passe à côté de Madrid. Je sais. Sept minutes, ça vous parait court. Mais détrompe-vous. C’est très long en vérité. Sept minutes à enchaîner les longues courbes légères, c’est super long. Je ne sais pas si vous avez déjà fait Paris – Berck-sur-Mer par l’autoroute. Moi je l’ai fait. Et ben Euro Truck Simulator, c’est un peu pareil.
Mais c’est un des points forts du jeu. Si, si ! Car c’est des longs moments d’autoroute qu’on prend vraiment conscience du plaisir d’être camionneur. Tout ce rapport incroyable à l’ennui, toute cette énergie dépensée pour ne pas dormir. C’est plutôt bien rendu.

Alors que je continue ma course folle à 80km/h sur les autoroutes espagnoles. Un message d’alerte (en réalité augmentée ?) m’informe que je suis fatigué et que je ferais bien de trouver un endroit ou me reposer.
Manque de chance, je viens juste de dépasser une station-service et qu’il n’y a aucune aire d’autoroute, ni sortie (à part pour se diriger vers une autre grande ville – d’après ETS, il y a en effet 4 routes sur la surface de la péninsule ibérique, c’est extrême, mais ça simplifie un peu le concept qui aurait sans doute été trop hardcore autrement).
Je me retiens de faire un demi-tour sur l’autoroute et poursuis.

A chaque minute un message d’alerte. Attention ! Fatigue ! Je remarque une jauge qui se remplit. J’imagine un malheur horrible si elle déborde… Quel suspens ! Quelle tension dramatique !

La jauge arrive à son plein alors que je vois une station-service sur ma carte. Il faut que je tienne encore 50 km me dis-je (c’est une estimation farfelue, il n’y a pas d’échelle sur la carte, ni d’estimation des distances).
J’arrive à la station-service, j’en profite pour faire le plein. Le message « Attention fatigue ! » apparaît une nouvelle fois. J’imagine mon Dédé, clope au bec, s’endormant alors qu’il fait le plein. Une explosion, puis la une de la presse locale.
Sauf qu’on n’est pas dans Papers, please !

Le plein fait, je remonte, redémarre, avance de quelques mètres pour me garer à l’endroit marqué d’un ‘Zzzz’.
Je me repose, la jauge se vide. La nuit se passe. Je me réveille sous le Soleil et reprend ma route vers Barcelone. Plus que 200 km.

L’arrivée à Barcelone est faite d’une sortie d’autoroute, une courbe serrée assez longue, puis de rues en angles droits. Un peu comme Lisbonne en fait. Je vais vers l’entrepôt indiqué sur ma carte. Je rentre et là… Le vrai challenge commence. Un peu comme dans le pilotage d’un avion ou le plus dur est la dernière étape : l’atterrissage. Ici, c’est le déchargement. Il faut mettre sa remorque au bon endroit. Et en marche arrière.
Je m’y reprendrais à de nombreuses fois, mais ne cognais le camion qu’une seule fois.
Une fois encore, une simple pression de la touche T et voilà ma remorque décrochée (pan, dans les dents, David Cage).

L’argent rentre ! 7500 euros pour le transport. Moins 750 de divers chocs et violations du code de la route. J’ai donc un peu de plus de 10 000 euros. Il me faudra 5 fois ça pour étendre mon empire de livraison à la France. Mais c’est normal de suer avant de prendre plaisir !

Un pop-up m’informe alors que je suis libre de me trouver un nouveau contrat. Coup de chance, le seul entrepôt de la carte se trouve à 300m. Une fois sur place, je découvre une liste toute aussi grande que celle de Lisbonne.
En fouillant un peu, je réalise alors que les cargaisons n’ont pas toutes la même taille (ce qui renforce clairement le réalisme), et n’occupent que 20 à 70% du camion.
“Haha !” M’écriais-je vivement, faisant fuir le chat assoupi sur mes genoux (camionneur ET ami des bêtes). « Je devine une subtilité tactique d’optimisation des trajets et des cargaisons !! ». Sauf que non. Il est impossible de prendre deux cargaisons distinctes, on voyagera donc plus ou moins à vide. Le choix de la mission est donc simplement sur le rapport distance / revenus. Cela restreint rapidement les choix et on finit par ne regarder que ce qui rapporte le plus. C’est un peu ici qu’ETS loupe la mention d’excellence et c’est vraiment dommage.

Je prends des bananes pour Madrid et me voilà reparti. Je sens déjà que j’ai acquis de l’expérience. Je suis en effet beaucoup plus rapide dans mes manœuvres pour accrocher la remorque. Je suis plus précis dans mes virages en ville et j’arrive à l’autoroute sans avoir cogné personne. La classe à Dallas donc.
Le train-train reprend, l’ennui aussi. Quelle force d’évocation d’ailleurs. Je manque plusieurs fois de me prendre le rail de sécurité à cause de mon esprit vagabondant ailleurs et m’empêchant de me concentrer sur mon travail, pourtant fort intéressant.

Dix minutes plus tard, je suis à Madrid, je décharge. Là encore, j’ai pu me rendre compte que le jeu m’a aidé à développer mes compétences de camionneur. Je réussi à placer ma remorque du premier coup, sans un choc. Oh joie ! Ce plaisir intense procuré par l’apprentissage ! 3250 euros de plus. La fête ! Le jeu me propose un nouvel entrepôt ou prendre des cargaisons, plus loin que d’habitude.

C’est à cet instant que je décidais de jeter un œil à l’heure et me rendis compte que j’étais devant ETS depuis plus d’une heure. Je fis alors un rapide bilan. Un point pour le moteur pas trop pourri ; un point pour le côté simulationniste dans l’aspect lent et poussif ; et enfin, un point, pour l’heure de leçon de conduite pas chère (du moins quand on trouve ETS dans un bundle de 6 jeux et à moins de 4€). Un total de trois points donc. Bravo !

Sachant que j’avais tiré le meilleur du jeu, je fis ce que Robespierre, en homme censé, aurait fait à ma place, je coupais le jeu pour ne plus y revenir – un peu comme avec un amant qu’on aurait trop aimé.
VincK
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le 12 janv. 2014

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