Peut-être vous souvenez vous des jeux flash, reliques d'une époque où les tablettes, les smartphones, et le Playstore n'existaient pas et où le seul moyen de s'amuser rapidement et sans payer était de chercher "JEUX.FR" (enlevez le 'x', remplacez le .com par .fr, toutes les variations existent, choisissez votre dealer).
Le catalogue était immense, des heures d'amusement ! Vous pouviez frapper des gens, catapulter des hamster, jouer à des MMO ou briser des ordinateurs si ça vous chantait, que demande le peuple ?


Ce que je retiens le plus de mes sessions de jeux sur ces sites sont des jeux absurdement difficiles, ces jeux nés d'un gameplay et d'une programmation simple, enfants de développeurs amateurs et fainéants.
Leurs différents tableaux devenaient trop difficiles trop rapidement, et on se retrouvait bloqué alors que quelques minutes auparavant on roulait sur tous les obstacles qui nous étaient présentés.
Et puis on s'obstine, on commence à comprendre comment abuser des mécaniques de jeux pour parvenir à nos fins, on déchiffre ce level design simpliste et pourtant insurmontable. Et alors, par miracle, on triomphe, on passe enfin cet obstacle et l'on s’emplit d'une joie bien méritée après des dizaines d'essais sur le même passage.
Enfin, on ferme la page à contre-coeur parce qu'on a atteint notre quota de la journée "allez, va jouer dehors !" , et le lendemain on recommence tout en un éclair, fier de notre expertise.


Bon, en fait les jeux étaient toujours nuls : un level design peu inspiré, une direction artistique pas plus dirigée qu'artistique, des bruitages surement chopés tous faits sur internet. Et pourtant, je ne peux m'empêcher de les admirer et de les embellir malgré leur médiocrité générale, simplement parce que ces jeux ont su semer en moi la graine d'une sorte de masochisme vidéoludique.
Cette absurde appréciation de la défaite, pour le seul plaisir éphémère d'être ébloui de sa propre lumière dont l'existence devenait incertaine.


Getting Over It c'est un peu la synthèse de tout ça, un jeu qui utilise ce pétrole brut du jeu flash et qui le raffine pour en alimenter son propos.
Vous êtes un homme dans un chaudron, une masse à l'écran et une souris à la main, vous devez gravir une montagne aux allures de bitmap tiré de Worms auquel on aurait ajouté de la 3D : le gameplay parait simple et les collisions explicites.
Et pourtant vous insultez ces contrôles atroces et contre-intuitifs alors le narrateur vous expose son avis sur la difficulté.
Pendant que vous anéantissez d'un mouvement de souris mal placé ce que vous avez mis des minutes ou des heures à monter, vous entendez des citations sur l'échec et la volonté. Vous souffrez mais vous refusez de vous laisser vaincre, vous en avez fait des jeux, des bien plus durs que celui-là en plus !
Il n'y a pas de raisons que je laisse gagner ce jeu qui méprise les déserteurs !!
Il ne me reste plus qu'à confier mes espoirs en la seule qualité nécessaire pour finir ce jeu : la volonté !!!


Sept heures et huit minutes de souffrance plus tard je suis un alpiniste acrobate cul-de-jatte professionnel passé maître en rattrapages in-extremis, la masse que je tient à bout de bras m'obéit au doigt et à l’œil, et les pentes, l'inertie, la friction et le moment n'ont plus de secrets pour moi.
Ça ne servait à rien, mais heh, j'en suis capable.

Kraby
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le 15 déc. 2017

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