The Real Regressive Simulator

On pourra me dire tout ce qu'on veut, et notamment pointer du doigt ses défauts bien réels que je ne conteste aucunement, je défendrais toujours ce bon vieux GT5. Oui, le principe des modèles standards "HD-isés"/ premiums est une connerie sans nom, oui, le son des moteurs n'a pas évolué d'un pet, oui, les collisons sont toujours aussi rebondissantes… Mais bordel, pad en main, ou encore mieux, volant en main, les sensations sont justes géniales ; de plus, le mode b-spec n'est pas dénué d'intérêt (bien qu'il prenne à mon sens trop de place) et les courses d'endurance avec le cycle jour/nuit et la météo dynamique sont hyper grisantes !!

Gran Turismo 6 était donc attendu au tournant. Autant par les aficionados de GT5 que par ses détracteurs. La recette était fort simple à appliquer : conserver ses points forts et combler ses lacunes, qui commencent à peser face à la concurrence. Mieux vaut casser le suspense tout de suite : selon moi et mon avis unique et indivisible, Gran Turismo 6 fait une belle sortie de route. Et pour la première fois -à mon sens- la série trouve même le moyen de régresser !! Mais commençons par le commencement…

Le plus gros reproche qu'on ait fait à GT5, à raison, c'est la séparation entre les caisses dites "premiums", spécialement modélisées pour le jeu, et ce qu'on pourrait appeler des "bolides remasters", des modèles repris de GT4 et mis à la sauce HD. Cette séparation est malheureusement toujours d'actualité dans GT6, et même si chaque caisse standard a subi un léger lifting appréciable, ça reste toujours assez dégueulasse dans le rendu graphique global du soft : PoDi ne comprend donc toujours pas ce qu'à pigé Turn 10 depuis une éternité, à savoir que 400 bolides différents de qualité homogène valent bien plus que 1200 voitures très inégales, et qui plus est bardées de doublons inutiles…

Continuons avec la structure de la progression qui a bien changé, et pas pour le meilleur. Dans les opus précédents, pour accéder à un championnat, il fallait globalement réunir deux choses : un permis et une caisse compétitive (GT5 rajoutait un niveau à atteindre). Dans GT6, la progression se fait très classique, très 90's, à base d'étoiles à gagner en remportant des courses qui débloquent d'autres courses et ainsi de suite…et les permis ne servent quasiment plus à rien, n'étant plus qu'optionnels. Tu as la caisse adéquate et tu voudrais bien faire ce petit championnat qui a l'air sympa ? Ben non mon petit bichon, t'as pas assez d'étoiles, reviens plus tard… Très nineties je vous ai dit…

Mais maintenant, on arrive au plus grave car, finalement, les deux défauts évoqués précédemment sont relativement "mineurs" : la technique globale défaillante du jeu, dans laquelle je mets principalement le framerate et l'IA. Passons vite fait sur le premier : j'ai toujours été étonné des critiques faites à GT5 sur sa fluidité car, pour ma part, je n'ai ressenti de toute ma partie qu'une seule et unique saccade, qui m'a d'ailleurs bien surprise (surtout que j'étais sur un ovale). Mais dans GT6, les chutes de framerate sont bien plus fréquentes même si, pour être honnête, assez rarement gênantes… Ça reste quand même une belle régression (dont souffrent d'ailleurs beaucoup de jeux de la fin de GEN "PS360").

Le défaut d'IA par contre, c'est quelque chose qui m'a grandement rebuté. Je ne parle pas des critiques concernant les concurrents qui se suivent tous en file indienne, car elles n'ont pour moi pas lieu d'être : il faut vraiment ne pas être féru de sports mécaniques pour ne pas savoir que chaque pilote chevronné essaiera toujours d'adopter la trajectoire parfaite, et il y en a rarement plus d'une…

Non, mon reproche concerne ce que j'appellerais le déroulement (a)typique d'une course : dans la très grande majorité des cas, la course débutera par ce principe à la con du départ lancé ; ça ne serait pas trop irritant si on pouvait gagner quelques places lors de séances de qualifications, mais surtout s'il n'y avait pas ce parti-pris complètement débile d'une ou deux voitures qui s'échappent du peloton pour nous mettre 15 à 20 secondes dans la face dès le début de la course !! Surtout quand certaines courses font seulement 3 tours !! Le plus déboussolant dans tout ça, c'est qu'ils sont souvent facilement rattrapables -le niveau général du jeu étant particulièrement bas- et, une fois doublés, ils quittent leur déguisement de Ayrton Senna pour se muer en Kevintruegamer902, se faisant même souvent rejoindre par le reste des concurrents, qui je le rappelle avaient 15 à 20 secondes de retard sur eux !! Vive le réalisme !!

Vous voulez d'autres errements du jeu ? Il y en a toute une pelleté. Listons-les à la sauvage : beaucoup de voitures semblent un poil légères, et tendent à vouloir se retourner plus que de raison, les marqueurs de freinage au sol ne sont pas toujours dignes de confiance (alors qu'ils étaient quasi-parfaits dans GT5), les collisions sont toujours aussi mal gérées… Le mode b-spec, que beaucoup de joueurs n'ont pas apprécié, a tout simplement été viré, alors qu'un même mode mais mieux pensé aurait été très intéressant… N'oublions pas la disparition de véritables courses d'endurance, pourtant présentes depuis GT premier du nom, ce qui est d'autant plus stupide que de nombreux circuits possèdent désormais l'alternance jour/nuit et/ou la météo dynamique… Ah, et aussi, c'est quoi cette manie d'obliger le joueur à jouer les deux tiers des championnats avec ces odieux pneus "sports" (quand ce ne sont pas les pneus dits "conforts"), qui sont une vraie entrave lorsqu'on conduit un bolide de plus de 400ch…

Pour parachever le tout, notons l'inclusion de micro-transactions, sans doute la lie de ce qu'on peut trouver dans un jeu vidéo actuel, surtout quand on a déjà investi quelques deniers dans la galette du jeu. On aura beau me dire que ça ne reste qu'une option, un constat s'impose tout de même : si on compare avec GT5, les compétitions offrent globalement moins de caisses en cadeau, et des gains sensiblement moindres, alors que la plupart des bolides sont toujours au même prix. De là à y voir une relation de cause à effet, il n'y a qu'un pas, que cependant je ne franchirais pas, sachant qu'on a toujours ce système de bonus de crédit lorsqu'on se connecte plusieurs jours d'affilée…

Gran Turismo 6 est donc mauvais ? Difficile d'objecter de manière catégorique. Sa conduite a par exemple encore légèrement gagné en finesse, et le feeling de pilotage est vraiment très bon. Si les caisses standards sont une honte en 2013, les modèles premiums sont vraiment sublimes, les plus somptueux bolides de cette génération de machines. Et puis, il y a quelques épreuves sympathiques, comme les virées sur la Lune, particulièrement déroutantes… Mais ça ne suffit pas pour mériter le statut de référence, un statut qu'il n'a très clairement plus, PoDi s'étant bien trop reposé sur ses acquis. Gran Turismo 7 a intérêt à avoir de l'ambition, ou ce sera pour ma part un adieu définitif à cette ex-grande franchise…