Little Nightmares
7.2
Little Nightmares

Jeu de Tarsier Studios et Namco Bandai Games Inc. (2017Nintendo Switch)

Impossible de ne pas faire le rapprochement.
Entre le dernier-né des studios Playdead – j’ai nommé Inside sorti un an plus tôt – et ce Little Nightmares, les points communs sont légion.
Même esprit de platformer 2D à atmosphère macabre ; même logique de focalisation sur la narration environnentale ; même philosophie de dépouillement au niveau du gameplay pour favoriser l’immersion…
Mais vraiment, c’est tellement flagrant qu’il devient impossible pour Tarsier Studios de nier le fait qu’ils aient zieuté du côté du Danemark pour concevoir leur propre créature.


…Alors après pourquoi pas malgré tout.
Ne jetons pas non plus le bébé avec l’eau du bain et sachons aussi voir ce Little Nightmares pour ce qu’il est, c’est-à-dire un jeu très soigné, à la patte atmosphérique certaine et au savoir-faire évident.
Moi en tout cas c’est ça qui m’a attiré vers lui – sa démarche esthétique – si bien que je m’en moquais un peu au moment de mon achat de savoir si j’allais y retrouver un peu d’ Inside ou pas dedans, bien au contraire.
Parce qu’il se trouve justement qu’ Inside est à mes yeux l’un des meilleurs jeux de la décennie 2010, notamment pour ce qui est de sa proposition narrative, alors autant vous dire que je peux carrément cautionner le fait que certains studios aient cherché à s’en inspirer !
Et puis si on devait invalider tous les jeux ayant repris les mécaniques d’un de ses concurrents, on organiserait sûrement pas mal d’autodafés dont il ne survivrait rien ou pas grand-chose.


Seulement voilà, une fois manette en main, cette logique de comparaison que j’avais voulu chasser par la porte est immédiatement revenue par la fenêtre…
…Et pas que par la fenêtre en fait. Mais aussi par les réniures du plancher, les fissures du plafond, les tiroirs du placard. De partout.
C’est beaucoup trop semblable à Inside pour ne pas être gênant. Et surtout c’est d’autant plus gênant que – malgré un savoir-faire évident – ce duplicata est fait sans génie ni perspicacité.


Pourtant, je pense qu’on peut supposer sans trop se tromper – et cela au regard des dates très rapprochées des sorties de jeu – que le développement de Little Nightmares avait sûrement déjà été lancé avant même qu’on ne puisse voir une seule image d’ Inside. Aussi, il me semble plus plausible de dire que, dans l’esprit de Tarsier Studios, leur Little Nightmares a plutôt été pensé pour être une version aboutie de Limbo plutôt qu’un clone d’ Inside
…Seulement voilà, il se trouve qu’en parallèle, Inside a aussi été pensé de son côté par Playdead pour qu’il devienne une version aboutie de Limbo, or la comparaison entre les deux résultats finaux est tout de même assez malaisante pour les studios suédois.


De tous les points comparatifs possibles, celui qui – pour ma part – m’a le plus sauté aux yeux, c’est vraiment tout ce qui relève de la narration environnementale.
Si dans un premier temps Little Nightmares est parvenu à susciter chez moi un bref espoir, c’est surtout parce que lors de ses premières minutes il a su générer autour de moi un univers mystérieux appelant à de nombreuses questions (Pourquoi un tel tangage ? Pourquoi de telles dimensions concernant les pièces parcourues ?)…
…Mais malgré cela, à force d’avancer un constat s’impose très vite : les salles commencent à s’enchainer sans vraiment parvenir à renouveler l’univers et l’intrigue. Très rapidement ça ronronne et le final arrive bien trop tard pour qu’une pièce soit remise dans la machine.
Aussi l’intérêt que j’ai eu à découvrir ce jeu s’est rapidement étiolé et l’impression de jouer à un sous- Inside ne m’a dès lors jamais vraiment quitté.


Alors après on pourrait se demander ce que pourrait en penser un joueur ou une joueuse n’ayant jamais parcouru un titre de chez Playdead.
Après tout c’est vrai que le jeu n’en reste pas moins une vraie réussite en termes de visuel et de mise-en-scène, donc tout novice pourrait peut-être y trouver dignement son compte… Seulement voilà, même dans cette configuration là, je ne suis pas convaincu du fait que Little Nightmares puisse pleinement convaincre, puisqu’indépendamment de l’ombre qui plane sur ce jeu, il y a tout de même toute une série de choix qui ont été pris ici et qui, moi, me posent problème.


D’abord il y a le fait que le jeu n’oppose aucune difficulté, ou du moins pas le genre de difficulté qu’on aurait pu souhaiter.
Les enjeux d’avancement dans l’intrigue reposent essentiellement sur, d’un côté, des énigmes très simples qui – bien que peu nombreuses – parviennent malgré tout à se répéter, et puis de l’autre côté sur de basiques mécaniques de die and retry pas bien plus compliquées mais d’autant moins stimulantes pour le joueur que les temps de chargement entre chaque reload sont bien trop longs pour ne pas casser le rythme de l’action en cours.


En fait – et à bien tout prendre – la seule vraie difficulté du jeu tient en son gameplay un brin hasardeux ce qui est loin d'être flatteur.
Déjà je me permets de sincèrement questionner la pertinence de la disposition des commandes sur les boutons de ma manette.
Alors certes, rien d’insurmontable, mais à plusieurs moments le caractère contre-intuitif ou peu habituel de ces choix m’a clairement fait manquer de réactivité et m’a régulièrement coûté la vie un peu connement.
Et puis s’ajoute à ça une physique un brin rigide du personnage à laquelle s'additionne une gestion de l’axe z qui cause franchement pas mal de souci.
Combien de fois je me suis cassé la gueule d’un tuyau large comme une autoroute tout cela juste parce que la caméra a décidé de pivoter pendant mon avancée !
Et combien de fois me suis-je aussi cogné contre un obstacle à la con dans une course-poursuite juste parce qu’il n’était pas évident de savoir exactement à quel niveau de profondeur sur l’axe z je me trouvais !


Le pire c’est que, malgré tous ses défauts, il aurait pu me convaincre ce Little Nightmares. A chaque fois il était à deux doigts…
…Mais malheureusement, pour chacune de ces fois-là le jeu s’est soit retrouvé à devoir lutter contre ses propres démons, soit s'est retrouvé à devoir combattre le fantôme d’ Inside : deux ennemis qu’il n’était clairement pas en mesure de vaincre.
Entre cette impression de couloir totalement artificielle, ses agencements hasardeux bien accommodants et ces collectibles dont on ne sait même pas à quoi ils servent, Little Nightmares renvoie très régulièrement à l'idée qu'on se fait d’un jeu plat.
Beau hein ! …Mais plat.
Le pire c’est que même sur ce plan-là Inside a su tout anticiper, éviter les pièges évidents, créer les conditions d’une implication et d’un questionnement permanent de la part du joueur…
…Bref à aucun moment il n’y a eu match.
…Un match que Tarsier Studios s’est imposé presque tout seul, bêtement, et à son grand désavantage.


Alors après il se trouve qu’il existe aussi un Little Nightmares II et que je l'ai aussi en ma possession.
Pourrait-on dès lors s’imaginer que le premier opus soit celui de la prudence et le second celui de l’audace ?
Pourquoi pas. L'avenir nous le dira.
…Sous peu il n’est pas impossible que je vous dise ça. ;-)

Créée

le 9 févr. 2022

Critique lue 210 fois

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