Omori
7.9
Omori

Jeu de Archeia_Nessiah, OMOcat et Playism (2020PlayStation 4)

Au milieu de ma partie d’Omori, un de ses grands accomplissements m’a saisi. Être parvenu à produire un projet comme ça sous RPG Maker (confère mes plusieurs années d’expérience dessus au collège). Maquiller à ce point-là la rigidité immuable de la formule RPG makée, parvenir à un univers aussi enchanteur et mélancolique en dépit de sa simplicité et de ses inspirations qui crèvent les yeux. C’est un vrai, gros morceau, fourmillant de pas mal de détails qu’Omocat est parvenu à sortir (groupe d'artistes indépendants qui ont fait ce jeu à la suite d’un Kickstarter réussi pour ceux qui ne le savent pas). Et malgré tout, pendant toute mon aventure j’étais énervé, crispé, et pas complètement dedans pour la même raison ! A cause des foutues limites techniques de RPG Maker… et d’autres problèmes… J’ai dû comme toujours partir avec des attentes trop hautes à cause de ce qu’on entend sur ce jeu mais à mes yeux Omori ne se hisse absolument pas aux côtés de ses frères Undertale ou Mother.


Je ne sais pas trop par quel bout le prendre mais donc oui, Omori est une sorte de RPG cocasso-mélancolico-humoristique, comme les deux monuments susnommés qui comptait ajouter à la recette une composante je cite “d’horreur psychologique”. Il y a donc une espèce de vibe Silent Hill, où l’univers exploré paraît faire écho aux profils (et donc traumas) psychologiques de ses personnages, le jeu allant jusqu’à singer Yume Nikki sur une séquence de fin. L’ADN de ses prédécesseurs saute immédiatement aux yeux comme je l'ai écrit précédemment : la variété improbable des situations et les dialogues souvent légers, absurdes et humoristiques des PNJs semblent avoir été directement extrait d’Undertale et de Mother. Omori compte également proposer un système de combat tour par tour avec un twist, ici la gestion des émotions sur son équipe et ses adversaires. Un système très efficace de type pierre-feuille-ciseaux (repose ces ciseaux Basil) qui marche plutôt très bien. Assez peu intuitif à prendre en main, on se rend rapidement compte de sa profondeur sur les boss qui peuvent être assez punitifs si on est pas vigilant et ça fait du bien dans un projet RPG Maker à base de classiques actions à sélectionner en guise de combat. Ca aurait pu être encore un peu plus fou, avec par exemple un certain pourcentage de chance que les ennemis se suicident si déprimés, ou comme un ami m’a dit que le personnage puisse faire une remontada à la suite d’une dépression avec une énorme augmentation de ses stats. On aurait pu imaginer une perte de contrôle avec la colère, m’enfin c’est très efficace comme ça sans être non plus génialissime.


Là où Omori va se différencier de ses aïeuls c’est dans la dominance de sa narration par rapport à son gameplay, et c’est ce qui fait que c’est un moins bon jeu à mes yeux. Déjà le point qui m’a dérangé dès les premières heures, et qui n’a malheureusement jamais été démenti sur la quinzaine demandée pour traverser l’aventure en ligne droite. On voit que c’est un jeu fait par des artistes. Car il y’a beaucoup d’art, mais pas beaucoup de jeu vidéo dans ce jeu vidéo. Les points qui ont fait la renommée d’Omori sont juste incontestables : une direction artistique magnifique, ce crayonné pastel hyper chaleureux original qui va de la jaquette du jeu aux sensibles cinématiques animées. Le pixel art n’est pas en reste d’ailleurs, tellement fin que certaines animations me rappelait le diptyque Dessine ton héros sur DS (auquel j’ai pensé pendant tout le jeu d’ailleurs pour ses thèmes sombres également cachés et l’aspect inattendu…). La musique est d’une beauté folle, piano violon pour le duet en thème principal les frissons sont garantis, mais je tiens à donner une mention spéciale à Poems in the fog qui est juste fou, le thème du White Space, le premier thème de combat dans la forêt vaste, le thème du château de Sweetheart, les compositions angoissantes pour les parties creepy qui font très bien leur effet. La quantité de musique produite pour ce jeu est aberrante (179 pistes bon dieu !) et les pistes marquantes sont légion, chapeau bas. Enfin cette vibe de jeunesse, d’aventure d’enfance (mais à l’ambiance noire qui n’est pas sans rappeler Les fleurs du mal d’Oshimi ou Punpun comme le disait une autre critique, mais dans une mesure ÉNORMÉMENT MOINDRE à mon goût) fait également mouche bien que j’ai trouvé l’écriture assez ratée… Le problème étant que la majorité des dialogues m’a paru vraiment sans saveur, c’est du dialogue d’exposition parfaitement neutre, des personnages qui parlent en boucle de la situation sans affect, on est plus sur du Mother 1 que du Mother 3. C’est ni hyper cocasse avec une folie qui atomise le 4ème mur où les gens paraissent vraiment en roue libre, ni terriblement mélancolique et sombre… Donc c’est juste… plat… Les gens parlent de ce qu’ils font… Et c’est ça qui rend les séquences de dialogue aussi indigestes. Je rejoins les gens qui ont trouvé la partie narrative beaucoup trop lourde. J’ai lu “autant faire un visual novel”, alors on en est quand même pas là mais par contre on est sur le niveau d’écriture des pires visual novels, où l’émotion peine à passer dans la majorité des situations et on pique du nez au bout de la quatrième minute de dialogue. Dommage car c’est là que les jeux d’aventures de ce type brillent souvent. Mother 3, qui lui aussi voulait aller chercher dans des émotions plus mélancoliques et sombres et était doté d’un twist moins vénère qu’ici avait une écriture bien plus pertinente, plus drôle aussi sur ses à côtés sans tuer la trame centrale.


Le twist du coup parlons-en… Pour moi c’est un peu trop. Ca m’a moins touché que celui de Mother 3, où l’histoire d’un deuil familial difficile m’a paru plus proche, plus universelle. Le jeu gère très bien son mystère par contre, en dévoilant sa structure et ses indices au compte-goutte avec un plutôt bon rythme (bien que je comprenne que l’aventure fantasque donne une impression d’inutilité à pas mal de monde. On a envie d’en savoir plus car la deuxième partie attise tellement plus la curiosité ! Mais les bonnes phases se dévoilent petit à petit dans l’Headspace…). Même dans ses phases qui se veulent plus horreur et effrayantes le jeu n’est pas assez viscéral, pas assez horrible… La partie Yume Nikki est réussie mais courte et tellement copiée/collée de son modèle…

Comme je l’ai lu sur une vidéo Youtube, si la famille de Sunny n’avait pas habité dans une maison avec escalier rien ne se serait passé… Et les mecs qui vont pendre le cadavre de leur sœur c’est trop gros pour me toucher… La cinématique de la bad ending avec Sunny qui tombe n’en parlons pas, c’est limite ridicule ! Après c’est sympa de voir toute la dimension de fond un peu environnementale et cachée du titre… voir la maison d’Aubrey négligée, les tourments de Basil… J’ai été vraiment touché sur le passage où on va dans la chambre d’Aubrey, et on voit une photo avec sa nouvelle amie sur sa table de chevet. Encore une fois c’est par le dessin hyper réussi que l’émotion passe. Le jeu compte quelques moments convaincants, mais tellement pas assez… Surtout qu’au final c’est pas assez développé tout ça… Tout est en sous-texte et ça n’ira jamais plus loin. Le passé des personnages, les causes de la frustration de Sunny, leurs relations… On reste en surface totale dans le superficiel, et pour un jeu d’une vingtaine d’heure on a le droit d’en attendre plus non ? Après je n’ai fait que la route normale pour le moment, il reste encore la route Hikikomori mais bon je ne sais pas quand j’aurai la foi de m’y coller et si ça change vraiment beaucoup de choses…

Au final Omori m’aura offert une aventure qui m’a tenu en haleine jusqu’au bout car j’avais envie de percer ses mystères. Mais c’était surtout un jeu un peu longuet, fragile sur plusieurs aspects notamment sa technique où j’ai perdu plus d’une heure de jeu avec une sauvegarde disparue comme par magie sur PS4… Certains de ses aspects touchent au sublime, notamment sa musique et sa direction artistique mais le projet aurait gagné à avoir une meilleure écriture et un game design plus solide. Peut être la faute à une équipe trop réduite, et des artistes plein de bonnes volonté mais en manque d’expérience dans ces domaines ? Omori n’égale pas ses modèles, qui sont en même temps des jeux absolument géniaux qui m’ont marqué à vie, mais n’est pas une expérience vide d’intérêt pour autant… alors comme toujours allez y jouer vous même plutôt que de lire quelque chose pour vous faire votre propre avis ! Malgré tout, ces 20 heures de votre vie seraient bien mieux exploitées à vous frotter à ses cultes inspirations, Undertale et la trilogie Mother (sautez le 1 et passez en vitesse le 2). Donc allez les faire en priorité, mais si vous êtes en manque comme moi… l’espace blanc vous attend.


Tomega
6
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le 12 nov. 2022

Critique lue 305 fois

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