En jouant à Psychonauts, deux choses sautent aux yeux: Tim Schafer est aux commandes et le développement a été chaotique. Baladé entre différents éditeurs au cours d'un long développement de 4 ans, le jeu est un miraculé qui garde pas mal de séquelles de cet accouchement dans la douleur. Toutefois tous les problèmes de Psychonauts ne sont pas tous à mettre sur le dos des conditions de développement. Le jeu égraine les décisions étranges et les fautes de goût, à commencer par l'audio.


Lorsqu'on lance le jeu, le thème principal se fait entendre tandis que les crédits du jeu défilent. En appuyant sur un bouton, on interrompt brutalement ce thème à la Danny Elfman pour une musique d'espionnage typée années 70. Ce mélange des genres n'est pas un problème en soit et fait même partie des nombreuses thématiques du jeu. Non le problème c'est l'absence de transition entre les deux morceaux. Ce n'est qu'un détail bien sûr mais il est assez symptomatique du reste du jeu. Les sons sont superposés sans aucune cohérence, souvent avec des mixages étranges. La première zone du jeu est un autre exemple avec ses dialogues à peine audibles et ses sauterelles qui font un bruit de clic de souris qui passe complètement au dessus du mix.


D'un point de vue beaucoup plus subjectif, l'esthétique aussi bien sonore que visuelle du jeu m'a posé au départ énormément de problèmes. Avant de finir Psychonauts, je pense avoir commencé le jeu 4 ou 5 fois. A chaque fois la manette m'est tombée des mains au bout de quelques minutes. Entre le physique (et les doublages) de certains personnages (au hasard Bobby Zilch), les tons verts "j'ai vomi mon goûter" de la première zone et le riff de guitare baryton qui donne envie de se pendre, je n'avais vraiment pas envie d'être dans cet endroit. Problématique puisque les premières scènes sont censées transmettre l'excitation du héros.


C'est aussi dans cette première zone qu'on peut se rendre compte des soucis de design que le jeu se trimbalera jusqu'à la fin. Super Mario 64, que l'on peut considérer comme le mètre étalon de la plateforme 3d, évite le plus possible deux choses dans son level design: les courbes et les plans inclinés. Les courbes parce que les collisions sont plus difficiles à gérer et les plans inclinés pour que le joueur comprenne où il peut marcher et où il va glisser (problèmes qui seront réglés par la gravité fantasque des planétoïdes des Mario Galaxy). Psychonauts fait l'inverse. En cherchant à rendre ses environnements plus "organiques", le jeu évite les plateformes anguleuses et mets des courbes partout. En résulte des phases de plateforme irritantes: les problèmes de collisions sont légion et on ne sait pas vraiment où on peut marcher/s'accrocher.


Parmi les critiques adressées à Psychonauts ont peut souvent entendre parler de la "collectionnite" et du système de progression.Tim Schafer a à de nombreuses reprises déclaré qu'il considère les jeux de plateforme 3d comme des "collectathons" et Psychonauts en est clairement un. On passe son temps à récupérer des trucs qui servent à rien. Sauf à gagner des niveaux pour améliorer des pouvoirs pour la plupart inutiles. Ces systèmes sont donc plutôt inoffensifs et ne gênent pas vraiment la progression.


Malgré ses problèmes de finition et ses choix de design douteux, j'ai sans trop me forcer été jusqu'au bout de Psychonauts. Parce que Tim Schafer est parfois un génie. Quand il ne se vautre pas dans des clichés (comme le niveau de Napoléon avec les escargots ou de l'amalgame tauromachie/lucha libre), il est capable d'écrire des dialogues incroyables. Mention spéciale pour les répliques de l'agent Cruller. On retrouve dans ces dialogues tout l'héritage du point & click à la Lucas Arts. Cet héritage est également palpable dans le design des niveaux les plus réussis. Conçus comme des mini-énigmes, il ne s'agit pas simplement d'arriver à l'autre bout de la map en récupérant des collectibles en chemin, mais de résoudre des problèmes symboliques.


Psychonauts déborde d'inventivité et je conçois parfaitement que certaines personnes adorent ce jeu et attendent avec impatience la suite. Certaines scènes préfigurent ce qu'on retrouvera des années plus tard dans des Zelda, Mario ou Little Big Planet.


Au final, quel souvenir est-ce que je garde de ce jeu? Celui d'une expérience désagréable parsemée d'émerveillements et de fous rires. Psychonauts n'est à mon avis pas un bon jeu, mais il est loin d'être inintéressant et fait sans aucun doute partie des meilleurs mauvais jeux que je connaisse.

noisyouch
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le 26 janv. 2016

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noisyouch

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