"Get a load of this!"

(Version Dreamcast faite sur émulateur via Romstation)

Sorti en 1998, Sonic Adventure est le premier épisode canonique en réelle 3D du hérisson bleu, tellement battu à l'heure actuelle qu'on le confondrait presque avec un frère difforme des Bogdanov et de Ribéry réunis. Il a reçu d'excellentes critiques à l'époque, et a également reçu des échos favorables venant de la plupart des joueurs. Il faut dire qu'il en avait, des arguments-vitrine : des graphismes tout à fait corrects et une direction artistique qui détonne avec les anciens épisodes de la série, tout comme sa bande-son éclectique et "instrumentalisée", style déjà abordé sur la bande-son de l'exceptionnel Sonic 3 & Knuckles, sa diversité de gameplay (ahem, on va y revenir), et bien entendu, la vitesse du protagoniste principal.

Je m'arrêterai ici concernant la description directe du jeu. Autrement, cet épisode s'articule autour d'un centre-ville qui fait office de hub, Station Square. Autour de ce même hub se déclinent 6 histoires principales.

Nous avons :

• Sonic : la face vitesse du jeu. Maladroit mais a également ses moments jouissifs, et certainement la meilleure du jeu. Contient des séquences impressionnantes (Speed Highway).
• Tails : la face vol + vitesse. Ressemblant assez à celle de Sonic, dû notamment à ces quelques niveaux et boss que l'on refait avec le renard (quoiqu'avec ses animations de bouche, j'aurais plus tendance à l'apparenter à un clébard), ce n'est clairement pas une histoire très intéressante car courte et redondante. Et les phases en Tornado de ces deux histoires... n'allez pas me dire que l'excitation est palpable.
• Knuckles : la face recherche. En train de chiller sur son île, le pauvre échidné s'est fait cambrioler sa bijouterie par le monstre Chaos, créée par Eggman à l'aide des Emeraudes du Chaos. Ses niveaux sont de la recherche de morceaux de la Master Emerald brisée, qui fonctionnent via détecteur. Pas nécessairement horrible, mais pas inoubliable non plus.
• Amy : la face lente/poursuite. Personnage casse-pieds de base (y compris dans ce jeu), aux antipodes d'un Sonic ou même d'un Tails en termes de vitesse, ce désavantage est néanmoins comblé par la capacité de cogner avec son maillet et de faire des sauts assez hauts en courant, via son arme. Comme pour Knuckles, cette phase manque de folie, mais n'est pas désagréable.
• E-102 Gamma : la face pan-pan boum-boum version T800. C'est la version pan-pan boum-boum des niveaux que l'on connaît et d'autres inédits. C'est une histoire tragique, vous ne pouvez pas savoir à quel point j'ai fini en larmes à la fin.

Et il y a Big.

Ces personnages ont également la particularité d'être au centre d'histoires qui s'entrecroisent, à la Rashômon/Pulp Fiction (mais sans l'écriture). Cela aurait pu être une bonne idée mais le résultat final apporte parfois un effet poussif et plus qu'étrange.

Je ne peux pas croire que le même développeur qui a créé le level-design de S3&K est celui qui a eu l'idée de pêche dans ce jeu. Ou alors c'est un sosie je sais pas, mais rendez-moi le vrai.

J'ai déchargé mon fioul sur Sonic Heroes, que je déteste et que je considère comme indéniablement plus faible que cet Adventure, mais ce n'est pas pour autant que je vais accepter les défauts de ce dernier quand l'excès est atteint, qu'il date de 1998 ou pas. Super Mario 64 date de 1996, et a été développé sur une console considérablement moins puissante, ce qui ne l'empêche pas de se jouer encore très bien aujourd'hui (évitez la version shindou, qui se trouve sur la trilogie Super Mario 3D All-Stars). Et si c'est un problème dû à la vitesse, ils auraient alors dû se concentrer prioritairement sur cet aspect, au lieu de développer d'autres aventures au gameplay varié mais hautement inégal, et une histoire principale qui est un supplice à tolérer, autant pour ses personnages que pour son non-sens total.

Ça me fait mal de l'écrire, mais si vous avez un choix à faire, entre la 2D et la 3D chez Sonic, préférez définitivement les classiques en 2D de l'ère Megadrive. J'inclus en plus le sous-estimé Sonic 3D Flickies' Island (peut-être un plaisir coupable personnel, mais en même temps, je pense sincèrement qu'il est sous-estimé). Si je précise que ça me fait mal, c'est parce que ça donne cette impression de passer pour un vieux con, qui rabâche à qui veut l'entendre que "y a que les Sonic Megadrive qui sont bien, les autres c'est de la merde et ce sera toujours de la merde [grincement de dentier]". J'exècre cette mentalité, c'est loin d'être ce que je pense, et je souhaite que les gens donnent une chance aux épisodes en 2D actuels (facile avec Mania) mais également aux épisodes en 3D. Il y a de bonnes choses qui se dégagent des Sonic 3D, même des... ahem... moins bons.

- Qualités :

• L'ambition qui s'en dégage, la volonté des développeurs pour créer une aventure inoubliable, variée dans le but de plaire au plus grand nombre
• Graphismes corrects et variés, et le tout a une certaine ampleur
• Bande-son énergique, malgré son inégalité
• Durée de vie honorable (encore faut-il aller jusqu'au bout)
• Variété du gameplay
• Je vais être gentil, je vais compter la pochette qui est très jolie, avec ses couleurs, ses tons, ce Sonic stylisé et tout

- Défauts :

• Bugs en tout genre
• Collisions mal gérées, Sonic fait le Harlem Shake dès qu'il monte une marche de 2 cm
• Animations risibles et pathétiques lors des cinématiques
• Doublage anglais à côté de la plaque lors des cinématiques
• Ambiance nanar malgré le premier degré ambiant des cinématiques
• Mixage sonore dans les chaussettes lors des cinématiques
• Tout ceci couplés au fait que l'on ne peut pas passer les cinématiques.
• Gameplay imprécis
• Partage le même caméraman que celui de Super Mario Sunshine
• Pléthore de séquences de gameplay et d'idées plus ou moins ennuyantes, plus ou moins stupides
• Big et ses mécaniques de pêche imbitables
• Et encore une pelletée de défauts que j'ai oubliés.

Verdict :

Ce n'est en aucun cas un mauvais jeu mais il est terriblement inégal, sur à peu près tous les points que j'ai abordés dans cette critique.

Globalement, on ressent une volonté de bien faire de par ses créateurs, mais il aurait fallu que le brainstorming dépasse la quinzaine de minutes concernant certaines phases de jeu, que le tout se lie naturellement, et que le peaufinage soit de mise. (Et j'imagine bien que la faute est en partie due à SEGA, avec ses méthodes pourries de deadlines abusives qui durent depuis plus de vingt ans, menant les développeurs à rusher leur produit le plus vite possible.)

La densité, le contenu proposé par le jeu est respectable, mais tout n'est pas bon à prendre.

Ni un passage raté en 3D, ni une grande réussite, Sonic Adventure ressemble surtout à un coup d'essai qui ne méritait qu'à être sublimé dans les aventures postérieures de la mascotte de SEGA, ce qui sera en partie le cas dans sa suite.

Edit : J'ai oublié d'aborder le sujet de l'élevage des Chaos, mais qui s'en fout lève la main.