The Evil Within
6.9
The Evil Within

Jeu de Tango Gameworks et Bethesda Softworks (2014PlayStation 4)

A priori, ce jeu avait tout pour me plaire. Fait par Mikami, le seigneur des vieux - et des vrais - Resident Evil ! Un survival-horror, pur et dur, un jeu bien flippant comme on n'en fait plus ! Forcément, je l'ai acheté les yeux fermés. Ça m'apprendra...


Comment dire... Ce jeu, c'est un peu comme un très bel emballage cadeau qui serait vide à l'intérieur. C'est alléchant, intéressant, mais on se rend doucement compte qu'en réalité, c'est plat, et c'est chiant.


Graphiquement, j'ai vu beaucoup de gens se plaindre. Personnellement, étant très peu exigeant de ce côté-là, j'ai trouvé ça largement suffisant. En revanche, c'est vrai que le champ de vision est trop réduit, comment voulez-vous balayer une zone à la recherche d'ennemis alors que votre personnage prend la moitié de l'écran ? Mais bref, ça, à la limite, j'aurais pu faire avec.


Pour ce qui est de la bande-son, je n'ai rien à dire de particulier, ça m'a paru convenable. Pour ce qui est de l'ambiance par contre, je trouve que c'est du très bon boulot. J'ai rarement vu autant de sang dans un jeu mais franchement ça a de la gueule de se balader dans cet univers. Les décors sont variés, certes classiques mais efficaces, et il y a plein de bonnes idées qui vont dans le sens de l'horreur (surtout dans les passages façon Silent Hill où les lois du réel ne s'appliquent plus). En plus, les boss sont nombreux et très sympas dans leur design, donc point fort supplémentaire pour moi.


Seulement voilà, les qualités du jeu s'arrêtent là. D'où ma question : à quoi sert une bonne ambiance et des décors horrifiques si le joueur n'en a rien à cirer de se balader là-dedans ? Car l'intérêt même de progresser dans le jeu est inexistant. La trame narrative est atroce : elle consiste sans arrêt à courir après un autre personnage, parfois pendant trèèèèès longtemps, et au final, quand on réussit enfin à le chopper, on le voit trente secondes et il redisparaît, sans que ça n'ait apporté quoi que ce soit à l'intrigue. Mais de toute façon, que ce soit au niveau de l'intrigue, de la façon dont c'est raconté ou des personnages, c'est raté. Je n'ai jamais vu ça : le personnage principal, Sebastian Castellanos, qui pourtant a de la gueule, n'en a absolument rien à foutre de rien. Il se passe des trucs de fous autour de lui, jamais il ne se pose de question, jamais il ne réagit.


Je ne parle même pas des passages où il est accompagné par un autre personnage. Qu'il ne parle pas quand il est tout seul, bon, c'est limite vu la situation mais admettons ; mais que deux personnages perdus dans un univers aussi bizarre/dangereux/oppressant (barrez la mention inutile) ne trouvent rien à se dire, c'est juste désolant. A quoi ça sert ? Pourquoi nous coller un allié chiant si ce n'est même pas pour étoffer le scénario avec quelques dialogues ? Franchement, dans ce jeu, ça ressemble à ça :


Le héros, après des heures perdu tout seul dans un monde effrayant, retrouve enfin l'un de ses potes :


" Joseph ! Ça va ?
- Je... Je... Ouais, ça va...
- Bon.. On y va ?
- Ouais... Allons-y..."


Voilà, c'était le dialogue le plus intéressant entre ces deux personnages. Putain, ça valait le coup de faire trois heures de couloirs pour ça. Sérieusement, le minimum syndical, c'est une scène de plus de deux minutes où les personnage s'interrogent un peu. Sans blague, il se passe tellement de choses incompréhensibles : la ville qui s'effondre sur elle-même, le héros enfermé dans un endroit hyper-glauque au début, et puis tiens, au hasard, les monstres qui essaient de les buter ? Voilà un sujet qui pourrait être abordé, non ? Et bien non. C'est parfaitement naturel après tout, l'inspecteur Castellanos a sûrement l'habitude de buter des zombies par centaines à grands renforts de fusil à pompe et d'arbalète. C'est un peu une journée normale au bureau quoi.


Globalement, les personnages n'ont pas d'âme, leurs répliques sont convenues et inintéressantes, c'est limite s'ils n'ouvrent pas la bouche juste pour faire du vent alors qu'il y aurait tant de choses à dire. Quand je compare ça à un jeu comme The Last of Us où tout est tellement vivant, j'ai envie de sauter d'un pont. En plus de ça, ils ne sont même pas cohérents.


Il y a même un personnage qui voit son frère mourir d'une façon atroce, et il n'a quasiment aucune réaction. C'est vrai, ce n'était que ton frère, il n'y a sûrement pas de quoi s'affoler... Mon Dieu.


Ensuite, concernant le scénario en lui-même... Et bien, j'ai passé tout le jeu à attendre la fin, l'explication, celle qui permettrait de recoller tous les morceaux et de donner un sens à l'ensemble, celle qui éclairerait toutes les pistes et qui prouverait que tout a été soigneusement travaillé... donc, en gros, j'attendais que la fin rattrape le reste. Et bien, c'est un peu comme s'accrocher une enclume quand on est en train de se noyer ; elle ne fera que nous achever.


En soi, le scénario n'est pas très compliqué, il est juste atrocement mal expliqué ce qui le rend ridiculement difficile à saisir. Voilà comment marche le monde : un scénario compliqué, c'est un scénario compliqué. Un scénario simple qui est rendu tordu par une narration idiote, c'est de la merde, c'est tout. Et en plus, ça reste assez classique. La fin ne répond à rien, c'est un vrai scandale. Tenez, tout au long du jeu, on récupère des documents qui nous informent sur la vie passée de notre personnage. J'attendais avec impatience le moment où cette histoire là recouperait avec l'intrigue principale, et puis... rien. C'était juste comme ça en fait. D'accord.


Alors oui, certains diront qu'il faut interpréter, mais en ce qui me concerne, extrapoler en essayant de boucher les trous du scénario, ce n'est pas une façon d'apprécier un jeu. Il y en a même un qui m'a sorti qu'il fallait obligatoirement lire Freud pour en comprendre toutes les subtilités, les gens n'ont plus de limite. J'ai aussi entendu dire que les DLCs éclairaient le scénario : je ne sais pas si c'est vrai, mais si effectivement c'est le cas, ils peuvent aller gentiment crever en enfer avec leur fin en kit.


Même pas de scène après le générique ! Même dans God of War 3 qui a un scénario débile, ils ont fait l'effort de faire une scène post-générique ; et là, dans un jeu flou avide d'explication, il n'y a rien ? Je me suis tapé ce très très long générique inutile pour rien ? Au secours, rendez-moi ma vie !


Non, sans blague, ce n'est pas une fin, ça, c'est juste nul. Pas fini. Je ne pense pas que ce soit de la fainéantise, à moins avis, on se trouve là face à une véritable incompétence. Au moins, dans Resident Evil, l'histoire était nulle mais tout le monde s'en foutait, ce n'était pas le but. Là, le jeu vous fait mariner pendant 15h, vous fait sentir qu'il y a une histoire qui a été écrite, pensée et tout... Puis au final, ça ne vaut pas mieux que le jeu cité au-dessus. Décevant.


Pourtant, il y a de bonnes idées, mais rien n'est exploité correctement.


A un moment, on voit le héros qui se transforme momentanément en monstre, et qui attaque donc sa partenaire, involontairement.


Oui ! C'est une bonne idée ! C'est original, d'habitude ce sont toujours les persos secondaires qui y ont droit ! Sauf que passée la scène en question, on n'en entend plus parler. Super, à quoi ça a servi ? Bah à rien. Tout est décousu, rien n'est cohérent...


D'ailleurs, la fille lui colle une balle à bout portant, mais le mec va très bien, merci. Enfin, si on en est à se préoccuper de ce genre de détails...


Franchement, c'est lamentable.


Bon, bref. Je vais arrêter de parler de l'histoire, sinon ça va devenir violent. Venons-en plutôt à un autre point crucial dans un jeu vidéo, et ainsi à un autre défaut colossal de ce jeu : le gameplay.


Fondamentalement, il n'est pas forcément mauvais, c'est juste qu'il est gâché par plein de petits détails. Impossible de tirer sur un ennemi s'il est trop près, corps à corps inutile, le héros qui sprinte aussi bien qu'une grand-mère en fin de vie... Les armes sont très classiques, on commence d'abord avec un petit flingue puis on reçoit presque toutes les autres d'un coup. On est limité en balles car Sebastian ne peut en transporter qu'un certain nombre par arme ; c'est une bonne idée, mais finalement ça n'a pas beaucoup d'influence, parce que le jeu donne bien trop de munitions. Pour un jeu qui se vend comme étant un survival (ce qu'il n'est pas vraiment, c'est pour ça que je dis qu'il se vend comme), on n'est jamais à court de balles, ni à court de soins, les ennemis ne surprennent pas, ils ne font pas beaucoup de dégâts... Donc en gros, le jeu est trop facile. On me dira qu'il suffit d'augmenter la difficulté ; certes, mais quand on le lance pour la première fois, on a le choix qu'entre facile et normal, donc non, la première partie est trop simple, c'est tout.


Le gameplay est d'ailleurs assez incohérent par endroit, on a l'impression que les développeurs n'ont pas une bonne perception de leur propre jeu. Par exemple, il y a des cachettes, un peu comme dans Outlast ; pourquoi pas, sauf que dans ce dernier, le héros est désarmé. Expliquez moi l'intérêt de se foutre sous un lit alors qu'on a un fusil chargé et que les ennemis sont cons comme des tanches ? Voilà, aucun.


Pour le reste, il y a les clefs à trouver qui sont un concept assez sympa, et il faut aussi parler du gel vert, étrange liquide à s'injecter directement dans le cerveau pour augmenter nos compétences. De ce côté-là d'ailleurs, je trouve le jeu assez radin, les quantités de gel vert ramassé n'augmentent pas beaucoup avec le temps, alors que les prix flambent. Par ailleurs, seules quelques améliorations sont vraiment utiles, beaucoup sont plus qu'anecdotiques. A part ça, je n'ai pas grand-chose d'autre à dire sur ce système, ça n'a finalement rien d'exceptionnel.


Mais de toute façon, on pourrait résumer tous les problèmes du gameplay en une seule phrase : ce n'est pas amusant. Les armes ne sont pas jouissives à utiliser, les ennemis s'enchaînent sans que les combats soient intéressants... et puis franchement, j'avais entendu dire que Mikami avait lâché Resident Evil parce que la série prenait une tournure trop orientée action, alors retrouver dans son jeu des zombies qui vous tirent dessus à la mitrailleuse équipés d'un gilet pare-balles, c'est vraiment prendre les gens pour des cons. Sans compter d'autres séquences qui n'ont pas leur place, comme le passage sur une nacelle où le héros se fait harceler de tous les côtés ; vous ne pouvez pas fuir, vous ne pouvez que gâcher vos balles en vous prenant des coups et en espérant survivre... Aucun intérêt.


Les boss, bien que variés comme je l'ai dit plus tôt, sont moyennement intéressants à combattre. Certains sont là pour mettre la pression pendant une partie du jeu, alors que d'autres donnent lieu à des affrontements purs et simples. Dans le premier cas, c'est assez réussi, dans le deuxième, c'est souvent naze. Je ne vais pas m'étendre là-dessus, mais je pense que même s'ils sont bien dessinés, ils ne vont pas me rester longtemps en mémoire. Mention spéciale à celui qui sort d'un film d'horreur japonais, j'ai bien aimé avoir enfin mon propre monstre aux cheveux gras à défoncer.


Donc pour faire simple, on progresse dans un univers qui semble intéressant mais qui est en fait cruellement vide, le tout sans prendre de plaisir à jouer. Vous comprenez maintenant où est le problème ? Le jeu n'est pas intéressant, ni à faire, ni à refaire. Le première fois, ça passe avec le plaisir de la découverte, mais le recommencer a été une torture pour moi. Je pense que ce jeu souffre de beaucoup de mauvais choix qui plombent en partie l'expérience. Exemple des ennemis invisibles : en voilà une bonne idée ! Oui, vraiment, des ennemis que l'on ne voit pas et que l'on doit détecter en se débrouillant pour mettre un obstacle entre eux et nous, genre un fauteuil roulant qu'ils poussent sans faire exprès et qui permet de les repérer. C'est oppressant, ça met dans l'ambiance, et il suffit de prévenir le joueur qu'ils sont là pour que celui-ci soit sur ses gardes et que ça évite de rendre le concept chiant. Mais alors, où est le problème ? C'est simple, les développeurs ont dû se dire que c'était trop difficile ou je sais pas quoi (alors qu'ils font des dégâts bien trop ridicules) et du coup, on en compte cinq à tout casser et ils tiennent dans un seul passage du jeu, après quoi on ne les revoit plus jamais.


Pourquoi ? Pourquoi ? J'aurais pensé qu'il y en aurait au moins dans un ou deux autres passages, mais non ! Rien ! Il faut vraiment m'expliquer. Cette manie qu'a ce jeu de montrer de bonnes idées et de ne plus du tout les exploiter ensuite est absolument rageante, on se croirait devant un épisode de SAO.


En conclusion, j'ai eu l'impression d'avoir une Ferrari avec un moteur de deux chevaux. C'est beau, ça en jette, tous les ingrédients sont réunis pour faire une tuerie... mais ça n'avance pas, c'est fade, et je sens déjà que ma mémoire est en train d 'effacer tout ça. Quinze heures de durée de vie, ça vend du rêve, non ? Sauf que ce jeu manque cruellement d'intensité. Il aurait gagné à être plus court si c'était pour le rendre moins chiant, comme quoi la longueur ne fait pas tout. Je n'en retiendrais donc pas grand-chose, car The Evil Within n'a pas du tout réussi à me plonger dans son univers pourtant attrayant, alors que je jure que j'ai essayé. Mais c'est trop vide, sans saveur, répétitif, et bourré de défauts en tout genre et de stupidités. De bonnes idées sont parsemées ici et là mais elles font pâles figures face au reste du naufrage et au final on a l'impression que c'est du gâchis de les avoir mis là-dedans.


C'est décevant, surtout que je l'attendais impatiemment. Au final, je n'ai pas eu ce que le jeu promettait, et je reste sur ma faim. Ceux qui n'y ont pas joué, libre à vous de forger votre propre avis, apparemment certains ont bien aimé et ont malgré tout réussi à ressentir quelque chose en jouant à ça ; moi, personnellement j'avais l'impression d'être mort à l'intérieur... ce qui colle plutôt bien, du coup.


Ça envoyait du lourd, mais ce sera vite oublié. Dommage.

Sebantey
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le 1 juin 2015

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Sebantey

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