7 ans et une génération de console entière sépare le premier The Last of Us de cette Part II qui était, certes, inattendue, (vu que la fin du premier épisode se suffisait à elle seule),mais à laquelle tout le monde était très pressé de jouer. C'est souvent l'effet produit dès qu'on parle de Naughty Dog, surtout que The Last of Us, ce n'est pas rien ! Un road trip survitaminé en compagnie d'un duo de personnages ultra-attachants, à l'écriture et aux visuels soignés, le tout trempé dans la mode du zombie/survival horror, comme il en pleuvait (trop) par milliers il y a 10 ans de cela. Faire une suite à ce monument de narration, c'était s'assurer une pression constante sur les épaules, avec pour objectif de faire mieux, au moins. Dans cette critique, je vais essayer de vous dire pourquoi, malheureusement, The Last of Us : Part II n'arrive pas à la hauteur de son premier volet, mais reste tout de même un grand jeu.


Tout d'abord parlons de ce qui marque direct : visuellement ça met des parpaings dans les gueules. Comme à chaque fois, Naughty Dog (qu'on appellera ND) débloque le plein potentiel de la console de Sony, en lui faisant cracher tout ce qu'elle a (surtout ses poumons), pour proposer des choses magnifiques, des décors riches jusqu'aux rides creusées de ce bon vieux Joël (plus tout jeune, il faut le dire). Mention spéciale à la performance capture qui assure des animations et des visages ahurissants, en cinématique comme en jeu. Bref, sur ce coup-là, ND est l'élève modèle au premier rang, qui prouve une fois de plus qu'une bonne optimisation permet de faire tourner tout ce qu'on veut sur n'importe quel matériel (j'ai ouï dire que la version PS4 Fat était, certes, moins jolie que sur Pro, mais tout à fait honorable et stable).


Mais on vient ici avant tout pour l'histoire, et dans cette suite, ND nous offre un spectacle de funambule remarquable. Dans le premier épisode, Ellie était un personnage principal mais surtout un personnage "objet de quête", on devait l'amener d'un point A à un point B. Le twist malin de TLOU, c'est que Joël (et donc le joueur) finissent par avoir de l'empathie pour elle, au point de l'extraire de cette condition de personnage fonction en faisant le choix égoïste de lui laisser la vie au détriment de son objectif (une sorte de génie de la lampe libéré). Ellie est donc devenue son propre personnage, mais ère sans but. Cette Part II est donc là pour lui en donner un, et si vous avez vu au moins une pub du jeu, vous savez ce que c'est : la vengeance.


Je vais éviter de rentrer dans toutes formes de détails sur les raisons pour lesquelles Ellie veut se venger mais c'est suffisamment grave et violent pour qu'elle ait une haine grosse comme ça. L'occasion pour ND d'exploiter au maximum la violence de cette vengeance. Quand je parle de violence, je parle de celle qui peut être dur à regarder et à entendre, car elle nous semble trop vraie. Les meurtres nous font tourner de l’œil, avec des mises en scènes brutes et froides, qui nous glacent devant notre écran, comme la mort des différents personnages que vous croiserez (encore bien plus que dans le premier). Je me suis même surpris à vraiment déglutir quand j’ai entendu une pauvre femme agoniser pendant 10 bonnes secondes après lui avoir méchamment éclaté la jambe avec un fusil à pompe. Et c'est un exemple parmi tant d'autres, surtout que l'IA est très bavarde et s'exclamera régulièrement pour vous prendre à revers, lorsqu'il y a perte d'un membre de son équipe (ou d'un membre tout court). C’est là toute la différence avec la violence d'un DOOM Eternal (par exemple), qui se placera dans l'abus pour désamorcer toute immersion et tout réalisme possible (et rend le tout très cathartique).


Mais est-ce suffisant pour rendre son œuvre subversive ? Il faut dire ce qui est, TLOU2 est, certes, violent, mais peut-être un peu trop sur les bords. Certaines choses deviennent presque normales et se désamorcent d'elles-mêmes, provoquant parfois cet effet DOOM. On se dit parfois que tout de même, on n’était peut-être pas obligé d'aller si loin pour tuer un personnage. Même l'implication du joueur via quelques QTE manque parfois le coche, on aurait aimé qu'elles ne soient pas tout le temps obligatoire, histoire de renforcer cette violence à laquelle on a recourt dans certains moments de précipitations et de choix immédiats. Il y a une sensation de trop qui est clairement perceptible sur la fin, comme après un buffet volonté.


C'est bien là, pour moi, le plus gros problème de TLOU2 : on a toujours la sensation de voir une histoire se dérouler sous nos yeux sans qu'aucun recul ne soit pris. Ce ne sont pourtant pas les moments de répits qui manquent dans cette aventure, surtout avec son pacing très "Naughtydoguien" : discussion avec un duo de personnages, exploration, bagarre, repos et rebelote. Encore que, soudain, le jeu prend des petits airs d'open world, en vous demandant d'explorer une zone à la recherche d'indices, de ressources et d'équipements, le tout dans un Seattle foisonnant de plantes vertes et de cadavres de voitures. Une idée qui semble isolée au milieu du jeu, comme un détour au travers de ce chemin aux barrières pourtant visibles et assumées. On pourrait presque croire à une trace d'un passé différent. Et si TLOU2 avait été un vrai open world ? Une question à laquelle on n'aura surement pas de réponse tout de suite, mais qui aurait peut être pris son sens dans l'aventure d'Ellie.


Malgré sa durée de vie un peu trop longue pour son propre bien (cet épilogue, mon dieu), il n’en reste pas moins que The Last Of Us Part II reste un jeu plutôt poignant et enivrant, qui arrivera régulièrement à nous prendre en traître avec son scénario. Les personnages sont divers et variés (on veut plus de gens avec du caractère et des designs atypiques !) et, à part quelques couacs développés plus haut, le jeu arrive à moderniser son gameplay en rajoutant des mécaniques, et à renforcer ce qui était déjà vieillot en 2013. Bref, vous en aurez largement pour votre argent et malgré sa peine à faire mieux que son prédécesseur au niveau de l'écriture, il lui tient tout même la barbichette et arrive à éviter le total copié/collé et ça, peu de gros studio l'aurait tenté.

Xavier_Larrey
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le 26 juin 2020

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