Ce Tears of the Kingdom a un goût vraiment étrange. Je suis partagé entre deux sentiments. D’un côté, j’ai une admiration sans faille pour les développeurs de Nintendo concernant les prouesses techniques effectuées sur cette petite cartouche de Switch. Mais d’un autre côté, j’ai un véritable sentiment de redite vis-à-vis de Breath of the Wild, un sentiment qui m’a hanté tout le long de mes cent heures de jeu. Et au risque d'apparaître comme le grincheux de service, cette redite, moi, elle m’a franchement agacé.

J’en parlais à des amis et voilà ce qu’on m’a répondu : le jeu s’est toujours vendu comme une suite directe de BotW, Nintendo n’a jamais annoncé une nouvelle carte ou même une nouvelle formule, il faut accepter le jeu comme tel parce que c’est ainsi qu’il s’offre à nous. Ce qui m’étonne encore plus, c’est que l’ami qui m’a dit cela est un fan de Zelda depuis belle lurette et que son épisode favori se trouve être…Majora’s Mask.

Majora’s Mask qui a su reprendre toutes les idées et mécaniques d’Ocarina of Time pour les mener encore plus loin. Majora’s Mask qui est une suite directe jusqu’à reprendre le moteur graphique de son prédécesseur. Majora’s Mask qui propose une continuité formelle avec son grand frère tout en s’imposant comme un volet radicalement différent et surtout unique en son genre. Quelque part, c’est ainsi que je l’attendais ce Tears of the Kingdom. Je l’attendais non pas comme un BotW 2.0 mais comme un Tears of the Kingdom à part entière. Mais encore une fois, selon mon ami, Majora’s Mask, c’était il y a vingt ans, c’était un ovni, on ne le refera plus.

Mais justement si ! Parce qu’à bien y réfléchir. A part quelques volets qui ont voulu jouer la sécurité (Twilight Princess en tête), presque tous les jeux de cette licence étaient des ovnis vidéoludiques au moment de leur sortie. Et ce, dès le premier The Legend of Zelda paru sur NES en 1986. La méthode de Nintendo a toujours été de prendre les attentes du public à contrepied. On attendait de Majora’s Mask quelque chose d’aussi épique et glorieux qu’Ocarina of Time, on a eu un épisode sombre et intimiste. On attendait de The Wind Waker ce que la cinématique du Zelda Spaceworld en 2000 nous vendait, et on a reçu l’un des jeux les plus mignons et poétiques du médium vidéoludique. Et pareil pour BotW qui, au moment de sa sortie, avait brisé toutes les règles de la licence pour proposer un monde ouvert foisonnant, exaltant et ultra-libre. Alors certes, ce n’était pas au goût de tout le monde, moi-même, je rechigne encore sur certains éléments de BotW et attendais naturellement de TotK qu’il corrige certaines erreurs du passé (donjons, boss, redondance des quêtes). Mais j’attendais aussi qu’il aille au-delà d’une simple correction et s’impose comme un Zelda à part entière.

Ce qu’il ne fait…absolument jamais.

La preuve à mon sens, c’est qu’il sera très difficile, voire quasi impossible de revenir sur BotW après avoir joué à TotK. Parce que factuellement, TotK est meilleur…plus beau, mieux calibré, plus varié, mieux pensé, etc. Mais il n’a pas cette nouveauté qu’apportait son prédécesseur. A vrai dire…il n’apporte rien de neuf à la licence. C’est là où le bât blesse. Majora’s Mask avait été suffisamment bien pensé pour ne pas envahir l’aura d’Ocarina of Time et de le rendre dispensable. Jouer à ces deux œuvres, c’est vivre deux expériences de jeu radicalement différentes. Jouer à BotW puis à TotK, c’est sensiblement la même chose avec quelques différences.

Et que la carte soit la même, à la limite, je peux encore y consentir. On est dans la même timeline, le même Hyrule, mais par pitié, changez au moins la structure de l’aventure principale. Il y a d’abord ce tutoriel affreusement long où l’on doit, encore une fois, atteindre quatre sanctuaires qui nous font expérimenter les nouveaux pouvoirs de ce jeu. Alors certes, ces nouveaux pouvoirs sont très chouettes. J’avais beaucoup de mal à construire des machines avec Emprise mais avec le temps, je m’y suis fait. Finalement, même si j’en avais chié avec ce tuto, je me disais qu’une fois cela terminé, je pourrai expérimenter ces nouvelles fonctionnalités dans un open world similaire à BotW, certes, mais un tant soi peu retravaillé pour s’accorder avec mes pouvoirs inédits…

Mon cul !

Quand je suis arrivé sur la terre ferme, qu’ai-je fait ? J’ai marché ! J’ai utilisé ma paravoile. Bref, j’ai fait tout ce que je faisais déjà dans BotW. Et quelle horreur m’a submergé quand j’ai découvert que suite à ce tuto de l’enfer, je devais de nouveau visiter les quatre peuples de Hyrule, résoudre leurs problèmes, faire un donjon en vingt minutes, acquérir un nouveau pouvoir auprès des sages et ensuite, aller foutre une branlée à Ganondorf. ENCORE ? Non mais sérieux ! Vous aviez pas plus innovant à nous proposer comme structure dans votre quête principale ? Et j’entends bien que la quête principale n’est qu’une infime partie de ce que le jeu a à offrir. Mais même ! On parle de la quête principale ! Ça devrait être la plus palpitante, celle qui provoque en moi le plus d’émotion, la plus difficile, la plus originale. Or, refaire exactement le même cheminement que dans BotW, c’est de la flemmardise assumée de la part des développeurs ! Et ce n'est pas tant le fait qu'il faille aller voir chaque peuple un par un pour résoudre leurs problèmes, ça a toujours été ainsi dans les Zelda. Ce que je reproche véritablement ici, c'est que c'est zones, on les connaît déjà ! On connaît déjà les personnages et leurs histoires, on connaît ces villages, bref, on ne découvre rien !

Parce que mine de rien, on l’a attendu ce jeu. Six ans ! Alors oui. Quelque part, je les comprends ces six ans. La physique du jeu est irréprochable, ça beug jamais, il y a trois strates au monde (ciel, terre, souterrains) toutes très larges. Mais six ans, c’est aussi un monde souterrain très peu varié, un bestiaire identique à BotW a l’exception de deux ou trois nouvelles créatures. Bref, six ans pour une bonne physique, mais en six ans, ils auraient pu réfléchir à de nouvelles idées pour…je sais pas, imaginer de nouveaux donjons ?

Mais non, on a préféré nous ressortir 152 sanctuaires (dont un tiers vous offre directement son trésor). On a préféré ressortir mille korogus. On a préféré ressortir les mêmes tenues. On a préféré reprendre la même structure narrative de la quête principale à l’exception du dernier tiers qui est un tout petit peu plus original. Bref, on a préféré se reposer sur les acquis et voilà.

Mais pour moi, ça ne passe pas.

Alors certes, je dois l’admettre, j’y ai passé du temps sur ce jeu. Et en presque 100h, je n’en suis qu’à 51%, ce qui laisse tout de même deviner la masse de choses à faire et le nombre foisonnant de quêtes annexes. Mais pour moi, tout est une histoire de dosage. J’aurai largement préféré un équilibre entre les quêtes annexes et la quête principale. Un équilibre entre les sanctuaires et les donjons. Bref, j’attendais ce genre de correction de la part de TotK vis-à-vis de BotW. Or, la décision chez Nintendo a été de faire exactement l’inverse, de plonger tête la première dans ce que je reprochais justement à BotW et de simplement rétorquer que « c’est la formule, c’est comme ça, tu l’accepte ou tu la quitte ». Pour les fans qui ont découvert Zelda avec BotW, c’est génial. Pour le vieux fan un peu con que je suis et qui aime bien Zelda pour des raisons précises et qui ne les retrouve pas ici, c’est vraiment regrettable.

Après, ceci dit, j’ai passé 100h dessus et je ne pense le lâcher que quand j’aurai atteint peut-être les 75%, ce qui laisse deviner un certain amusement chez moi vis-à-vis de ce jeu. Mais encore une fois, je m’amuse, j’ai du plaisir à revenir dessus, mais il manque toujours l’essentiel. Il manque ce qui faisait un grand Zelda : son unicité. J’entends bien que la formule initiée par A Link to the Past et transposée en 3D par Ocarina of Time montrait ses limites et se répétait. Et je continue de penser que BotW a été une vraie bonne chose pour la saga. Mais j’avertis simplement d’une chose…qu’on ne répète pas les erreurs du passé. Que Nintendo ne se repose pas sur ses lauriers en se disant que sa formule est parfaite et nous ressortira un Zelda de la même trempe.

The Legend of Zelda a toujours su nous surprendre alors voyons ce que cette licence nous proposera à l’avenir mais moi, je ne demande qu’une chose…d’être surpris.

James-Betaman
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs jeux Zelda, La collec de jeux vidéos de James Betaman et Game Over 2023

Créée

le 2 nov. 2023

Critique lue 83 fois

4 j'aime

3 commentaires

James-Betaman

Écrit par

Critique lue 83 fois

4
3

D'autres avis sur The Legend of Zelda: Tears of the Kingdom

The Legend of Zelda: Tears of the Kingdom
Leon9000
9

L'envol du Dragon

J’ai rapidement compris que Tears Of The Kingdom ne serait pas un de mes Zelda préférés.Drôle d’entrée en matière, je sais, mais la question est après tout légitime (et même instinctive) lorsqu’une...

le 24 mai 2023

39 j'aime

5

The Legend of Zelda: Tears of the Kingdom
Ckai
10

Le Zelda qu'on attendait tous (no spoil)

Je craignais d’avoir du réchauffé et comme beaucoup d’entre nous je ne voulais surtout pas avoir un BOTW 1.5 ou une impression de DLC à 60 balles. Les trailers me donnaient envie : ok on voit le...

Par

le 20 mai 2023

31 j'aime

2

Du même critique

Coupez !
James-Betaman
4

Tout l'art d'être critique (ou pas)

Le principe même de ce remake avait de quoi intriguer. Ce n’était pas une première pour Michel Hazanavicius de se réapproprier une œuvre filmique afin de lui insuffler un vent de modernité (et son...

le 29 janv. 2023

53 j'aime

28

After - Chapitre 1
James-Betaman
1

Le digne successeur de 50 Nuance de Grey... On pouvait pas espérer mieux

Hier soir, je me suis couché en me disant que la nuit porterait conseil pour ma critique d'After. Tu parle ! J'ai passé la nuit à cogiter dans ma tête, cherchant un truc bien à dire sur ce...

le 18 avr. 2019

52 j'aime

12

The Kissing Booth
James-Betaman
1

La pire représentation de la jeunesse que j'ai pu voir dans un film

J'ai eu une discussion avec un ami sur beaucoup de choses, notamment sur la société et les jeunes. Cet ami, qu'on va appeler Jack, parce que ça sonne bien, m'avait livré ce qu'il considère comme...

le 15 août 2018

46 j'aime

15