Seconde tentative dans l'univers impitoyable du RPG pour le studio polonais Reality Pump. Après un premier essai qui a eu le mérite de laisser une trace chez tous les joueurs, soit par ses bonnes idées, ses décors variés et son côté épique grâce à ses immenses dragons, soit par sa VF d'une nullité affligeante, son gameplay pas toujours pratique, son grosbillisme outrancier, ses grottes copiées collées, ses quêtes pas folichonnes et ses bugs à gogo. Surtout, ce qui avait fait débat, c'est l'étrange capacité du studio à mentir aux joueurs quant au contenu futur du jeu, à l'époque, plusieurs villes n'étaient que des fakes dans lesquelles il était impossible de pénétrer. Two Worlds II continue avec les promesses, voyons s'il faut cette fois-ci les croire.

« Cinq ans après... »

Les faits ont lieu cinq ans après ceux du premier volet. Les orcs se sont fait laminer par les pouvoirs phénoménaux de Gandohar. Vous croupissez dans les cachots du mage depuis tout ce temps, en compagnie de votre sœur que vous recherchiez désespérément à l'époque. Gandohar puise votre énergie vitale et la transmet à votre sœur pour que se réveille en elle le pouvoir du Dieu Aziraal et ainsi récupérer ce pouvoir. C'était sans faire les derniers orcs d'Antaloor et notamment Dar Pha, une demi-orc sexy qui vient vous libérer en compagnie de ses camarades. Malheureusement, vous ne pouvez libérer Kyra et c'est à nouveau votre but dans ce nouvel opus. Mais pas seulement, vous allez surtout en apprendre davantage sur le passé de Gandohar et comprendre dans quelles circonstances Gandohar est ce mage si puissant et violent.

Avant de découvrir tout cela, il faut créer son avatar, il s'agit forcément d'un homme dont vous pouvez seulement changer les caractéristiques physiques. Les réglages sont nombreux mais le choix pour chaque l'est moins. Vous ne choisirez pas une classe ni même des compétences de base. Vous êtes entièrement libre sur le sujet. Pour améliorer votre personnage, vous devez travailler sur deux axes, vos caractéristiques : endurance, force, dextérité et magie, qui influencent votre santé, votre charge maximale, vos dégâts à main nue ou au corps à corps, vos dégâts avec un arc et enfin votre magie. Vous disposez ensuite des compétences, celles-ci sont toutes débloquées avant le second chapitre du jeu, du moins, si vous êtes tombés sur tous les livres d'apprentissage. Elles sont nombreuses et ne pourront pas être toutes exploitées. Vous retrouvez les habituelles compétences comme votre rapidité à bander un arc, votre aptitude à poser un piège, à crocheter une serrure, à résister aux blessures, à vous régénérez quand vous n'êtes pas en combat. D'autres, moins habituelles tiennent une place prépondérante, c'est notamment le cas de la forge qui se divise en plusieurs compétences, votre aptitude à faire fusionner des cristaux qui améliorent votre équipement, mais encore faut-il savoir incruster ces cristaux dans votre équipement justement. Et cela dépendra aussi de la nature de ce dernier, vous ne travaillez pas les armes comme vous travaillez le cuir ou l'acier. Forger ne consiste donc plus à fusionner à l'infini des armes équivalentes, il faut désormais les casser pour en récupérer la matière première, acier, bois, fer, cuir, côte de maille... et retravailler votre équipement avec ces matériaux dans une certaine limite qui dépend de vos compétences dans le domaine. C'est nettement plus réaliste, dommage que l'alchimie n'ait pas profité d'un système équivalent, dans Two Worlds II, votre compétence en alchimie n'aura d'influence que sur la durée et la puissance de votre potion mais l'effet est si minime que vous pourrez facilement vous en passer. Enfin, il est regrettable que nous puissions faire tout cela sans aucun équipement et n'importe où, l'immersion en prend un coup.

« Une difficulté présente mais mal dosée »

Ces petits défauts sont les prémices d'une difficulté présente mais mal dosée. Si durant les deux premières dizaines d'heures, vous sentirez une montée en puissance qui fait plaisir à voir, vous serez aussi stupéfait de l'équilibrage du jeu, rapidement, vous tailladerez un rhinocéros aussi facilement qu'un babouin. A l'inverse, une fourmi géante pourra vous clouer sur place. Mais rapidement, plus rien ne vous fera peur, du moins, jusqu'à la confrontation finale. L'IA faiblarde vous fait profiter parfois involontairement de ses errements, un pathfinding réduit, un cercle d'action limité, un blocage dans un rocher sont autant d'exemples qui réduisent considérablement l'ambiance des combats. Parfois, vous en profiterez volontairement, la trame ayant sa part de linéarité, il est très tentant de grimper sur une pierre pour décocher ses flèches sans que l'adversaire ne puisse nous attaquer plutôt que faire demi-tour et revenir quand nous avons le niveau.

Dans l'ensemble, Two Worlds II est même assez linéaire, comprenez par là que le monde se divise en quatre îles qui vont progressivement être débloquées. Vous commencez par Alsorna où vous réaliserez le tutorial avant d'aller dans la savane d'Erimos, la seule île qui donne une sensation de liberté, du moins jusqu'à ce que vous découvriez que la moitié de l'île vous est interdite tant que vous n'avez pas suffisamment avancé dans la trame principale. Il y a en fait de nombreuses interdictions comme celle-ci qui vous empêche de faire toutes les quêtes d'une guilde avant de continuer la partie. Ceci dit, l'intégration des guildes n'est pas ce que nous avons vu de mieux, souvent, vous ne traitez même pas avec eux mais ramassez des courriers de missions sur divers tableaux. Une fois reconnu dans la guilde, vous n'aurez aucun autre avantage que celui d'avoir des tarifs plus attractifs. Nous sommes loin de l'excellent système de guildes des Elder Scrolls. Hormis les courses à cheval en contre-la-montre, cheval désormais maniable, il n'y a rien de neuf. Les quêtes sont en dents de scie, tantôt intéressantes, jouer de la musique pour ouvrir les portes, la croisade, les parapluies, tantôt d'une désespérante nullité, ramasser trois plantes à autant de coin de l'île alors que vous possédez déjà tous les ingrédients dans votre sac, ramasser des documents qui se sont envolés, battre un mob par-ci, un mob par-là. En début de partie, le bilan est vraiment positif, mais le studio a ensuite succombé à la tentation de multiplier les quêtes inutiles pour combler. Il faut un peu plus de 30h pour finir le jeu solo à 100%, au début vous ferez les quêtes annexes qui profitent de votre découverte des lieux avant de vous consacrer à la trame principale qui gagne en intérêt à partir de la seconde île, soit à la moitié du jeu, avant de retomber comme un mauvais soufflet sur la fin, probablement dû à la dernière île, Eikronas, qui n'est qu'un grotesque fake sur laquelle vous passez tout au plus cinq heures de jeu.

« De nombreux points noirs »

Mais Two Worlds II pêche encore plus sur son immersion que sur ses quêtes, s'il y a quelques détails amusant comme pouvoir jouer de la musique en groupe avec le même fonctionnement qu'un Guitar Hero, ou voguer sur les flots avec votre bateau. Vous aurez droit à une VF encore plus ratée que dans Two Worlds, dès le prologue, votre héros arrivera devant une grille fermée et braillera « Escalier » nous ne savons pas trop pourquoi avant de nous souffler « Yeah ! » à chacun de ses sauts ou des « je t'avais prévenu » chaque fois qu'il tue sournoisement quelqu'un. Les voix des personnages donnent l'impression d'être sorties tout droit d'une mauvaise parodie. Heureusement, la version anglaise est meilleure et vous pourrez utiliser des sous-titres français assez facilement, mais alors c'est les textes qui font défaut, certains défilent à la vitesse de l'éclair et sont bourrés de fautes d'orthographes ou de frappes, d'autres ne traduisent pas réellement ce qui est dit, c'est notamment gênant lorsque nous découvrons la vie passée de Gandohar, les sous-titres omettant certains détails. Les dialogues est une part importante d'un RPG et Two Worlds II est loin de briller dans le domaine. Reality Pump a bien tenté de donner au joueur une sensation de choix entre différents camps, dans certains cas, c'est un mensonge, vous pourrez avoir envie de massacrer votre interlocuteur mais rapidement, les dialogues vous ramèneront sur le droit chemin. D'autres fois, vous pourrez effectivement l'attaquer et alors choisir un camp mais il n'y a en définitive aucunes conséquences à la rare exception d'une quête supplémentaire.

Autre point noir, l'exploration, d'une part car de nombreux lieux sont verrouillés mais d'autre part car cela n'apporte rien, certaines grottes sont entièrement vides jusqu'à ce qu'une quête active les lieux. Il y a peu de donjons ou de grottes qui ne soient pas liées à une quête, se promener ne nous amènera jamais à découvrir un lieu unique avec un level design vraiment particulier qui ferait que vous vous en souviendrez longtemps comme nous pouvons en voir dans un Fallout New Vegas ou un The Witcher. Au contraire, il n'y a que les villes qui arrivent à nous enlever ce sentiment de déjà-vu. À commencer par Hatmandor et son style oriental vraiment réussi, ainsi que son quartier pauvre de Cheznaddar. Plus tard, c'est l'ancienne ville d'Ashos qui nous encouragera à continuer la partie.

« Un gameplay correct et fastidieux à la fois »

À moins que le gameplay vous pousse à bout. Les objets dans l'inventaire sont affichés dans des cases énormes et les armes en double ne sont pas mises ensemble contrairement aux ingrédients. Rapidement, le tout devient très confus, encore plus à chaque fois que vous ramasser le stuff de votre victime car vous ramasserez tout et devrez faire le tri ensuite. Un tri difficile car il n'y a même pas de rangement par type, les bagues et les amulettes sont éparpillées entre vos armures. Cette confusion atteint son paroxysme avec la possibilité de vendre les objets liés aux quêtes. Pour l'exemple, j'ai vendu avec mes innombrables armes ramassées, une hache que je devais tester, sans que le jeu ne me donne aucun avertissement, le temps que je m'en rende compte, je ne savais plus quel marchand j'étais allé voir, de toute façon, le cabas des dits marchands est remis à zéro régulièrement.

Pire que ça, le studio a trouvé bon d'associer plusieurs actions à une même touche comme sauter ou activer un coffre ou une conversation. Ou courir avec la discrétion et la parade. Un 3 en 1 clairement inefficace en combat. C'est dommage de faire des bourdes pareilles alors que Two Worlds II recèle quelques détails vraiment bons, comme son mini-jeu de crochetage, la musique que nous avons déjà signalé, la navigation néanmoins inutile car le vent ne tourne jamais et la seule île vers laquelle nous pouvons aller sans galérer nous est interdite. Et enfin ses jeux de dés cependant moins efficace que celui de The Witcher du fait qu'aucune quête n'est liée à ce petit « plus ».

« Un mode village rafraîchissant »

En marge du jeu solo, le studio a décidé de retenter l'aventure du multijoueur, seulement, c'est essentiellement une succession de quêtes sans lien à jouer à plusieurs et qui n'apportent rien à notre expérience de jeu solo. Il faudra néanmoins les réaliser si vous voulez récupérer les fonds nécessaires pour vous lancer dans le mode le plus intéressant du multi, le mode village. Après avoir ramassé 10 000 auras, vous pourrez investir dans votre village, vous avez 25 terrains disponibles pour construire ferme, élevage, plantation, temple, fabricant d'arcs, corps de garde, mines, tour de mage, forge, maisons pour loger tout ce beau monde et j'en passe... Bien entendu, cet argent ne sera pas suffisant et il en faudra toujours plus. Le jeu nous encourage même à choisir des spécialités en upgradant les bâtiments tout en veillant à ne pas sombrer dans un déficit dont vous ne ressortirez pas. Pendant ce temps là, vous pourrez faire visiter votre village aux autres joueurs et ils pourront vous acheter les objets qui y sont fabriqués et vice versa. De quoi vous occuper une dizaine d'heures.

« Des défauts qui cachent les qualités, la concurrence qui cache Two Worlds II »

Finalement, Two Worlds II est l'archétype du jeu en dents de scie. Des tonnes d'annonces qui finissent en mensonges, la faute certainement à des délais à respecter et un budget serré. Un jeu correct caché par un enrobage difforme, sa VF exécrable, ses quêtes qui deviennent vite ennuyantes et sa fin qui vient très abruptement, l'exploration inexistante et une linéarité de plus en plus présente au fil de la partie. Pourtant, fallait-il encore le prouver, Reality Pump maîtrise certaines parties de son sujet, d'abord l'aspect RPG avec un panel large et maîtrisé de compétences, un level design et une immersion réussis pour les villes seulement, un bestiaire complet et des graphismes tout à fait correct malgré quelques égarements au niveau des textures, l'absence d'effets météorologiques et un abus de blur. Le studio a su aussi corriger quelques défauts du précédent volet, les personnages sont moins robotiques à l'exception des séquences de dialogues, le cheval est nettement plus maniable, les combats sont relativement dynamiques notamment grâce aux compétences actives qui permettent de faire des attaques spéciales comme lancer du sable dans les yeux de votre adversaire ou lancer une attaque psychique ou encore décocher plus de cinq flèches en un seul tir. Le multi est amusant grâce au mode village mais risque d'être lassant assez rapidement, le village devenant facilement autonome. Two Worlds II n'est pas un mauvais jeu mais manque cruellement d'attirance, nous n'avons pas l'impression d'être dedans, aucune séquence ne nous laissera un souvenir indélébile. Le studio n'arrive pas à mettre en avant ses atouts, les détails restent des détails et ne prennent à aucun moment une plus grande envergure. La finition bâclée réduit considérablement le plaisir de jouer, avant de s'attarder sur des petits compléments inexploités au final, Reality Pump devrait se concentrer sur l'essentiel d'un RPG. Dommage, car comme pour le premier, il y a du bon grain au milieu de l'ivraie.
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le 2 déc. 2010

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