Trop tard pour être grand, trop sincère pour être oublié

Je ne pense pas que Vexx soit un grand jeu. Ni même un bon jeu, dans le sens strict.

Et pourtant, j’y repense souvent (surtout après avoir découvert Soul reaver et son saut chargé vers le haut). C’est le genre de jeu qui laisse une trace bizarre dans le cœur, à savoir un mélange de nostalgie, de frustration, de fascination, et d’un peu de gêne aussi, comme une vieille photo d’ado qu’on ne peut pas s’empêcher d’aimer malgré les cheveux mal coupés.

Je l’avais découvert un peu par hasard, sur ma vieille gamecube chez un cousin, où je commençais à m’ouvrir au platformer 3D, bien au-delà des Mario 64 ou des Jak & Daxter. Vexx, lui, m’a parlé à sa manière, par son ambiance étrange, ses environnements semi-ouverts, son petit goût de jeu oublié qui avait pourtant essayé quelque chose.

Il y a tout d’abord une chose qu’on ne peut pas lui enlever : son gameplay est plutôt solide. Le personnage se déplace bien, avec une panoplie d’actions simples mais efficaces, saut mural, double saut, dash, uppercut, attaques chargées. Il y a un vrai plaisir de mobilité, un feeling "physique" dans la plateforme. Dans certains niveaux, on enchaîne les rebonds et les montées avec une fluidité presque jouissive. C’est peut-être la plus grande force de Vexx, ce feeling de contrôle quand tout s’aligne.

Et il faut avouer que le jeu tournait bien 60 fps constants sur GameCube, ça faisait plaisir à l’époque. Ça renforçait cette sensation de fluidité, d’agilité dans les déplacements. C’est presque dommage que la caméra vienne flinguer tout ça par moments. Elle est capricieuse, hésitante, et surtout, elle ne suit pas bien quand l’action devient verticale. Dans un jeu de plateformes, c’est un problème qui revient souvent te mordre les chevilles.

Visuellement, Vexx propose quelque chose d’unique, mais pas forcément maîtrisé. Il y a une vraie proposition artistique, une espèce de monde dark fantasy sous LSD, avec des environnements qui oscillent entre cauchemar onirique et design de parc d’attraction. Certaines zones sont franchement cool à explorer, je pense notamment au niveau basé sur les horloges ou celui dans l’eau, et le cycle jour/nuit, même s’il n’est qu’esthétique, donne une respiration bienvenue. Mais les textures sont souvent pauvres, le moteur peine, et cette DA bancale finit par donner une sensation d’inachevé. Comme si l’univers avait été pensé, mais jamais peaufiné.

Là où Vexx rate vraiment le coche, c’est dans son absence totale d’attachement narratif. Le scénario est prétexte, les dialogues sont rares, les enjeux flous. Tu traverses des mondes, tu cherches des cœurs (les “Wraith Hearts”), tu tues des ennemis… mais pourquoi ?

Le jeu ne se soucie jamais vraiment de t’impliquer émotionnellement. Résultat ? On joue pour le gameplay, point barre. Et c’est dommage, car une once de narration aurait peut-être aidé à mieux digérer la répétitivité des objectifs, comme l'avais fait Soul Reaver du quel il a l'air de terriblement s'inspirer...

Et cette répétitivité, parlons-en. Les niveaux sont jolis, oui. Mais les objectifs ? Assez redondants... On te demande trop souvent les mêmes choses, les mêmes challenges, les mêmes mécaniques recyclées. Et le hub central, qui aurait pu servir de liant ou d’espace de progression, est au final sous-exploité, presque décoratif.

Ce qui me laisse donc avec un sentiment très ambivalent. Parce que j’ai sincèrement apprécié Vexx. J’ai aimé ses mondes, ses mouvements, sa façon de m’inviter à l’exploration. Il a clairement contribué à me faire aimer ce type de plateforme semi-ouverte, avec des niveaux où tu peux un peu aller où tu veux et revenir plus tard. C’est un jeu que j’aurais adoré à dix ans, et que j’ai fini par respecter aujourd’hui malgré tout ce qui cloche.

Mais je peux pas fermer les yeux sur ce qu’il est... Un jeu mal rythmé, maladroit, avec une caméra pénible, une narration absente et une originalité parfois trop timide. Il aurait pu être bien plus qu’un simple “mélange de Mario et Banjo-Kazooie à la sauce dark”. Il aurait pu être une vraie proposition. Au final, c’est juste un souvenir agréable d’un jeu qui aurait voulu mieux faire.