Dans les années 90, je ne possédais sur NES à l'époque que quatre jeux, à savoir Super Mario Bros, Popeye, Megaman 2 et Zelda II: The Adventure of Link. Je m'étais acheté ce dernier (d'occasion) précisément parce que j'y avais joué chez un copain (qui était fan) et que j'avais adoré. Lorsqu'on possède peu de jeux, a fortiori à cette époque, on insiste, on persiste, on explore, même lorsqu'on est bloqué très longtemps. Et comme nous étions plusieurs amis sur ce jeu, nous progressions à plusieurs, en nous refilant mutuellement des astuces dès que nous découvrions la manière d'avancer, un nouveau secret, une nouvelle technique, etc. C'était aussi une époque où il n'y avait pas Internet et où, à défaut de guide, nous nous servions beaucoup du bouche à oreille.


Il faut aussi savoir qu'à cette époque, jouer à certains jeux vidéo pouvait être un investissement personnel. Nous redessinions la carte, nous notions sur des papiers les plans des donjons, nous nous servions de la notice (indispensable dans bien des jeux de l'époque, on a tendance à l'oublier), nous réfléchissions à toutes les possibilités, nous cherchions les traductions des mots en anglais dans le dictionnaire, ou demandions à nos parents, nous discutions pendant des heures et des heures des techniques et des hypothèses pour se débloquer, etc. Nous faisions quelque chose qui semble apparemment impensable à beaucoup de joueurs aujourd'hui : nous faisions des efforts. Oui, la progression dans un tel jeu se méritait, et cela nous mettait d'autant plus en joie (et en fierté) dès lors que nous découvrions quelque chose de nouveau. Un simple nouveau sprite, un nouvel environnement représentait un bonheur incommensurable. Phénomène qui peut être difficile à comprendre pour ceux qui n'ont pas connus cette époque.


Oui, Zelda II est un jeu difficile. Comme beaucoup de jeux de l'époque. Mais sur celui-ci, grâce à la pile de sauvegarde, on pouvait se permettre d'insister, car contrairement à bien d'autres jeux difficiles de cette époque, une fois les trois vies épuisées, tout ne reprenait pas totalement à zéro. Pour moi, la difficulté de ce jeu était une qualité. Je me souviens très bien que ce que je n'aimais pas c'était les jeux faciles, parce que j'avais l'impression de "ne pas en avoir eu pour mon argent". Certes, ce n'était pas toujours moi qui les payait, mais on avait si peu de jeux à l'époque, qu'avoir fait le tour d'un jeu trop rapidement était extrêmement décevant. À côté de ça, Zelda II apparaissait comme un jeu extrêmement riche, pleins de mystères et de secrets cachés, ce qui le rendait particulièrement excitant.


Alors qu'est-ce qui fait que ce Zelda est un chef d'oeuvre ? En voici d'après moi les principaux éléments, qui, ensemble, font de cet opus un jeu qui restera à jamais gravé dans ma mémoire :



  • L'ambiance. Même si la quasi-totalité du système de jeu est différent de l'opus précédent, on retrouve un peu l'esprit du premier Zelda (autre chef d'oeuvre) dans l'ambiance qui se dégage du jeu, caractérisée par une certaine sobriété. L'ambiance est d'après moi la chose la plus importante pour la cohésion d'une série. Et ceci a été trahi dans A Link to the past et encore plus dans Ocarina of Time.

  • Un héros évolutif (dans une relative liberté par rapport à cette évolution), avec le système d'expérience, d'apprentissages de magies, d'apprentissages de nouveaux mouvements... voici quelque chose que j'appréciais particulièrement.

  • L'originalité. Il s'agit d'un mariage plutôt unique d'aventure, d'action en temps réel, de plateforme et de jeu de rôle. Énorme prise de risque. J'appréciais beaucoup le fait de pouvoir contrôler Link de côté comme dans un jeu de plateforme (genre dominant à l'époque, celui que je préférais), mais sans pour autant qu'il s'agisse d'un jeu de plateforme totalement linéaire. J'appréciais aussi ce système singulier de double phase carte/action, qui était en même temps aléatoire et dans une certaine mesure évitable, il donnait une certaine adrénaline.

  • Le gameplay. La maniabilité est excellente, précise, Link répond à merveille, il est très agréable à manier, surtout avec l'apprentissage des nouveaux mouvements. C'est une chose qui était quand même assez rare à l'époque.

  • Les villages, avec les PNJ, les dialogues, les énigmes, les quêtes liées aux personnages, etc... Certes aujourd'hui c'est banal dans cette série, mais à l'époque...

  • La technicité. Outre les énigmes, la difficulté du jeu vient du fait qu'il est technique. Il demande un certain "skill", il nécessite que le joueur apprenne à maîtriser les techniques, améliore sa technicité. J'aime sentir dans un jeu que je progresse, que j'apprends à maîtriser des techniques. Je trouve ça génial qu'un jeu de type aventure-RPG puisse avoir cette dimension technique.

  • La musique, en particulier celle des donjons, qui est devenue culte.

  • Les labyrinthes. Étant gamin, j'adorais des labyrinthes et le fait que certaines parties du jeu, par exemple les donjons, soit labyrinthiques me mettait vraiment en immersion totale. Je ne suis d'ailleurs pas certain que j'aurais préféré avoir une carte. Car le fait de pouvoir se perdre faisait pour moi aussi partie du jeu. Avec la musique, cela donnait d'ailleurs aux donjons un cachet particulier que j'aimais beaucoup, surtout associé au fait que tout cela se passe sous-terre.

  • La difficulté, qui représentait tout simplement un challenge motivant et qui assurait la durée de vie, autre gros point fort du jeu... et pour moi l'un des critères les plus importants pour juger un jeu à l'époque.

  • Les combats au corps à corps contre les chevaliers. Personnellement, je trouvais excellent ce type de combat (qui nécessite un certain "skill", voir point mentionné précédemment.) épée contre épée, bouclier contre bouclier. Je trouvais ça épique et je n'avais jamais vu ça dans aucun autre jeu à l'époque. (Où habituellement, les ennemis ne se protègent jamais, semblent inintelligents...)

  • L'immensité de l'overworld, avec différentes îles et des tas d'endroits à explorer et les secrets cachés. Car comme je le disais plus haut, c'est justement cet aspect, le fait de savoir qu'il y avait peut-être des cases sur la carte qui cachaient des secrets qui était particulièrement excitant et qui faisait rêver, un peu comme une "chasse aux trésor".

  • Et enfin dernier petit détail : la notice illustrée.


Ce jeu est une expérience assez unique. Si vous n'êtes pas rebuté par la difficulté, la technicité et l'exploration vous devez jouez à ce must de l'histoire des jeux vidéo. De mon point de vue, il s'agit, avec le premier du nom, du meilleur opus de cette série.


Mais trois vies, c'était quand même peu...

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le 26 juil. 2017

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gio

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