Cover Ang Lee - Commentaires

Ang Lee - Commentaires

Place singulière que celle d’Ang Lee au sein du système hollywoodien : celle d’un cinéaste fermement établi et comblé de distinctions mais à la discrète stature d’auteur. D’un film et d’un genre à l’autre, il a toujours soumis son style polymorphe et son intelligence intuitive au service des ...

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10 films

créee il y a presque 12 ans · modifiée il y a plus d’un an

Garçon d'honneur
7.2

Garçon d'honneur (1993)

Hsi yen

1 h 46 min. Sortie : 6 octobre 1993 (France). Comédie dramatique

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

D’une situation vaudevillesque qui aurait pu donner lieu à maints développements cocasses, Ang Lee fait le support d’un affrontement entre deux mondes (l’Asie et l’Occident), deux conceptions de la vie. Une confrontation remplie de tendresse et de respect mutuel, puisque chacun sait ou devine une vérité qu’il veut taire à l’autre pour ne pas le blesser. Les esprits sceptiques ou blasés diront de cette savoureuse comédie qu’elle est bien trop élevée ; on peut aussi goûter la grande finesse avec laquelle le cinéaste décrypte les traditions culturelles et les mœurs de son pays, admirer comment il témoigne d’une recherche d’identité et de compréhension des racines étrangères, et se laisser émouvoir par la bienveillance, la chaleur, la secrète mélancolie d’un regard où l’amour l’emporte à chaque instant.

Salé, Sucré
7.2

Salé, Sucré (1994)

Yin shi nan nu

2 h 03 min. Sortie : 5 octobre 1994 (France). Comédie dramatique

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

S’il se situe dans l’exacte continuité de son opus précédent, le cinéaste délaisse les affres de la vie américaine pour un retour aux sources dans son pays d’origine. La nourriture et la famille semblent ici les deux fondements de la culture taïwanaise ; mais, pour que les enfants bâtissent à leur tour une famille, il faut bien qu’ils quittent leurs parents. Sujet à la Ozu que l’auteur traite en une chronique tendre et bienveillante qui trouve toujours le ton juste pour maintenir la tension ou désamorcer la scène par un trait d’humour. Le regard intimiste, la mise sobre et effacée, l’attention à des personnages tous attachants préservent la sensibilité qui émane de ces histoires d’amour et de transmission, de cette variation aigre-douce autour d’un roi Lear culinaire incapable de régenter la vie de ses trois filles. Très joli film.

Raison et Sentiments
6.8

Raison et Sentiments (1995)

Sense and Sensibility

2 h 16 min. Sortie : 28 février 1996 (France). Comédie dramatique

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Qu’il est parfois douillet de se laisser aller aux charmes simples des histoires compliquées, surtout quand on a la larme facile. En portant à l’écran le classique de Jane Austen, le cinéaste taïwanais n’en finit pas d’éprouver ses capacités d’adaptation à des contextes culturels très éloignés du sien. Il met l’accent à la fois sur les mœurs des classes aisées de l’Empire britannique (un monde régi par le mariage et l’argent) et sur l’apprentissage sentimental de deux sœurs parmi les collines moutonnantes du Devonshire. L’essentiel du conflit se situant à l’époque de la transition entre néo-classicisme et pré-romantisme, son point de vue raffiné et acerbe trouve une résonance idéale dans la délicatesse d’une superbe interprétation. On sort ému et heureux de ce film illuminé par une sorte de fatalité du bonheur.

Ice Storm
6.7

Ice Storm (1997)

The Ice Storm

1 h 52 min. Sortie : 11 mars 1998 (France). Comédie dramatique

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

La fin du règne Nixon, à l’heure du Watergate. À travers deux familles du Connecticut influencées par l’air du temps (goût de l’émancipation sexuelle, surconsommation, mensonges et hypocrisies), le cinéaste passe au vitriol les mœurs socioculturelles de la bourgeoisie américaine des seventies. Il choisit le désordre familial, les frustrations longtemps réprimées, les pulsions maladroites ou fatiguées des corps comme métaphore de la crise traversé par un pays ébranlé dans ses certitudes. Critique amère et féroce, qui s’appuie sur une variété de tons oscillant du drame à la comédie, mais qui cependant conserve un regard compatissant sur ses personnages : parents anesthésiés dans leurs sentiments et leurs consciences, adolescents livrés à eux-mêmes et déjà saisis par le désenchantement des adultes.

Tigre et Dragon
6.9

Tigre et Dragon (2000)

Wo hu cang long

1 h 59 min. Sortie : 4 octobre 2000 (France). Arts martiaux, Aventure, Fantasy

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Le film revisite les fondations du wu xia pian avec savoir-faire et élégance, aidé par les avancées numériques et la prise de conscience hollywoodienne du potentiel de séduction tous publics de la mythologie asiatique. Arabesques, duels et poursuites de haut en bas, sur les murs, les toits, les lacs, jusqu’à l’affrontement au sommet ondoyant d’une bambouseraie. Les corps, délivrés de tout inconvénient terrestre, ne sont là que pour le plaisir de se battre dans un univers virtuel où la mort n’est qu’une évanescence. L’ascèse mystique s’accomplit en ces instants, dissonants par rapport aux rhétoriques thèses pseudo-zen du scénario. L’excessive propreté formelle rend l’opération ascétique, pour ne pas dire maniériste. Et le spectateur peu concerné que je suis à bien du mal à retenir ses bâillements.

Hulk
4.6

Hulk (2003)

2 h 18 min. Sortie : 2 juillet 2003 (France). Action, Science-fiction

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Espérant peut-être exploiter la catégorie du "blockbuster d’auteur", Universal et Marvel n’ont pas embauché Ang Lee pour qu’il livre un festival de chemises déchirées et de contre-plongées sur un catcheur vociférant, plongé dans un baril de peinture verdâtre. Il était louable de sa part de jouer les sentiments en accordant une place substantielle à l’histoire d’amour et à des liens filiaux problématiques. Hélas, de références à plusieurs mythes insubmersibles (Frankenstein, Hercule et Zeus, Dr Jekyll & Mr Hyde, King Kong) à un hommage à la BD par quelques coquetteries graphiques, le film étire sur plus de deux longues heures un récit écartelé entre des plages méditatives tournant à l’explication de texte lourde et des scènes où les effets spéciaux n’assurent ni l’émotion ni la sensation du vrai.

Le Secret de Brokeback Mountain
7.1

Le Secret de Brokeback Mountain (2005)

Brokeback Mountain

2 h 14 min. Sortie : 18 janvier 2006 (France). Drame, Romance

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Rétrospectivement, ce mélodrame assez sage et à la lisière de l’académisme vaut sans doute davantage pour son caractère inédit dans le cadre hollywoodien standard que pour ses qualités propres, réelles bien qu’assez modestes. Enregistrant d’abord la découverte de la passion avant de laisser doucement périr le mirage de la liberté sous les mariages de raison et la paternité de rigueur, il dit le poison de la frustration, le lot du non-dit, la plaie éternelle des amours impossibles étouffées autant par les normes sociales que par la lâcheté individuelle : il raconte deux vies volées, piégées dans la toile conservatrice d’une Amérique et d’une époque pétries de préjugés. Mais, parce qu’il opte pour la retenue et l’intériorité, il gagne en dignité ce qu’il perd en frémissement et en transports émotionnels.

Hôtel Woodstock
6.3

Hôtel Woodstock (2009)

Taking Woodstock

2 h. Sortie : 23 septembre 2009 (France). Comédie dramatique

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Pour évoquer le plus mythique des festivals Peace and Love, Lee choisit un angle d’approche a priori original dans son oblicité : celui du jeune homme ayant allumé la mèche de l’évènement avant de s’être vu rapidement dépassé par son ampleur. Le film, volatile jusqu’à l’évanescence, semble vouloir mêler avec légèreté une sorte de bonhommie acidulée et l’impact sournoisement réaliste des "mockumentaries". Il développe une fiction initiatique (essentiellement sociologique et familiale) qui s’accomplit au creux d’une métaphore où l’intime est comme balayé par le vent de l’Histoire. Mais si son ton humoristique est plutôt agréable, son style conventionnel, son manque d’aspérités, son refus de toute forme de lyrisme l’assignent à un registre tellement low-fi qu’il finit par achopper sur l’écueil de l’insignifiance.

L'Odyssée de Pi
6.9

L'Odyssée de Pi (2012)

Life of Pi

2 h 07 min. Sortie : 19 décembre 2012 (France). Aventure, Drame, Fantastique

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Raconter la dérive d’un canot au milieu de l’océan, avec un tigre du Bengale comme seul compagnon, est a priori un défi riche de potentialités dramatiques, allégoriques et poétiques. Mais le meilleur de cette odyssée turquoise, dont le merveilleux est désamorcé par l’artificialité ultra-kitsch de l’imagerie numérique, reste finalement le personnage du père aimant et lucide, dont le cartésianisme agit comme antidote aux accès de bondieuserie béate ponctuant chaque étape de l’aventure. Inventer de jolies histoires pour ne pas avoir à affronter la vérité, célébrer le repli mythomane dans le conte idéalisé pour fuir l’âpreté du monde, la voiler d’une illusion qui rassure et anesthésie : voilà comment elle se fait chantre d’une certaine idée de la foi. Qu’il soit permis de trouver une telle philosophie problématique.

Un jour dans la vie de Billy Lynn
6.9

Un jour dans la vie de Billy Lynn (2016)

Billy Lynn's Long Halftime Walk

1 h 50 min. Sortie : 1 février 2017 (France). Drame, Guerre

Film de Ang Lee

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

On les connaît bien, ces épopées du retour hantées par les images du front, ces élégies post-traumatiques où les heures sont des années et inversement – Wyler et Cimino en ont tiré des chefs-d’œuvre fameux. L’exploit accompli par l’auteur est d’autant plus remarquable, qui construit sur une journée à la gloire du faux, parcourue de fantasmes, d’hallucinations et de souvenirs, un examen de conscience confronté au show géant de la récupération médiatico-patriotique. Parce que l’héroïsme guerrier, le mythe, la culture et l’art qui s’en sont fait les porte-voix n’ont jamais servi que les intérêts de quelques-uns, parce qu’il renvoie le reflet irréel d’une starification obscène exaspérant une sensibilité à vif, le film s’affirme comme l’un des plus témoignages les plus fascinants et perspicaces de son temps.
Top 10 Année 2016 :
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