Judd Apatow - Commentaires

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Apatow est un dilettante génial dont les préoccupations se formulent comme autant de professions désarmantes de sincérité. Dans le domaine très concurrentiel de la comédie américaine, ce film est une déflagration, le croisement d’un Woody Allen trash, défroqué de ses habits d’intellectuel, et du Kasdan des "Copains d’abord", version Homer Simpson/Budweiser. Surtout, c’est un prodige de générosité qui fait entendre un plaidoyer en faveur du quotidien, pratique l’art du contre-pied avec une aisance ébouriffante, magnifie les harmonies improbables en leur rendant leur beauté cabossée, et rappelle que la construction d’un couple ou d’une histoire d’amour, la quête d’une maturité, l’honnêteté vis-à-vis de soi et des autres (buddies forever), sont à la portée de quiconque se donne la peine de les atteindre.
Top 10 Année 2007 : http://lc.cx/UP7

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Un comique de stand up acclamé traverse une grave crise existentielle : l’occasion pour Apatow de tâter un terrain plus malaisant, et d’expérimenter le registre corsé de l’analyse introspective. L’auteur excelle à déjouer les attentes, n’hésite pas à mettre en danger la mécanique purement comique de ses effets au profit d’une interrogation inquiète, infiltre la description cocasse et incisive des trimards du comic-show par l’angoisse sourde de la vanité et de l’échec, et juxtapose les phrases très drôles qui constituent le gagne-pain des protagonistes à un quotidien mélancolique, avec une aisance qui frôle parfois la virtuosité. En résulte une comédie étonnamment déceptive, une sorte de farce flippée toujours écartelée entre rire jaune et ironie féroce sur l’envers du bonheur familial et pavillonnaire américain.

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Niveau général : le mariage, ses joies, ses frustrations. Niveau particulier : la crise de la quarantaine, agrémentée des problématiques du botox, de l’addiction aux séries télé et des réseaux sociaux. S’il reprend le système de description triviale d’"En cloque, mode d’emploi", le film porte les stigmates presque sinistres du précédent opus. Plus que jamais le cinéaste travaille une dynamique de contrastes et d’apparences faussées, dans la forme comme dans le fond. Le bonheur de son couple de quadras, exposé dans toute son opulence bourgeoise, y est au bord de l’explosion : les sourires, les compromis du quotidien, le poids étouffant de la vie conjugale, le rapport difficile au père dessinent une sorte d’enfer quotidien. Reste l’amour usé mais sincère, qui fournit à ce film drôle et mordant une émotion juste.

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Après s’être intéressé aux états d’âme d’hommes trentenaires pressentant avec angoisse et désenchantement le coup de bambou du "middle-age", Apatow change de corps et de cerveau en s’amusant cette fois du donjuanisme au féminin. L’idylle à multiples ressorts et ruptures de son héroïne trash et délurée répond ici à une sorte d’apprentissage moins d’une vie conjugale réglo que de la part d’orgueil que l’on consent à sacrifier pour ne pas perdre l’autre. Et si la pulsion familialiste qui plane sur la fin du film peut confirmer les reproches adressés au cinéaste quant à sa manière de glisser de l’insolence à la règle, de la singularité excentrique à la norme bien centrée, elle n’en découle pas moins d’un effort dialectique visant à se dépêtrer de ses névroses et à trouver un point d’accord épanouissant entre les individus.

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Le roi de New York filmé par Ferrara était un gangster noctambule et halluciné. Celui de Staten Island vu par Apatow est un grand échalas velléitaire, tourmenté, peu remis de la mort de son père et doté d’une inclination marquée pour la glande : l’un de ces antihéros lancés sur les rails de la trajectoire lose-mélancolie-maturité qu’affectionne tant le cinéma indépendant américain. La méthode du cinéaste consiste à investir les clichés et les étapes balisées du récit d’apprentissage introspectif, de tremper la ouate des bons sentiments dans le bain aigre-doux d’une certaine anxiété dépressive, pour mieux capturer l’essence du millénial lambda, coincé entre son désir d’accomplissement et sa peur de l’échec. Par ailleurs, un film qui offre le plaisir de retrouver Marisa Tomei ne peut être que très attachant.